Le souffle du diable se fait sentir de plus en plus. Le pays commence à craqueler perceptiblement, aucun Sénégalais n’a le droit à le laisser s’affaisser.
Depuis des années, je suis en « retraite politique », comme d’autres sont en retraite spirituelle. Le sillon qui charrie le venin du diable à un seul nom : la politique. Pendant ma retraite politique, j’ai entendu des voix.
§ J’ai entendu le professeur de droit constitutionnel M. Babacar Gueye alerter sur la nécessité de mettre une disposition transitoire lors de la révision constitutionnelle de 2016, afin d’éviter une mauvaise interprétation contextuelle de l’article 27 de la charte fondamentale qui dispose « Nul ne peut faire plus de deux mandats consécutifs ». Le peuple Sénégalais a écouté, entendu, mais hélas n’a pas résolu le problème.
§ J’ai entendu le camp présidentiel, son leader le Président Macky Sall en tête, à la veille de la présidentielle de 2019, dire qu’en cas de réélection de son candidat, ce dernier allait exercer son second mandat. Mieux, son deuxième et dernier mandat.
§ Bizarrement, plus tard, j’ai entendu les voix de Messieurs Barthélémy Dias et d’Ousmane Sonko, rétorquer au camp présidentiel, que le Président Macky Sall avait bel et bien droit à se représenter à la présentielle de 2024, à la lecture des dispositions constitutionnelles.
§ J’ai réentendu beaucoup plus tard la voix du Président Macky Sall qui a fini d’êtreréélu, dire que le problème juridique quant à une troisième candidature ne se pose pas, tout en posant des actes qui montrent clairement sa volonté à se représenter à la présidentielle de 2024.
§ Mieux, la salive de sa bouche avait alimenté la plume de sa langue, qui avait fini de graver à jamais dans les mémoires de la postérité dans un livre intitulé le « Sénégal, au cœur », qu’il était dans son deuxième et dernier mandat.
§ J’ai réentendu aussitôt avec beaucoup de tonalité les voix de messieurs Barthélémy Dias et Ousmane Sonko lui rétorquer : « Non M. le Président, vous êtes dans votre deuxième et dernier mandat. Vous ne pouvez pas être candidat en 2024 ».
§ J’ai entendu ceux qui sont censés nous éclairer à comprendre qui du camp présidentiel ou du camp de l’opposition avait raison, s’étriper en contractions. Ces brillants professeurs, nourris à la sève de la science constitutionnelle après des années d’études, et de recherches, étaient incapables de nous donner la même lecture de l’article 27 de la constitution. Ils étaient comme les politiquer divisés en deux camps.
§ J’ai d’abord entendu un ricanement puis une voix. C’était le ricanement du diable ou du démon dont le souffle s’approche de plus en plus. Ensuite, il dit dans un monologue plein de sous-entendus. « Ah ces fiers Sénégalais ! Ils n’ont cessé de nous tympaniser que l’on votait dans leur pays depuis 1848 et que la démocratie était sédimentée dans leur jeu politique. Ils regardaient de haut les autres pays Africains qui réglaient leurs jeux politiques par des machettes, des coups d’Etat militaires, bref, par le sang. Aujourd’hui, c’est le Cap-Vert qui apprend au Sénégal ce que signifie le jeu démocratique Je ne vous donnerai pas l’intelligence et la quiétude de profiter de votre gaz et de votre pétrole, poursuit le démon, toujours dans son monologue. Le djihadisme et le terrorisme qui se nourrissent de pauvreté et de frustrations ont fini de coloniser la bande Sahélo-Saharienne, je vais créer des brèches béantes pour leur permettre de vous anéantir peuple prétentieux. Déjà, j’ai placé le groupe de mercenaires sanguinaires Wagner de mon disciple Evgueni Prigogine à vos portes. Il attend le début du chaos et mon signal pour vous anéantir.
J’ai inoculé la haine dans vos cœurs fiers Sénégalais, vous développerez de plus en plus le discours éthniciste et régionaliste qui décimera votre cohésion nationale tant chantée.
Le discours violant prendra la place du débat programmatique. Les nervis républicains feront face aux forces spéciales clandestines. Du sang, du sang! Crie le démon, avant que sa voix ne disparaisse dans un écho troublant et glaçant.
§ J’ai entendu une voix d’autre tombe dire : « je suis Ivoirien. J’ai tué avant d’être tué finalement, parce que je n’ai jamais mis en avant l’intérêt supérieur de mon pays, mais celui des politiciens seulement. Hélas ! je les vois maintenant partager le poulet braisé avec atiéké et Alocco, roulant dans de rutilantes voitures, draguant les belles femmes des morts, passant de bons moments avec leurs familles. Qu’ils soient maudits ! »
§ J’ai entendu une deuxième voix d’autre tombe dire : « je suis Rwandais. J’ai coupé des têtes avant que la mienne ne sont coupée. Je suis tombé dans le piège des politiciens qui nous faisaient croire que telle éthnie était supérieure à telle autre éthnie. Maintenant, je les vois faire la fête ensemble. Qu’ils soient maudits ! »
§ J’ai entendu un brouhaha de voix d’autre tombe. Chacune voulait parler pour avertir les Sénégalais à ne pas tomber dans le piège des politiciens. La seule phase prononcée à l’unisson était : « que les politiciens soient maudits ! »
§ J’entendu une quatrième voix d’autre tombe dire : « je suis Sénégalais. Je suis Mamadou Diop. J’ai été écrasé par une voiture de la police, alors que je luttais pour le respect de la Constitution. Hélas ! de là ou je suis, je vois que c’est le camp compact qui manifestait à la place de l’obélisque qui s’est scindé en deux, pour s’affronter sur ce qui hier, avait cimenté le groupe : le respect de la constitution. Ah ! ces politiciens ! qu’ils soient maudits ! »
§ J’ai entendu une cinquième voix. Une fine voix, une voix de gamin dire : « je suis Pape Amadou Keita. Pourquoi les politiciens ont écourté ma vie ? Ils m’ont tué à Keur Mbaye Fall. Je voulais vivre comme leurs enfants, et être auprès de mes parents. Ils me manquent ! Que les politiciens soient maudits ! »
§ Le calme qui suivit ce concert de voix me plonge dans une réflexion profonde. Pour la première fois, un mot qui n’a jamais fait partie de mon vocabulaire surgit dans ma tête : la peur
§ Peur pour mon pays. Peur pour tous les innocents qui vont payer le prix du sang. Peur pour tous ces sacrifices de temps d’années, dévalisés par les vandales.
§ Subitement, une voix douce, calme, rassurante, me parle à son tour. C’était la voix de l’Ange qui me transmet le message suivant : « Dramé, dis aux acteurs politiques, aux membres de la Société civile, à la Presse, aux sénégalaises et aux sénégalais, que le dialogue, la concertation, les concessions, les renoncements, le patriotisme, enrobés dans des prières collectives, peuvent aider le Sénégal à ne pas s’effondrer.
§ Dis leur, que dans la vie d’un pays, il arrive des moments pendants lesquels, nul n’a le droit d’être partisan. Tout le monde doit être patriote.
§ Dis aux partisans du pouvoir adossés à la puissance de l’Etat, aux privilèges, que toute chose a une fin, et que seul le Sénégal est éternel. Dis leur de discuter patriotiquement.
§ Dis aux partisans de l’Opposition dopés par ces foules qui semblent les tirer vers les positions occupées aujourd’hui par les gens du pouvoir, que le réveil peut être parfois brutal. Dis leur de discuter patriotiquement : seul le Sénégal est éternel.
§ Dis leur de dialoguer, de se concerter ensemble pour dessiner les contours d’une quatrième République, qu’un référendum du peuple validera, avec tous les accords pour le seul intérêt et la survie du peuple Sénégalais.
Une quatrième République adossée aux valeurs, traditions, et coutumes de votre beau pays,
Une quatrième République qui régule définitivement le jeu politique au Sénégal, Une quatrième République, où l’indépendance de la justice ne sera plus objet de
débat,
Une quatrième République ou la presse repensée, enrichie, sera la boussole qui guide vers le développement, Une quatrième République où les Institutions seront repensées, redessinées, et équilibrées,
Une quatrième République où le peuple exercera lui-même le pouvoir a la base, et ne se refugiera plus sur les tenants du pouvoir pour se dédouaner de ses faillites, Une quatrième République où l’argent du contribuable ne sera plus dilapidé impunément, Une quatrième République où le citoyen exercera librement ses droits, mais s’acquittera aussi de ses devoirs, Une quatrième République, digne du peuple Sénégalais, et inspirée par Thierno Souleymane Baal dans la Charte du Mandé. Comme s’il avait deviné les questionnements qui se bousculaient dans ma tête, l’Ange poursuit : « Il faut oublier vos petites personnes, et penser Sénégal, en prenant consensuellement certaines mesures comme :
§ Il faut au nom de la raison d’Etat, éteindre tous les dossiers judiciaires impliquant tous les candidats à l’élection présidentielle,
§ Il faut supprimer le parrainage, et augmenter la caution a la présidentielle, § Il faut mettre en place une Structure neutre, indépendante, chargée d’organiser toutes les élections au Sénégal, § Il faut mettre en place un Comité restreint et assermenté, charge de récupérer l’argent dilapidé du peuple Sénégalais, § Il faut mettre en place une Commission d’enquête pour faire la lumière sur la mort des nombreuses personnes tuées pendant les manifestations politiques. Non pas pour sanctionner les responsables des bavures involontaires, hélas, inhérentes parfois à toute gestion de crises. Seulement, les familles éplorées ont besoin de connaitre la vérité, et doivent aussi être dédommagées par l’Etat du Sénégal. § Il faut garantir au Président Macky Sall, à son épouse, et à ses enfants, une immunité totale, qui les mettra hors de portée de toute poursuite ultérieure,
§ Il faut amnistier certains faits qui apaiseront le pays sans gros préjudices dommageables,
§ Il faut pousser la réflexion sur la pertinence de la limitation du mandat présidentiel, si des Institutions fortes et indépendantes jouent leur rôle de contre poids. § Il faut réfléchir sur la pertinence d’un deuxième tour à une élection présidentielle, qui ose un problème de chamboulement du libre choix démocratique des électeurs. Une occupation des postes ministériels au prorata des voix obtenues par les uns, et les autres, est une voie à sonder, § Il faut mettre fin au cumul de mandats, et soumettre certains postes de responsabilité aucun appel à candidatures,
§ Il faut adopter le bulletin unique, et rendre automatiquement électeur tout citoyen ayant atteint la majorité,
§ Il faut instaurer le service militaire obligatoire,
§ Il faut regrouper les partis politiques autour de six ou sept doctrines arrêtées de commun accord, tout en réglant aussi le problème de leur financement. L’Ange se tut un instant, avant de répondre à certaines de mes interrogations qui pullulaient dans mon esprit.
« Dramé, le peuple Sénégalais pour régler, ces questions et d’autres certainement qu’il lui plaira de discuter, entre la mauvaise solution, la très mauvaise solution, et hélas, la pire solution. L’intelligence Sénégalaise fera vite le choix de la mauvaise solution, c’est à dire la meilleure des trois. et qui consiste :
A valider par referendum populaire tous les consensus qui sauveront votre pays d’un bain de sang, avant l’expiration du mandat en cours du Président Macky Sall, pour éviter tout vide juridique.
A tomber d’accord sur une période de transition de deux ou trois ans, pour acter tous les consensus avec un Gouvernement d’Union nationale.
A laisser le Président Macky Sall présider cette transition de deux ou trois ans, ce qui lui ôtera la possibilité à être candidat à la prochaine présidentielle, qui sera datée de façon consensuelle.
A mettre en place une Assemblée délibérante pour accompagner la transition.
Dramé, la très mauvaise solution, poursuit l’Ange, c’est de pousser votre très professionnelle et républicaine armée à prendre le pouvoir en cas de chaos. Hélas, bonjour les coups d’état entre militaires. La pire solution, est un chaos général, accentué par l’infiltration de mercenaires étrangers, par des règlements de compte en tout genre, et le grand banditisme, sèmeront la mort partout. Autant dire un pays qui va s’engouffrer dans un trou abyssal. « Interrogatif, tout en me demandant comment dire tout cela a un peuple où chaque camp se soucie plus de ses intérêts, que de l’intérêt général.
L’Ange prit congé en me disant : « Dramé, je sais que tu sais ce qui va se passer si chaque camp s’enlise dans ses certitudes. N’est-ce pas ? DIEU t a fait le privilège de connaitre certaines choses avant date.
Je répondis intérieurement, inquiet et confiant à la fois.
*Abdoulaye DRAME
Elu local à Thiès de 1996 à 2022 (Conseiller municipal, régional, départemental) –
Ancien députe à l’Assemblée nationale du Sénégal (2001 à 2012)
Dialogue : Dans un concert de voix, l’Ange et le Démon m’ont parlé*

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