Le professeur agrégé de science politique à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, Maurice Soudieck Dione, s’est exprimé dans les colonnes de Sud Quotidien sur les quatre projets de loi relatifs à la transparence et à la lutte contre la corruption, actuellement examinés par l’Assemblée nationale. Tout en saluant certaines « innovations démocratiques notables », il pointe du doigt des imprécisions et des lacunes potentiellement problématiques.
Des interrogations autour du statut des lanceurs d’alerte
Le Pr. Dione s’interroge sur la définition même du lanceur d’alerte proposée dans le projet de loi. Il soulève notamment la question de la « vulgarisation des informations » et la notion de « bonne foi », des termes qu’il juge trop vagues. « À qui le lanceur d’alerte signale-t-il les informations ? », interroge-t-il, préconisant une clarification sur les destinataires des informations (référent administratif, organe anti-corruption, opinion publique).
Il met également en garde contre les risques de calomnie et d’atteinte à la présomption d’innocence en cas d’alerte diffusée dans les médias et se révélant fausse. « Que fait-on alors de la présomption d’innocence ? De la dignité du mis en cause jeté en pâture ? » s’inquiète-t-il.
L’universitaire s’interroge aussi sur la « compensation » financière prévue pour le « prête-nom » qui dénonce son complice. Il estime que la dénonciation devrait être désintéressée et que rémunérer le « prête-nom », même s’il est exonéré de poursuites, est une « incongruité ».
Déclaration de patrimoine et accès à l’information
Concernant la déclaration de patrimoine, le Pr. Dione note le passage du seuil d’assujettissement de 1,5 milliard à 500 millions de francs CFA, ainsi que l’extension de l’obligation à de nouvelles catégories de fonctionnaires. Il souligne l’importance de cet instrument dans la lutte contre l’enrichissement illicite et les conflits d’intérêts.
Au sujet de l’accès à l’information, qualifié de « crucial », il salue la clarification apportée par le projet de loi sur les informations soumises au secret, celles réservées à la personne concernée et celles accessibles sans restriction. Il suggère toutefois de préciser l’utilisation des langues nationales pour une meilleure diffusion de ce droit.
L’OFNAC et la Présidence
Enfin, concernant l’OFNAC, le Pr. Dione relève une « sorte de contradiction » dans le texte qui, tout en le définissant comme une « autorité administrative indépendante », le rattache à la Présidence de la République. Il estime que couper ce lien aurait envoyé un « signal fort ». Il note néanmoins des avancées significatives, comme la suppression de la garde à vue des prérogatives de l’OFNAC et la publication de ses rapports.
L’Assemblée nationale a entamé l’examen en commission de ces projets de loi le 21 août 2025. La société civile a également formulé des recommandations sur ces textes.