Non à une telle Université du Sine Saloum !

Non à une telle Université du Sine Saloum !

La conjoncture économique mondiale actuelle recommande urgemment la vulgarisation de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage sous peine de difficultés sans précédent pour les populations et les gouvernements africains. L’émergence d’autres priorités pour les producteurs de céréales européens et américains (biocarburants), les constitutions de stocks en Inde et en Chine, met les tenants des pouvoirs politiques devant leurs responsabilités car maintenant pour les populations africaines, c’est cultiver ou mourir … de faim .Si des solutions à très court terme ne sont pas appliquées sur le plan agricole on ne parlera plus de pays en voie de développement mais de pays en voie de sous – alimentation .La priorité du moment pour nos pays est l’accès à l’alimentation pour les uns et la maitrise de leur sécurité alimentaire pour ceux qui ont la tête hors de l’eau et il n’y a pas de secret ; il nous faudra produire pour nos propres besoins car nous n’aurons plus les moyens de les acquérir sur le marché mondial complètement bouleversé par l’arrivée des pays asiatiques et la Russie qui ont affecté leurs terres de cultures à d’autres applications car détenant les moyens d’acheter ou de coloniser des terres ailleurs, surtout en Afrique .C’est une opportunité unique pour les pays comme les nôtres à saisir, car le contexte actuel favorise l’agriculture , l’élevage et la pêche ; c’est la seule issue de développement qui s’offre à nous au moment où les autres par rapport à leur niveau de développement s’occupe des services et autres industries du futur.
L’Etat du Sénégal va t – il continuer à s’entêter dans l’erreur en matière de Formation et d’Education, de développement tout court ? Il semble que oui.
Le projet d’une université du Sine – Saloum en est la meilleure illustration. Savez – vous qu’il n’existe pas d’écoles de formation de base de paysan au Sénégal ? il n’y a aucune école d’initiation à l’agriculture, à la pêche ou à l’élevage au Sénégal. Les seules écoles qui existent telles le centre de formation de Tobor à Ziguinchor, l’ENCR de bambey ou l’ENSA de Thiés sont des structures chevillées à l’Ecole et les gens qui y vont et en sortent, n’ont généralement pas la fibre paysanne, Ils ont une approche de fonctionnaire dans un milieu qu’ils ne connaissent pas souvent. Les vrais acteurs de ces secteurs sont exclus de toute formation diplômante du fait de la structure et de l’approche de la politique de l’Education au Sénégal qui ne donne aucune chance à ceux que l’on considère comme des analphabètes tant qu’ils sont hors de l’Ecole française telle que conçue et léguée à nos dirigeants par le colon. Il faut que cela s’arrête. Il faut que s’arrête cette propension à penser et concevoir à partir de lunettes de perception déformantes telles les doctorats et autres diplômes de haut niveau sur des matières qui ne nous concernent pas et sur des thèmes préfabriqués.
Pourquoi une université de plus, une naissance de plus avec les tares congénitales transmises par mère Education qui a engendré ces autres universités où nos enfants ne savent plus à quel étude se vouer. Qu’est ce qui va changer avec cette université du Sine Saloum telle que conçue et pensée par ces éminences ? Rien de rien, sinon une niche de plus de contestations de bourses indûment méritées, de carrières inachevées ou mal terminées. La première erreur dans l’érection de cette université qui montre le mauvais chemin qu’elle prend est la signature d’un accord «de partenariat avec Agreenium, un consortium français des grandes écoles et institutions de recherche en agro-sciences, dans le cadre de sa recherche de partenaires techniques et scientifiques d’excellence au plan international. Le partenariat concerne huit (8) principaux axes que sont : échange d’étudiants et de doctorants ; accueil d’enseignants, chercheurs, techniciens, experts ; ingénierie pédagogique ; élaboration et mise en œuvre de projets de recherche et d’enseignement conjoints ; échange de pratiques en matière de transfert de technologie et de création d’entreprises ; réponse conjointe à des demandes de consultation nationales et internationales ; échange de documentation et de publication ; participation et, le cas échéant, organisation conjointe d’évènements, rencontres, séminaires et conférences sur des thèmes d’intérêt commun» nous dit le rectorat dans un communiqué aux allures de propagande .
Dès avant sa naissance, cette université est déconnectée de la mission, des objectifs et en déphasage complet des urgences de l’heure qui interpellent le Sénégal et les Sénégalais. On nous parle déjà de théories, de paperasses, d’échanges qui ne vont concerner que des chercheurs qui ne trouveront rien, parce que tout a été trouvé, de documentations qui ne seront que des blablas d’initiés et surement de voyages et études qui ne nous rapporteront rien. Si une université du Sine Saloum doit être créée, que cela soit un centre de formation paysanne encadré par nos chercheurs émérites de l’Institut sénégalais de recherche agricole (ISRA) qui trouvent toujours des recettes pour améliorer les semences et autres plantes qu’on n’applique jamais et qu’on ne cite nulle part et ces savants de l’Institut de technologie alimentaire (ITA) qui nous sortent des potions et des potages qui transforment nos vies et qui ne sont jamais récompensés. Que cette université soit pensée par ces experts locaux, ces hommes de terrain à l’expertise avérée serait mieux que cette importation de connaissances et d’expertises qui grèverait encore nos finances et nous éloignerait encore de nos objectifs immédiats.
Une université du Sine Saloum doit épouser les réalités économico – sociales pour prospérer, sa création doit s’articuler autour de l’existant et du palpable. La région du Sine Saloum, adossée à la mer, regorge d’eaux douces, de terres fertiles et de forêts, des potentialités telles qu’on devrait s’interdire d’agir en solo en associant à sa création, les larges secteurs de la pêche, de l’agriculture, de l’élevage, de l’industrie et de l’artisanat. Ces générations de cultivateurs, pêcheurs, pasteurs et éleveurs qui ne vivent et ne connaissent que ça, ne doivent pas passer devant le portail de cette université sans s’arrêter et ce sera le cas, si cette université est conçue dans sa forme actuelle.
Elle ne donnera rien que des concepteurs qui, comme d’habitude, construiront des schémas inadaptés et le pire qui pourrait leur arriver, c’est d’engranger des per diem et de faire des voyages d’études sur le blé ou le vigne ou servir de relais de propagation de nouveaux engrais ou de produits OGM.
Ce qui devrait caractériser cette Université sera sa proximité avec le monde productif, industriel et sa très forte implication dans la recherche scientifique et technologique appliquée, à laquelle les étudiants- acteurs participent. La valeur éducative de connaissances utiles, la nécessité du « savoir pour faire » (Learning by doing) si chère aux pragmatiques universités américaines. Cette Université polytechnique serait notre « silicone vallée » agricole si l’on peut dire qui serait le relais entre les enseignants – chercheurs, les étudiants et les entrepreneurs.
Pour une fois, commençons par le commencement, essayons de construire en commençant par les fondations, cela, d’autant que le Programme Sénégal Emergent (PSE) s’appuie beaucoup sur le secteur tertiaire en créant les domaines agricoles communautaires (DAC). Il faut donc créer le lien entre ces DAC et la future Université technique du Sine Saloum qui serait plus appropriée si elle était une Université polytechnique agricole ou un Institut des sciences et technologies agricoles,

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