« L’élection du Maire au suffrage universel direct : avantages et risques d’une option », Par Dr Bou FALL

Aujourd’hui, l’option d’aller vers une élection du Maire au suffrage universel semble faire l’unanimité au niveau de l’Association des Maires du Sénégal ; idée intéressante mais qu’il faut examiner avec beaucoup de lucidité.

C’est dans ce sens que nous voulons dans ces lignes qui vont suivre, rappeler les principes de l’option actuelle, ensuite examiner les avantages et risques d’un changement de cap.
Le principe de la décentralisation au Sénégal est de donner le pouvoir à la base, à la communauté pour un développement des territoires. C’est pourquoi un groupe d’hommes et de femmes censés représenter la population est élu sur la base de listes de partis et de coalitions de partis.

Dans l’esprit, malgré le fait que ces acteurs accèdent au conseil par le truchement de la politique, ils doivent mettre en avant l’intérêt général par une mobilisation autour des objectifs de développement local. Donc le législateur ne s’est pas trompé en mettant en avant le conseil, qui, à son tour élit le Maire.

De nos jours force est de constater que l’option actuelle malgré ses principes nobles a montré ses limites sur certains aspects et un changement de cap pourrait avoir des avantages en ce sens que, les calculs politiciens n’empêcheront plus à un vainqueur d’élections de perdre la direction de la collectivité locale. En outre, les manœuvres politiques, la corruption de certains conseillers n’auront plus droit de cité pour accéder au pouvoir à la place d’une tête de liste qui a attiré l’essentiel des électeurs.

La question qu’on est endroit de se poser est celle de savoir si ces problèmes précités sont liés à l’option ou à la tortuosité de certains hommes politiques sénégalais dont l’éthique n’est pas la première qualité. Il faut tirer les leçons des changements à l’Assemblée nationale qui avaient pour objectifs d’éviter la transhumance. Que constate-t-on ? Des députés gardent des mandats en disant qu’ils n’ont pas démissionné mais démis, d’autres gardent des sièges tout en créant un nouveau parti. En réalité, tout ça pour ça devrait-on dire, on aura légiféré mais pour quel résultat.

Un changement d’option est une affaire sérieuse car comportant toujours des risques. En effet, l’élection au suffrage universel direct d’un maire signifie le rendez- vous d’un homme ou d’une femme avec son terroir alors que l’option actuelle, c’est le rendez-vous d’un groupe hétérogène dans ses compétences et origines mais homogène dans ses ambitions, avec leur terroir.
Pour régler les problèmes de développement de nos terroirs et territoires faut-il se fier aux compétences d’un superman ou à la mobilisation des citoyens représentés par leurs conseillers ? C’est une question à laquelle, il faut répondre.

Si l’option est d’aller vers le suffrage universel direct, il ne faut pas jeter la quintessence de l’option actuelle et élire toujours un conseil dont la tête de liste majoritaire serait le maire et les autres membres du bureau élus par les conseillers. En somme, cette réforme devrait être accompagnée d’une réflexion sérieuse sur le statut de l’élu, les avantages et prérogatives donnés aux conseillers pour éviter de concentrer trop de pouvoir entre les mains d’une seule personne. La décentralisation sera participative ou ne sera pas et toute réforme doit éviter de porter un sacré coup à la participation, telle est mon intime conviction.

Bou FALL, Dr Bou FALL, Géographe, Inspecteur de l’Education et de la Formation de Kédougou.

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