Non au référendum ! (Par Momar Mbaye)

Non au référendum ! (Par Momar Mbaye)

Si je suis élu pour 7 ans, je m’engage à n’exercer qu’un mandat de 5 ans. Cette réforme qui limitera le nombre de mandats à 2 et la durée à 5 ans, ne pourrait faire l’objet de modifications» (Macky Sall, candidat à la présidentielle de 2012)

Sortir de cette spirale des élections à n’en pas finir. Notre pays ne gagne rien, à dire une seconde fois, si oui ou non il souhaite la réduction de deux ans du mandat actuel du président de la République.

Organiser un référendum dans le contexte actuel n’est ni utile ni opportun, si ce n’est une volonté du pouvoir de détourner les Sénégalais de leurs sujets de préoccupations immédiates. Parce que ce même peuple avait été consulté le 22 janvier 2001 par référendum : sa réponse était «oui» au quinquennat et donc «non» au septennat hérité de l’ancien pouvoir socialiste.

Mais il fallu qu’un président qui entretenait des relations quasi-«incestueuses» avec la constitution de son pays, et qui pour des raisons de succession à la tête de l’Etat, avait usé de ses prérogatives pour se substituer à la volonté populaire exprimée dans les urnes à plus de 90%, le 22 janvier 2001.

Un certain Abdoulaye Wade qui a été le premier à théoriser un mandat de 5 ans, avant de se renier une fois installé au pouvoir.

Il en sera de même pour son élève et successeur, Macky Sall qui, entre les deux tours de la présidentielle de 2012, s’était lui aussi engagé à réduire de deux ans son mandat de sept ans, s’il était élu. Une manière pour le tout nouveau candidat-président de tourner le dos au septennat, définitivement, et d’inscrire le Sénégal dans le sillage des grandes démocraties, la France et les Etats-Unis souvent cités en exemple.

Mais que d’hésitations, que de tergiversations entretenues par une cacophonie autour de la réduction du mandat présidentiel. Ce qui a fini de convaincre l’opinion, que le successeur d’Abdoulaye Wade ne serait plus disposé à honorer ses engagements, à respecter sa parole déjà décrédibilisée par des reniements multiples, à commencer par la pléthore de ministres d’un gouvernement qui passe de 25 à 40 membres…

Est-il le lieu de rappeler que ce pays a suffisamment perdu du temps autour de cette polémique sur le mandat présidentiel que l’on pensait avoir réglé en 2001.

Quid des Assises nationales que Macky Sall s’était engagé (verbalement) à respecter et qui à leur tour avaient clos le débat de manière définitive ? Ou encore cette fameuse Commission nationale de réforme des institutions (Cnri) cooptée pour effectuer le même travail que les Assises, et soumettre à peu près les mêmes propositions qui peinent à être appliquées.

Plusieurs mois après leur remise au président de la République, les propositions contenues dans le rapport de la Cnri qui a coûté au contribuable sénégalais plusieurs millions de nos francs, dorment toujours dans les tiroirs du palais.

Aujourd’hui, on veut faire croire à l’opinion que seul un référendum peut clore le débat et régler définitivement cette question, ce qui s’avère un mensonge grotesque entretenu par le pouvoir et ses communicants à l’assaut des médias. Il y a à la fois quelque chose de malsain et de suspect dans cette velléité du pouvoir d’écarter le parlement au profit d’une consultation populaire.

Passé la Présidentielle de mars février-2012, les Législatives de juillet 2012, les Locales de juin 2014, aller (encore) aux urnes est la dernière chose dont les Sénégalais ont besoin. Insensé que de vouloir consulter nos compatriotes sur une question à laquelle ils ont répondu, il y a 13 ans.

Est-il à craindre que ce projet de référendum suspect, de plus en plus agité dans l’entourage présidentiel ne portera pas uniquement sur la durée du mandat présidentiel. Mais pourrait bien englober des non-dits, des questions-pièges ou décisions impopulaires que l’on cherchera à faire passer avec un «oui» à la réduction du mandat présidentiel.

Avons-nous hâte, tous, que le président de la République se mette au travail et vite. Qu’on arrête d’installer le pays dans une campagne électorale permanente.

Pour avoir occupé les postes de Premier ministre en 2004 et de président de l’Assemblée nationale en 2007, l’actuel chef de l’Etat sait pertinemment que la voie parlementaire reste la mieux indiquée pour réduire son mandat et non une consultation populaire qui coûterait au contribuable du temps et de l’argent.

Devrions-nous alors pouvoir compter sur des députés assez libres et indépendants dans leur choix pour aider le président à respecter ses engagements, à se respecter lui-même, quitte à scier le tronc sur lequel il est installé, quitte à ne faire qu’un seul mandat de 5 ans.

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