L’islam ne connaît pas le féminisme (Par Sheikh Ndiaye)

Beaucoup de rectifications à apporter dans le beau texte intitulé » À l’ombre d’une icône féministe : Fatou Sow, paru sur seneplus. Pour ne pas ennuyer le lecteur et dans un souci de concision, je me limiterai aux propos sur l’islam et même dans cet espace, sur la référence à Aicha( ra) sera revue.
J’aimerais préciser, chère madame Khaira Thiam, qu’il s’agit moins d’une critique d’opinion que de rétablissement des faits historiques avérés. Ibn Kaldoum, ibn Kathir, « les quatre califes », et « les signes de la fin des temps » seront nos autoroutes InchaAllah. Voici vos propos suivis de la réalité historique.
» Par ailleurs, l’islam comme outil politique ne date pas de l’écrit de notre mise en cause. S’il a existé du vivant du prophète, dès sa mort, les guerres fratricides et intestines ont vu le jour pour assurer sa succession. Aîcha bint Abu Bakr, une de ses veuves a participé en 656 à l’une des plus célèbres guerres civiles du monde musulman. Du haut du promontoire que constitue la litière posée sur son chameau, elle dirigeait les troupes armées, réclamant justice pour l’assassinat de de Uthman. Ce moment de fragilité de la concorde de la ummah islamique a fait l’objet de plusieurs interprétations. Pour les féministes islamiques, preuve est faite de la puissance morale, économique et militaire des femmes musulmanes les autorisant à participer à la vie politique civile et militaire en plus d’être mécène du projet islamique ( Khadidja). Par sa revendication de justice, Aîcha a remis en cause la légitimité du pouvoir de Ali ibn Abi Talib. Elle a ainsi ouvert dans le monde musulman une tradition des débats politiques, juridiques et théologiques sur des questions telles que l’autorité, la rébellion et la place de l’opinion dans la gouvernance islamique. Ces traditions islamiques de la controverse politique se complètent de trois injonctions contenues non pas dans l’histoire de l’islam mais dans le texte sacré qu’il serait bon de relire parfois. »
Chère madame, la bataille du chameau eu lieu le jeudi 20 de jumada2 en l’an 36 de l’hégire comme vous l’avez si bien dit. C’est la période dite des grands troubles ( fitnatoul koubra). Elle est intervenue vingt six ans après la mort du prophète (saw). Alors le calife Ali(ra) cherchait à rétablir la notoriété de l’état et à lui rendre sa crédibilité, les comploteurs qui étaient derrière cette crise continuaient de semer la zizanie entre les musulmans. Certains étaient encore à Medine, d’autres à la Mecque et dans les principales contrées musulmanes. Ces gens propageaient le doute sur le califat de Ali. Pour cela ,ils réclamaient la vengeance de la mort du calife Uthman( ra). La tactique consistait à entretenir un climat d’instabilité dans l’empire avec en ligne de mire un retour programmé des deux puissances déchues: Byzance et Perse, d’un côté. De l’autre, des musulmans sincères, chagrinés par la disparition du calife, exigeaient de Ali la poursuite des assassins en priorité alors que l’Etat était fragilisé. L’imam Ali(ra) s’attelait avec fermeté, d’abord, en la reprise en mains des affaires de l’état. Mais pour les satisfaire, il leur pria de désigner les assassins du défunt calife ,leur promettant de prendre ses responsabilités immédiatement. Malheureusement, ils n’eurent aucun renseignement. Quant à Ali, il ne voulait pas perdre de temps pour ramener la province de Cham et son gouverneur Mouawiyya (cousin de Uthman) ,entré en rébellion ouverte après sa destitution.
Parmi les croyants sincères, désirant la punition des assassins du calife mort, il y avait les deux compagnons du prophète Muhammad (saw) Talha et Zoubeir(ra) et Aîcha (ra) la mère des croyants. Les deux frères en islam n’étaient pas satisfait de la décision du calife. Ils lui demandèrent la permission d’aller visiter les lieux saints de la Mecque. Sur place ,ils trouvèrent l’épouse du prophète et la convainquirent de se joindre à eux pour aller à Bassora rejoindre ceux qui voulaient justice tout de suite pour Uthman( ra). C’est ainsi qu’ils se dirigèrent vers Bassora avec trois milles hommes. Le groupe armé passa par un point d’eau surnommé Al Kharàb. Aîcha se souvint que le messager de Dieu avait dit ,un jour, à ses épouses » Plut à Dieu ! Si je savais contre laquelle d’entre vous aboieront les chiens du point d’eau d’Al Kharàb. Aîcha voulut ,en ce moment, retourner à Medine. Talha et Zoubeir la dissuaderent. Son statut et son image de mère des croyants pouvaient faire fléchir les plus réticents. Elle resta finalement avec eux » rapporté par ibn al Athir, Al Kànin. Abdalla bin Zyadal Assadi rapporte » Quand Talha, Zoubeir et Aîcha prirent le chemin de Bassora, Ali envoya Ammar Ben Yassir et Al Hassan( son fils) à Kûfa pour enrôler des volontaires, Hassan monta sur le minbar et Ammar se plaça en bas. Alors les gens affluèrent, nous entendîmes Ammar qui disait : Aîcha s’est dirigée vers Bassora. Par Dieu, elle est l’épouse de votre prophète dans ce monde et dans l’autre, mais Dieu a voulu vous éprouver par elle afin de savoir auxquels des deux, Lui(Alla) et elle, vous allez obéir. » sahih Boukhary.
Le gouverneur de Bassora bloqua le groupe armé à l’entrée de la ville. Une confrontation s’en suivit avec des morts. Cela donna raison aux calife Ali du bien fondé de la force pour rétablir l’ordre. Il envoya une lettre à Talha, à Zoubeir et à Aîcha en les priant de se retirer avec la promesse de tout faire pour le retour de la paix. Il appela la mère des croyants à quitter les rangs pour calmer les combattants. Il rappela à Zoubeir le propos de l’envoyé de Dieu (saw) qui lui avait dit » tu te battras contre Ali et ce jour là, tu seras injuste à son endroit « . Zoubeir se retira de la mêlée après ce souvenir. Amr ibn Jourmouz, qui le suivait, lui envoya une flèche mortelle. Talha mourut dans la bataille. Aîcha, s’étant rendu compte du complot, appela les musulmans à le combat. Elle désigna les véritables assassins de Uthman. Les gens se regroupèrent autour d’elle pour la protéger. Ali recommanda à Ammar ibn Yassir et à Mouhamad ibn Aboubacar de recueillir le palanquin de la mère des croyants afin de la sortir saine.et sauve des combats. Elle fût ramenée, avec sécurité, à l’intérieur de Bassora. Ali(ra) vint la trouver et la salua » comment te portes tu ,oh mère ? Bien » répondit elle. Le calife lui dit que « Dieu te pardonne « . Elle lui dit ,à son tour, » et à toi aussi « . Puis elle ajouta » j’aurais souhaité être morte depuis vingt ans et n’avoir pas vécu ce jour. » Ali se tourna vers son fils Hassan et dit » ton père aurait souhaité être mort depuis vingt ans « .
Le chagrin enveloppa l’épouse du prophète (saw). Elle ne cessa de pleurer jusqu’à demander de ne pas être enterrée à côté de l’envoyé de Dieu car elle estimait avoir mal agit après la mort du meilleur des hommes. Elle fut enterrée au cimetière de Baqia. Voilà l’histoire authentique, documentée et disponible, chère madame.
Oui elle réclamait justice pour Uthman. Mais elle ne dirigeait aucune troupe armée. Leurs rôles avec Fatima et les autres femmes musulmanes n’étaient pas de revendiquer l’égalité avec les hommes ou booster l’image d’une héroïne spéciale durant les batailles auxquelles elles ont participé. Elles amenaient de l’eau et donnaient des soins aux blessés.
Aîcha (ra) ne serait jamais venu à Bassora si les deux illustres compagnons du prophète (Talha et Zoubeir) ne l’avaient pas persuadée. Ce groupe armé hétéroclite voulaient simplement profiter de son image pour faire triompher sa cause, c’est à dire la justice immédiate pour Uthman. Cause sur laquelle Le calife Ali était tout à fait d’accord priorisant d’abord l’ordre dans la ummah. Ce fut, d’ailleurs la première apparition de Aîcha en public pendant cette période de troubles et également la dernière en raison du traumatisme résultant de ce triste événement. Elle n’a jamais contesté l’élection de Ali comme calife. Sa posture de mère des croyants et son érudition faisaient que les croyants la consultaient sur la vie du prophète et les hadiths dont elle était une des mémoires vivantes. Sa puissance morale, économique, comme pour toutes les femmes musulmanes d’hier et d’aujourd’hui, trouvent sa source et son inspiration dans la foi en Dieu et les recommandations du messager qui l’avait éduquée. Elle n’a ouvert aucune tradition de débats contradictoires politiques, juridiques, théologiques ou autres. Sur l’autorité et la liberté d’opinion, par exemple, elle a été fidèle aux enseignements de son bien aimé époux (saw).
Malheureusement, elle comme les femmes musulmanes, n’apparaissent pas dans le miroir de vos modèles à suivre. Parce simplement, elles vivent en parallèle avec vous. Votre source d’inspiration et vos exemples sont ailleurs, vous le savez très bien, chère madame. Les femmes musulmanes sont heureuses, comme le voile qu’elles portent, d’être en phase avec les directives du livre sacré. Elles sont satisfaites des droits et devoirs que leur à assigné Le Créateur Suprême Incontesté. Donc ,à vous vos œuvres, à elles les leurs. Pas d’amalgame svp.
L’islam ne connaît pas le féminisme.