« Interdiction sortie du territoire: Mamadou Dia et Cheikh Anta Diop avaient subi le même sort »

Dans tous les domaines ils sont « ndaare ». Ndox doyul, « courant » doyul, mobilité urbaine baaxul, santé bi dafa feebar, économie bi baaxul, la dépendance toujours de plus en plus forte, mais quand il s’agit de brimer des opposants, ils sont aux premières loges
Pas de paix sans justice.
« Dëkk bu amul justice, nan lay fay dëkkee », disait Al-Maktum. Seule la lutte libère. C’est ce que l’Histoire enseigne.

Dakar, 31 Octobre 1979
Invité aux cérémonies commémoratives de la Révolution Algérienne du 1er Novembre, le gouvernement sénégalais vient de me refuser le visa de sortie pour l’Algérie.
Cette mesure, outre son caractère mesquin et inélégant à l’égard du peuple algérien, est une nouvelle atteinte grave à la libre circulation des personnes, singulièrement dans le cadre de la solidarité entre pays frères.
Le motif officieusement invoqué – celui d’une déclaration jugée subversive faite précédemment à Alger – met lui-même en cause le principe non moins discutable de la liberté de critique des opposants en quelque lieu que ce soit.
Prise au plus haut niveau des responsables de l’État, cette décision montre, de façon éclatante, qu’il est impossible d’être à la fois arbitre national et chef de faction et que la démocratie senghorienne n’est qu’une parodie de démocratie.
Elle renforce notre détermination de lutter sans défaitisme contre le régime néo-colonial, anti-démocratique et anti-populaire actuel.
Elle nous offre, enfin, l’occasion d’affirmer avec force notre solidarité au peuple algérien et de communier de toute notre âme avec lui en ce moment historique et émouvant de la célébration de la plus grande défaite du colonialisme en terre d’Afrique.

Mamadou DIA

Cette mesure d’interdiction de sortie du territoire visait aussi Cheikh Anta Diop, invité également du gouvernement algérien.
Cheikh Anta Diop en parle dans les lignes ci-dessous :
« Ayant été invité par le gouvernement algérien pour assister aux cérémonies commémoratives du 25eme anniversaire de la révolution algérienne le ler novembre, le gouvernement sénégalais m’a refusé le visa de sortie du territoire, comme il l’a refusé dans les mêmes conditions à l’ancien Président du Conseil, M. Mamadou DIA, ce qui n’honore pas le régime.
J’ai même appris que le refus qui me concerne a un caractère permanent ; cela est une manière à peine voilée de transposer les règlements de comptes culturels sur le plan politico-juridique en essayant de paralyser mon activité intellectuelle au niveau international : l’appareil d’État est vraiment l’arme absolue qui permet de se débarrasser des adversaires gênants. »

Le statu quo éternel
Khadim Ndiaye