Un monde au bord du gouffre : « L’Iran face à l’empire de l’impunité », (Vieux Macoumba)

Un grondement sourd traverse la planète. Ce n’est pas celui du tonnerre naturel, mais celui des bombes larguées par des États qui ont renoncé à la morale, au droit, à l’humanité. Israël bombarde. Les États-Unis applaudissent. L’Europe se tait ou justifie. Et l’Iran encaisse, se redresse, et riposte. Ce que nous vivons n’est pas une simple crise géopolitique : c’est l’effondrement visible, méthodique, du droit international.

Les images sont encore floues, les bilans encore incertains, mais une chose est claire : en bombardant les infrastructures nucléaires iraniennes — des sites sensibles, potentiellement radioactifs — les États-Unis ont franchi un seuil gravissime. Le danger n’est plus théorique, il est palpable. Et pourtant, aucune condamnation ferme de la part de l’ONU. Aucun communiqué clair de l’AIEA. Le silence est assourdissant, et il en dit long.

Il y a quelques décennies, le monde entier aurait levé la voix. Aujourd’hui, les institutions qui devraient incarner la justice internationale sont devenues des spectres, des coquilles vidées de leur substance, manipulées par les puissances qui les financent. L’ONU ne sert plus à prévenir les conflits, mais à les encadrer selon la géométrie variable des intérêts occidentaux.

Trump, dans son éternel numéro de provocation clownesque, continue de faire du spectacle avec la géopolitique. Sa rhétorique belliqueuse, populiste, dangereuse, pourrait passer pour une caricature s’il ne s’agissait pas de la première puissance nucléaire du monde. Menacer d’éliminer des dirigeants étrangers, cibler des infrastructures civiles, ridiculiser toute tentative de médiation diplomatique, tout cela n’est pas seulement irresponsable : c’est criminel.

Et pourtant, ce n’est pas la première fois. Les États-Unis ont bâti leur hégémonie sur la guerre : Hiroshima, le Vietnam, l’Irak, l’Afghanistan, la Syrie, la Libye. À chaque fois, ils ont prétendu agir au nom de la démocratie, de la sécurité, ou des droits de l’homme. À chaque fois, ils ont laissé derrière eux des ruines, des morts, des régimes instables et des peuples brisés.

Aujourd’hui, l’Iran est dans leur viseur. Pourquoi ? Parce qu’il refuse de plier. Parce qu’il soutient la cause palestinienne. Parce qu’il possède d’immenses réserves énergétiques. Parce qu’il constitue un pôle de résistance à la domination israélo-américaine dans la région. La question du nucléaire n’est qu’un prétexte. Israël, lui, détient l’arme atomique, refuse toute inspection, viole toutes les résolutions de l’ONU – mais ne subit jamais de sanctions. Deux poids, deux mesures : telle est la devise de l’Occident.

Pendant ce temps, les médias occidentaux orchestrent la manipulation de masse. Les faits sont tronqués, les images filtrées, les récits inversés. L’agresseur devient victime, et la victime, une menace existentielle. Ceux qui osent émettre des doutes, poser des questions, dénoncer les contradictions, sont écartés, censurés, marginalisés. La vérité devient un luxe, un objet de contrebande que seuls les médias alternatifs osent encore distribuer.

Mais un fait majeur bouleverse la donne : l’Iran n’est plus seul. Il n’est plus isolé comme dans les années 2000. Il dispose d’alliés, d’un réseau de résistance étendu du Liban à l’Irak, de la Syrie au Yémen. Il dispose aussi de capacités militaires redoutables, que les missiles hypersoniques comme le Sijjil rendent visibles. Il frappe désormais là où Israël pensait être intouchable. Tel Aviv panique, les abris se remplissent, les sirènes hurlent.

Et soudain, le monde découvre que la terreur n’est plus un monopole occidental.

Ce basculement est aussi psychologique. L’Occident, habitué à l’impunité, découvre la vulnérabilité. Les États-Unis hésitent à s’engager davantage, car ils savent que toute escalade pourrait leur coûter cher : leurs bases militaires dans la région sont à portée, leur image déjà ternie pourrait voler en éclats, et l’opinion publique mondiale ne suit plus aussi aveuglément.

L’Iran, debout, meurtri, mais digne, montre que la puissance ne se mesure pas seulement aux budgets militaires ou aux alliances diplomatiques. Elle réside aussi dans la résilience, la mémoire, la légitimité historique. En cela, il n’est pas seulement un pays en guerre : il est un symbole.

Face à l’ignominie, la dignité. Face à la manipulation, la lucidité. Face à l’empire, la résistance.

Car si le droit international est mort, la conscience des peuples, elle, est en train de renaître.

Vieux Macoumba*
Sociologue

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