Statut Spécial, pour hisser le grand Dakar au rang des grandes métropoles (Par Abdallah Atyr Ba)*

Avec ses multiples atouts, attraits et potentialités, Dakar est à la traîne. La capitale sénégalaise, sujette de querelles et de tiraillements entre chapelles politiques, peine à jouer son rôle de locomotive économique de l’Afrique de l’ouest. La mise en place d’un statut spécial pour ce Grand Dakar, est une idée salutaire et salvatrice pour permettre l’émergence, en un temps record, de ce qui sera un des plus grands hubs du continent.

Des hommes politiques, de tous bords, ont beaucoup critiqué, l’idée de conférer au Président de la République du Sénégal, le pouvoir de nommer par décret une autorité chargée de conduire les destinées de la capitale, Dakar, qu’ils ont accusée, de ne pas être démocratique, d’éloigner les administrateurs des citoyens , d’accroître les inégalités territoriales, souvent, au détriment des collectivités de l’intérieur ou encore de favoriser l’ingérence de l’Etat dans la gestion des territoires.

Par sa position stratégique, son histoire, sa géographie et son patrimoine architectural particuliers, en Afrique et dans le monde, Dakar recèle le potentiel d’une grande métropole à même de constituer un pôle de développement national, voire régional.

Malheureusement, sous équipé, mal urbanisé et étouffant sous le poids d’une démographie galopante et d’une circulation automobile paralysante, le grand Dakar ne réunit pas, encore, toutes les commodités nécessaires, malgré les nombreuses tentatives de l’Etat central, de bien positionner la capitale dans le réseau des villes qui comptent sur la scène africaine.

Aujourd’hui, notre capitale, la métropole du grand Dakar, allant du Cap Manuel à Diamniadio, a l’obligation de faire sa mue et d’accélérer la cadence de réalisation des grandes infrastructures, pour espérer rattraper le retard enregistré pendant de longues années.

S’il est vrai que, dans la course à la métropolisation, la création d’infrastructures de transport et la mise en œuvre de politiques de réhabilitation ou de rénovation urbaine constituent des éléments essentiels, il est tout aussi clair que, les Villes ne pourraient, jamais, à elles seules, répondre à la demande et atteindre les objectifs énoncés en termes d’éclairage public, d’entretien de la route et des infrastructures , de lutte contre la dégradation de la qualité de l’environnement, de l’occupation anarchique des espaces ….

C’est dans ce cadre que l’Etat du Sénégal consacre, annuellement, plus du tiers (1/3) du budget national sur cette portion du territoire national, qui ne représente, pourtant, que 0, 26% de la superficie totale du pays.

Par ailleurs, l’interventionnisme, quasi permanent, des autorités administratives déconcentrées, dans les opérations de restructuration, de déguerpissement ou de rénovation urbaine, prouve que, les modalités de transfert des compétences, de l’Etat central vers les agglomérations du grand Dakar, demeurent floues et suscitent, de plus en plus, de nombreuses interrogations parmi les experts.

À ces éléments s’ajoute l’état des lieux, très souvent catastrophique, des relations entre Maires de la capitale et Chefs d’Etat, en Afrique, où les cités sont en chantier, semble, plaider, pour une révision de fond du mode de désignation du chef de l’exécutif local dans la capitale.

A titre illustratif :

Le 14 septembre 2020, Maire de Libreville depuis 19 mois, Léandre Nzué, 63 ans, cadre du Parti démocratique gabonais (PDG) est poursuivi pour détournement des fonds publics et blanchiment des capitaux. Il risque une peine de prison ferme.

En 2017, Khalifa Sall, maire de la capitale du Sénégal depuis 2009, a été inculpé et écroué pour détournement de deniers publics et blanchiment de capitaux…

En Juin 2015 au Burkina Faso, l’ancien maire de la capitale est arrêté pour malversations financières.

Andry Rajoelina, Maire de la capitale malgache, leader du soulèvement populaire contre le régime de Marc Ravalomanan, est porté au pouvoir en mars 2009, après un coup de pouce d’une partie de l’armée.

Au Sénégal, on constate bien une volonté affichée, au plus haut niveau de l’état, de renforcer les pouvoirs des Villes et Communes et de les doter de capacités décisionnelles et de moyens d’action leur permettant d’intervenir efficacement dans la conception et la mise en œuvre de programmes et projets à l’échelle locale.

Cependant, dans un contexte de détérioration des conditions de vie et de crise de confiance envers la classe politique, il est inopportun de continuer à se focaliser sur la démocratie locale, au détriment du renforcement de l’Etat et au grand désavantage des populations.

Lorsque l’Etat investit un 1/3 de son budget sur une portion du territoire national, il devient difficilement concevable que l’autorité locale, de cette partie du territoire, soit en conflit, larvé ou ouvert, avec ceux qui incarnent, la mouvance de l’exécutif national.

Les acteurs politiques doivent engager un débat de fond, afin de parvenir à un nouveau compromis autour d’une réforme, visant à faire du grand Dakar, une métropole, en offrant à nos grandes agglomérations un nouveau cadre institutionnel plus adapté.

La date du 10 Octobre 2020, première édition de la journée de la décentralisation, devrait être l’occasion pour la Présidence de la République, le HCCT, l’Assemblée Nationale et le gouvernement de lancer une série de consultations, réunissant élus locaux, organisations de la société civile, hauts fonctionnaires, responsables politiques et syndicaux, sur les modalités de désignation d’une autorité chargée de conduire les destinées de la métropole du Grand Dakar, qui s’étend du Cap Manuel à Diamniadio, afin de lui conférer une identité et un rayonnement internationaux.

* Conseiller Technique AMS

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