Dentsu-Bal

 » Quelles solutions pour la jeunesse sénégalaise, » par (Aïssatou Diallo Camara)

 » Quelles solutions pour la jeunesse sénégalaise, » par   (Aïssatou Diallo Camara)

La démographie africaine est marquée par une croissance moyenne de 2,5 % par an pour une
population d’environ 1,5 milliard de personnes (Nations Unies). La population en âge de travailler
(15-64 ans) ne cesse d’augmenter en Afrique subsaharienne et pourrait atteindre les ¾ de la
population mondiale (Banque Mondiale). Le Sénégal, à l’instar des pays d’Afrique compte une population en âge de travailler de plus de
60,1% de la population (ANSD SES 20231).

Les premiers effets induits de cette situation sont relatifs à une augmentation des services sociaux de base, tels que l’accès à l’eau, l’assainissement, l’énergie, l’éducation et à la santé. Et Ces chiffres sont assez révélateurs d’un dividende démographique que nous pouvons saisir en mettant en place des initiatives fortes en faveur d’une politique de jeunesse renouvelée, ambitieuse et axée sur la croissance économique et le développement. En effet, les politiques publiques de jeunesse mises en place depuis notre accession à l’indépendance ont montré leurs limites et n’ont jusque-là pas su apporter une réponse
appropriée aux différentes préoccupations des jeunes sénégalais.

Ces préoccupations sont complexes et méritent d’être prises en charge selon une approche holistique. Il ne s’agit pas seulement de prendre des mesures ponctuelles en créant des emplois ou en finançant des
projets. Il faut intervenir en amont et en aval afin de juguler les maux qui gangrènent notre jeunesse. La mise en place d’une politique sociale solide en cohérence avec nos réalités se pose avec acuité et appelle à un sursaut patriotique si nous voulons emprunter les voies du développement.
L’engouement noté dernièrement à la suite des appels à candidatures pour la migration circulaire
en Espagne et le recrutement des enseignants nous montre à quel point les jeunes sont
déterminés à prendre en main leur destin.

Nous pouvons en tirer trois (3) constats majeurs à savoir 1) le manque d’emploi des jeunes, 2) la quête d’un avenir meilleur et 3) la foi au processus de recrutement. Cette situation nous interpelle tous en tant que sénégalais et nous édifie encore une fois de l’immensité des chantiers qui attendent le nouveau régime en termes de programmes de développement. Cette jeunesse a été le porte étendard de la récente révolution démocratique au Sénégal et elle s’est appropriée de la façon la plus vigoureuse son désir de développement. Le constat, il est général à travers l’Afrique, les jeunes africains, de plus en plus décomplexés, ont
conscience du rôle majeur qui est le leur dans le développement de leur pays. Nous avons donc une jeunesse engagée qui est bien imprégnée des défis et enjeux auxquels est confronté le
continent africain. Afin de mieux cerner le problème du manque d’emploi chez les jeunes, il serait intéressant d’en déterminer les causes véritables. Pourquoi ce grand désœuvrement observé chez les jeunes ?,
Les raisons sont multiples et sont liées entre autres à :
© Un manque de formation ou de qualification
L’absence de formation demeure un obstacle majeur à l’emploi car la plupart des jeunes en âge
de travailler, plus de la moitié ne sont pas formés en 2023 selon l’ANSD. Ceux qui sont allés à
l’école sont victimes soit de déperdition scolaire ou ne trouvent pas les moyens leur permettant
de bénéficier d’une formation professionnelle. Ce manque de formation est lié en grande partie
au niveau de précarité sociale.
© Une absence ou insuffisance d’opportunités d’emploi
Une fois sur le marché du travail, les jeunes ont du mal à s’insérer dans la vie professionnelle. Les
perspectives d’emploi restent insuffisantes au regard du nombre de jeunes qui intègrent le monde
professionnel. En fait, le manque de dynamisme du secteur de l’emploi découle de la situation
économique morose du pays. Il a été répertorié que chaque année, 200 à 300 mille jeunes
arrivent sur le marché de l’emploi alors que l’économie formelle est en mesure d’offrir pas plus
de 30 000 emplois (source PNUD). Et d’après les dernières statistiques de l’ANSD sur l’emploi, le
taux de chômage en 2023 se situe aux environs de 21,4%.
© Une inadéquation formation-emploi
Le décalage entre le milieu de la formation et le monde professionnel est encore très prononcé
au Sénégal. Les entreprises se plaignent souvent du manque de pragmatisme des jeunes à la
quête d’un emploi. La libéralisation du secteur de l’enseignement supérieur notamment
l’ouverture au secteur privé devait être une réponse à cette situation mais malheureusement les
acteurs n’ont pas réussi à allier la théorie à la pratique dans leur offre de formation. La
diversification de cette dernière pose également problème dans la mesure où elle reste
concentrée dans les filières de gestion.
Les régimes précédents ont entrepris des initiatives allant dans le sens de résorber le sous-emploi,
nous pouvons citer le plan REVA (Retour Vers l’Agriculture), l’ANPEJ (l’Agence de Promotion pour
l’Emploi des Jeunes), le FNPJ (le Fonds National de Promotion de la Jeunesse) du président
Abdoulaye Wade, le plan Xeuyou Daw Yi, le PRODAC (le Programme des Domaines Agricoles
Communautaires), la DER/FJ (Délégation à l’Entreprenariat Rapide des Femmes et des Jeunes) du
président Macky Sall. Mais, malheureusement, les gouvernements passés n’ont pas réussi à faire
face à cette problématique. Leur principale erreur fut de vouloir satisfaire une clientèle politique jeune dans leurs projets et programmes si bien que le jeune sénégalais lambda ne se voyait pas
dans ces initiatives politiciennes.

En effet, la politique était présente partout dans leurs différentes interventions au point de faire croire qu’elle constitue un moyen pour trouver du travail rapidement. En plus du caractère politique, l’absence ou la faiblesse d’un système de suivi et d’évaluation des initiatives est à souligner, ce qui constitue un handicap à la capitalisation d’expériences et à l’aide à la prise de décisions.
Ainsi, la prise en charge effective du sous-emploi des jeunes doit être une priorité pour le nouveau
régime. La pauvreté, l’insécurité, la migration irrégulière, la perte de nos valeurs sont les effets
immédiats de ce problème récurrent. Pourtant, l’écosystème de la problématique jeunesse au
Sénégal regorge de parties prenantes ou de dispositifs capables de coordonner les différentes
initiatives pour résorber le déficit de l’emploi. Il faudrait une meilleure organisation de cet
écosystème pour plus d’efficacité et d’efficience.
Des initiatives peuvent être prises afin d’apporter des solutions pérennes comme entre autres :
© L’organisation d’Assises de la jeunesse où toutes les parties prenantes seront conviées à
savoir les organisations de jeunesse, les institutions publiques concernées, les
organisations de la société civile, le secteur privé, les partenaires techniques et
financiers……Au-delà du sous-emploi, d’autres conséquences doivent être prises en
charge comme le problème de la sécurité lors des événements sportifs qui est récurrent.
L’objectif de cet exercice inclusif est de pouvoir faire un état des lieux et faire des
propositions concrètes.
© La rationalisation des agences et directions publiques qui font la promotion de la
formation, de l’emploi et de l’entreprenariat des jeunes pour non seulement des soucis
budgétaires mais pour éviter la redondance dans leurs missions et les rendre plus
performantes.
© La transformation des curricula scolaires à notre contexte local pour asseoir une vraie
ECOLE SENEGALAISE. Il nous faut changer de paradigmes et remodeler notre système
éducatif actuel. Ce dernier souffre d’énormes insuffisances comme entre autres
l’appropriation de notre histoire, la limite linguistique, la notion de civisme et de
patriotisme……………Cette revue du système devra permettre de façonner un nouveau
type de sénégalais conscient très tôt des défis et enjeux de son développement.
© La mise en place d’une Plateforme d’échange permanente entre les différentes parties
prenantes de la problématique jeunesse afin de mutualiser et de coordonner leurs
différentes interventions. La promotion de conditions propices à des opportunités d’emploi pour les jeunes via le
secteur privé en mettant en place pour ce dernier des incitatifs fiscaux ou des facilités
d’accès au crédit et au foncier.
© La promotion de l’entreprenariat chez les jeunes à partir du niveau secondaire en créant
des activités extra-scolaires notamment des activités génératrices de revenus. Ceci
permettrait de développer un réflexe d’entrepreneur chez les jeunes.
© La mise en place d’un Cadre de concertation entre le secteur privé, les universités, les
établissements d’enseignement supérieur et de formation professionnelle dont le lead
sera assuré par le Fonds de la Formation Professionnelle et Technique (3FPT). Cet outil
permettra d’enrichir les offres de formation et de les adapter au monde du travail.
© L’implication des collectivités locales en tant que partie prenante importante dans
l’écosystème jeunesse. Elle est d’autant plus importante qu’elle permet de donner corps
au principe du développement à la base. Car les élus locaux connaissent mieux les réalités
de leurs localités et des contraintes auxquelles font face leurs jeunes administrés.
© Large vulgarisation des projets et programmes mis en place pour la jeunesse notamment
via les réseaux sociaux.
© Meilleure encadrement des établissements de formation professionnelle dans la
conception de leur offre de formation en les encourageant à ouvrir davantage des filières
liées à l’agriculture, au numérique et à l’exploitation des ressources naturelles.


Aïssatou Diallo Camara, MGP
Experte en Gestion de projet
aichadc@gmail.com

2 COMMENTAIRES
  • Alioune Toure

    LA SEULE SOLUTION EST DABORD DE CROIRE EN SOI ,DE CROIRE EN LEUR PAYS ET DE NE COMPTER SUR PERSONNE,DE NE PAS RESTER FERMES ,DE TOUJOURS CHERCHER …

  • Camou Sissoko

    Les solutions existent si on prend la peine de se creuser les méninges.
    Prenons l’exemple des infrastructures routières.
    Les routes sénégalaises traversent villes et villages. Les gendarmes couchés sont installés de façon artisanale. Les routes ne sont pas balisées. Les villageois se font écraser sur les routes nationales.
    On peut continuer à énumérer les choses qui clochent.
    Des structures de recyclage de pneus peuvent être installées pour la production de gendarmes couchés qui remplaceraient les structures en béton qui détruisent nos routes et nos voitures.
    Des unités de fabrication de feux de signalisation routière seraient les bienvenus pour l’équipement de chaque village de feux rouges pour réguler la circulation et créer des passages cloutés que les populations peuvent utiliser sans se faire écraser.
    Des unités de fabrication de lampes LEDs, de lampadaires, de caladiums routiers, de panneaux routiers réfléctifs, de panneaux solaires, etc..
    Les municipalités peuvent prendre en charge la maintenance de ces structures qui vont créer des emplois par effets dominos.
    Des fonds de développement peuvent financer ces projets qui vont en retour bénéficier à toutes les contrées lointaines du Sénégal.
    Les routes seront beaucoup plus sûres permettant l’augmentation de la mobilité des biens et des Sénégalais.
    La liste est longue, il faut juste de la volonté.
    On peut faire de même pour le secteur des BTPs,
    Un autre exemple serait de demander au ministère de l’économie et des transports de déréguler certaines de leurs prérogatives comme la visite technique des voitures et des motos à des privés (garages mécaniques agréés) comme cela se fait en Europe.
    La même chose pourrait être faite pour l’étalonnage des appareils de mesure utilisés par les métrologistes du ministère de l’économie.
    Les balances, les pompes, les pesants, les appareils de mesure etc…
    Ainsi tout appareil utilisé comme unité de mesure pour la vente de l’eau l’électricité, l’essence, etc pourront être étalonnés et certifiés par ceux qui ont été fraîchement formés.
    Désolé pour ce long texte mais les opportunités de créations d’entreprises et d’emplois sont réels.

Publiez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *