« Quelle campagne référendaire pour le Président Macky Sall ? »,Par Babacar Justin Ndiaye

Un pays en campagne électorale est un pays en strip-tease » confiait, dans un sourire, le Roi Hassan II. Le référendum du 20 mars 2016 n’est ni juridiquement ni politiquement une élection ; néanmoins il en emprunte l’ambiance et le panorama. Comme en attestent de nombreuses péripéties qui, dans un contexte ne préludant pas à un vote, seraient malvenues et mal vues aux yeux de la majorité des citoyens. La liste des écarts, des excès, des incartades, des inepties, des invectives et des interdits (bravés) est longue.

Jugez-en : un Conseil constitutionnel qui encaisse – en silence et avec dignité – une pluie de coups balancés par 45 Professeurs et Docteurs en Droit des Universités du pays ; un Conseiller juridique du Président de la république engoncé dans les habits d’un Secrétaire d’Etat chargé de la Constitution puis omniprésent sur les plateaux de télévision, dans les foras, dans les studios et dans les panels où il vulgarise ses vérités juridiques; une star de la lutte, Balla Gaye II, qui démontre qu’entre un « OUI » et un « NON », il n’y a pas (chez lui) de place pour une aiguille ; des champions du « OUI » et du « NON » qui rampent comme des reptiles devant les marabouts ; un dinosaure comme le Parti Socialiste qui laisse une partie de sa carcasse sur la haie douloureusement franchie du référendum ; un citoyen du monde comme Youssou Ndour (son audience déborde des 30 millions de km2 de l’Afrique) qui dérape et entraine, en riposte, des dérapages sur un sujet aussi délicat que la bi-nationalité ou la bi-racialité au Sénégal, etc. Bref, les faits et gestes qui dénudent ou déshabillent fâcheusement le pays, sont légion. Et effarants.

Ce sont précisément ces inévitables moments de strip-tease national qui doivent convaincre le Président de la république – totalement en dehors des quinze points de la réforme soumis à la sanction populaire – de la nécessité de camper sur les cimes et, donc, de vite déserter les bas-fonds et les ravins référendaires où les coups volent bas et où les immunités statutaires ou morales s’amenuisent ou se dissipent carrément. Bien entendu, le Premier des Sénégalais, en l’occurrence le Président Macky Sall, n’est pas interdit de campagne, encore moins de mobilité sur l’ensemble du territoire. Toutefois, l’idéal est que le Général apparaisse mais ne patrouille pas sur la ligne de front et de feu. Un tel crapahutage est l’apanage des lieutenants.

Le chef de l’Etat n’étant pas un député de province, son implication dans la campagne référendaire devrait être restreinte dans la durée et ciblée sur le terrain. Dès lors qu’il (Macky Sall) a multiplié les audiences pré-référendaires et tous azimuts au Palais, le Premier ministre Mohamed Boune Abdallah Dionne, chef politique de facto de la majorité, peut et doit se coltiner le reste du boulot. Ce qu’il est entrain de faire avec les poids lourds (les ministres Aly Ngouille Ndiaye, Moustapha Diop et Oumar Youm) et les têtes pensantes de l’APR, comme le Secrétaire général du gouvernement Abdou Latif Coulibaly. Sans oublier les nombreux cadres de la galaxie du « OUI » qui ferraillent contre les tenants du « NON », à l’intérieur du pays. Avant le crépuscule de la campagne, Macky Sall pourrait logiquement dialoguer, à la télévision, avec le journaliste de son choix, comme le fit le Général De Gaulle, avec son interlocuteur préféré, Michel Droit, en avril 1969.

Comme à l’accoutumée, le meeting de clôture de Dakar (apothéose de toutes les campagnes électorales ou assimilées) constitue l’ultime rendez-vous et, aussi, l’heure de la grande communion entre tous les chefs de file du « OUI » et du « NON » et leurs masses respectives de militants. A cette occasion-là, le Président Sall fera, s’il le souhaite, une apparition et un discours décisifs, à quelques heures de l’ouverture des bureaux de vote.

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