Quand les vaincus réécrivent l’Histoire: Une nouvelle ère pour la mémoire coloniale

Quand les vaincus réécrivent l’Histoire: Une nouvelle ère pour la mémoire coloniale

Lorsque Winston Churchill a déclaré que ‘l’Histoire est écrite par les vainqueurs’, il a souligné un danger inhérent : l’histoire n’est pas toujours relatée fidèlement aux faits, surtout lorsque le vainqueur détient le monopole de ses sources.

Les générations ayant fréquenté l’école coloniale en savaient davantage sur le passé de la Métropole que sur celui de leur propre pays. Samory Touré était dépeint comme un bandit, El hadj Omar comme un fanatique. Même après l’indépendance, certains Sénégalais encensaient Faidherbe, allant jusqu’à le surnommer affectueusement ‘Ndiaye’. Il est notable qu’il n’existe pas de ‘Lycée Bismarck’ en France, tandis que la Place Waterloo se trouve à Londres, et non sur les Champs-Élysées à Paris.

La décision des autorités sénégalaises de rendre hommage aux victimes de Thiaroye sans consulter l’ancienne Métropole représente un tournant dans leurs relations. La dernière cérémonie similaire, il y a dix ans, voyait le représentant de la France donner les discours tandis que le Sénégal se contentait d’organiser le site.

Les Sénégalais ont souvent été spectateurs de leur histoire coloniale, le colonisateur fixant le calendrier, proclamant les vérités et distribuant les hommages. Des pensions des soldats africains ayant combattu pour la France ont été ‘cristallisées’ puis dégeler sans explication sur l’utilisation des retenues opérées. Seuls quelques tirailleurs sont glorifiés comme ‘morts pour la France’, alors que des milliers de leurs compatriotes reposent anonymement sur des terres étrangères.

En commémorant Thiaroye, il s’agit de proclamer que ‘le temps de nous-mêmes’ est venu, celui de réapproprier notre passé colonial. Le Sénégal évoque un ‘massacre’, signifiant un grand nombre de victimes sans défense, alors que François Hollande parlait de ‘répression sanglante’.

Cette commémoration doit inclure tous les pays d’origine des Tirailleurs, dont beaucoup parlaient le bambara comme langue officielle.

La présence d’Emmanuel Macron est suggérée mais conditionnée à une exception : participer comme invité et respectueux des autres, et non en maître de cérémonie. Peu importe sa présence, cette célébration doit marquer la fin du monopole des anciens colonisateurs sur l’histoire partagée.

Il est crucial d’établir nos propres instances d’investigation, collaborant avec des spécialistes mondiaux mais surtout avec nos propres experts, basant leurs travaux sur le vécu de nos populations et utilisant des archives que les anciens colonisateurs devront ouvrir ou restituer.

Alors, l’Histoire sera aussi écrite par les vaincus.

1 COMMENTAIRES
  • Sam

    Article de haute portée…. Merci de votre brillante contribution.. C’est vraiment ce dont on a besoin mais pas des articles de faits divers à longueur de journée..!

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