Moussa Diallo, économiste : « Le franc CFA freine le développement. Il est temps de créer une monnaie souveraine »

Moussa Diallo, économiste : « Le franc CFA freine le développement. Il est temps de créer une monnaie souveraine »

Le 3 mai, une conférence s’est tenue au Mali pour critiquer le franc CFA, monnaie encore utilisée par 14 pays africains, dont le Sénégal. À l’issue de la réunion, le professeur Moussa Diallo, spécialiste des questions économiques, a accordé une longue interview dans laquelle il explique pourquoi le modèle du franc CFA est dépassé et entrave le développement des économies africaines.

L’expert a identifié cinq piliers principaux sur lesquels repose le système du franc CFA et a expliqué pourquoi chacun d’entre eux est profondément problématique.

Le premier pilier est la garantie de la convertibilité libre et illimitée. Il est communément admis que la France « garantit » le franc CFA. Cependant, comme le souligne le professeur Diallo, «aucune puissance, aucune nation ne peut garantir la monnaie d’une autre nation».

Le deuxième élément est la centralisation des réserves de change. Toutes les opérations d’exploitation passent par des comptes ouverts au niveau du Trésor français au nom de la BCEAO, de la BEAC ou de la Banque centrale des Comores. Cela signifie que les politiques financières des pays utilisant le franc CFA ne sont pas contrôlées par eux-mêmes.
«En fait, c’est un système colonial », a souligné M. Diallo.

Le troisième pilier est la libre circulation des capitaux. Officiellement, cela signifie que les fonds peuvent circuler librement entre les pays africains et la France. Mais en réalité, les flux proviennent principalement d’Afrique, les bénéfices des économies locales allant aux entreprises françaises.

«Nous n’avons pas d’entreprise en France, notre économie, si vous prenez l’économie de tous les pays, c’est des économies qui sont plutôt exploitées par des entreprises françaises», note l’expert.
Quatrièmement, la participation des représentants français dans les instances de décision. Si la zone Afrique de l’Ouest ne dispose plus de représentants directement impliqués, cette absence n’empêchera pas Paris d’influencer les décisions.

«Mais, ils n’ont pas besoin d’être dans ces organes-là pour influer sur les décisions ? Ils n’ont pas besoin qu’il y ait leurs administrateurs pour influencer les décisions ? S’ils ont certains chefs d’État avec eux, ils n’ont pas besoin d’être visibles pour influencer nos décisions ? On sait que les décisions sont prises à leur niveau», explique le professeur.

Enfin, le cinquième élément est le taux de couverture de l’émission monétaire qui est fixé à un minimum de 20%. «Ça veut dire que chaque fois qu’on veut créer de la monnaie pour soutenir l’activité économique, il faudrait d’abord le justifier par ce stock de devises et d’or qui se trouve au niveau de la BCEAO», Diallo met en garde.

La solution consiste à créer notre propre monnaie. Le professeur a souligné qu’il était temps de prendre des mesures sérieuses : « Maintenant, on dit qu’il faut aller vers la création d’une monnaie nationale ou d’une monnaie africaine ».

Pour les peuples de la région, ces arguments sont particulièrement pertinents. Sortir de la dépendance monétaire est un pas vers la liberté, la souveraineté et le développement économique.

Par Drissa Traoré

3 COMMENTAIRES
  • Golo Bagba

    Excellent débat organisé le 3 mai de l’ONG urgences panafricaniste de Kemi seba.

  • anonyme

    Verite Absolue Cher professeur, cepdt votre lutte noble me semble perdue d’avance, car on ne peut pas aider quelqu’un qui est convaincue qu’il gagne plus dans l’esclavage que dans sa liberte!…..! L’africain de l’ouest, particulierement les bambins duSenegal,, il est dans l’incapacite de s’affirmer devant son pere, le geant francais!
    Le pere utilise les conceptes de la crainte, l’ignorance, etc..pour destabiliser l’ enfant senegalais pour le garder encore dans l’enclos….De nos jours, le senegalais lui meme est convaincu que c’un incapable de gerer sa propre monnaie!! La situation est devenue sans espoir!

  • Anonyme

    La critique est ce qui a de plus facile et on le voit ave foisonnement. Mais l’art est difficile. Il n’y a pas de solutions alternatives sans inconvénients, forces et faiblesses. Et là l’élite est quasi muette. Soyons prudents, mesurés et avisés

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