Lutte contre le terrorisme au Sahel : Entre stratégies défaillantes et illusions militaires
Face à la montée du terrorisme au Sahel, les États de la région peinent à mettre en place des stratégies militaires efficaces pour sécuriser leurs territoires. Les partenariats avec des Groupes Militaires Privés (GMP) et les opérations ponctuelles n’ont pas permis d’endiguer les violences. Pire, les groupes terroristes continuent de perpétrer des massacres, remettant en question la capacité des forces armées nationales à répondre à la menace.
Depuis cinq ans, la situation sécuritaire s’est particulièrement dégradée au Mali et dans d’autres États dirigés par des juntes militaires. Pourtant, aucun de ces pays ne figure dans le classement 2024 de Global Fire Power, qui évalue la puissance militaire des nations selon des critères comme la taille des forces armées, les équipements disponibles, les budgets de défense et les capacités logistiques. Seuls l’Égypte, l’Algérie, l’Afrique du Sud et le Nigéria représentent le continent africain dans ce palmarès, ce dernier étant le seul pays d’Afrique de l’Ouest à s’y distinguer.
Un manque de précision stratégique
La lutte contre le terrorisme dans la région semble souvent reposer davantage sur la propagande dans les médias et sur le net, et les discours idéologiques que sur des stratégies militaires structurées. Plutôt que de s’attaquer directement aux chefs des groupes terroristes et à leurs soutiens idéologiques, certains dirigeants sahéliens préfèrent désigner des boucs émissaires comme la France, la CEDEAO ou leurs voisins qui sont eux des démocraties, pour détourner l’attention de leurs populations.
Cette approche peut se révéler payante à court terme sur le plan politique, mais elle comporte des risques majeurs à moyen et long terme. La suppression des voix critiques, qui pourraient pourtant contribuer à améliorer la lutte antiterroriste, affaiblit encore davantage la riposte des États concernés.
Les opérations militaires actuelles manquent souvent de précision. Les campagnes menées contre les groupes armés produisent peu de résultats concrets, les responsables terroristes n’étant que rarement neutralisés. Pendant ce temps, les groupes extrémistes prospèrent sous des appellations vagues et continuent de menacer la stabilité régionale.
L’exemple du Proche-Orient : Des ripostes modernes et ciblées
Le conflit au Proche-Orient, notamment entre Israël et le Hezbollah, montre une approche différente de la guerre moderne. Lors d’attaques menées au Liban les 17 et 18 septembre 2024, Israël a démontré sa capacité à mener des frappes précises contre des cibles identifiées, grâce à des technologies sophistiquées et des renseignements efficaces.
Ces attaques ciblées, parfois menées à l’aide d’outils technologiques simples comme les téléphones portables, prouvent que la guerre moderne repose désormais moins sur le déploiement massif de troupes que sur des capacités technologiques avancées. Cette approche pourrait inspirer les États du Sahel dans leur lutte contre le terrorisme, à condition d’investir dans la modernisation de leurs armées.
Les juntes militaires du Sahel face à leurs limites
Malgré des dépenses militaires croissantes et des partenariats avec des puissances étrangères comme la Russie, les résultats des États sahéliens restent décevants. Le recours aux Groupes Militaires Privés, tel que Wagner, n’a pas permis d’inverser la tendance. Contrairement aux puissances africaines les mieux classées comme le Nigéria, les pays de l’AES, plus préoccupés par la propagande et la recherche de boucs-émissaires, ne parviennent pas à structurer leurs forces armées pour répondre efficacement à la menace terroriste.
L’absence de tout pays sahélien dans le classement des puissances militaires africaines pour 2024 révèle une illusion stratégique. Alors que le Nigéria continue de faire face aux défis sécuritaires liés à Boko Haram, il semble mieux préparé que les pays du Sahel pour répondre à la menace terroriste grâce à une stratégie militaire mieux pensée.
Quelle stratégie pour le Sahel ?
Pour espérer un changement dans la lutte contre le terrorisme, les États sahéliens doivent impérativement repenser leurs stratégies militaires. Une refonte complète des approches sécuritaires est nécessaire et doit inclure :
Une modernisation réelle des forces armées nationales avec des équipements adaptés aux menaces actuelles.Des partenariats logistiques et technologiques solides, notamment dans le domaine du renseignement et des technologies de pointe. Une approche indépendante des intérêts géostratégiques et économiques des puissances étrangères.
Le recours à la technologie, comme l’intelligence artificielle, pourrait également renforcer la capacité des armées à surveiller et sécuriser leurs territoires de manière plus efficace. Une stratégie hybride combinant puissance militaire, renseignement précis et actions ciblées serait bien plus efficace que les approches actuelles.
Une leçon à tirer : La fable du flatteur
Les dirigeants de l’AES doivent également prendre conscience des limites de la flatterie politique et des discours populistes. La célèbre fable de Jean de La Fontaine, « Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute », trouve un écho particulier dans le contexte actuel. En se laissant séduire par des discours démagogiques ou en désignant des boucs émissaires, les gouvernements sahéliens risquent de s’éloigner des solutions véritables.
Mamadou Cissé Journaliste
C’EST PARCE QUE LES PACTES GLOBAUX SÉCURITAIRES ONT ÉCHOUÉ AU NIVEAU DE LA CEDEAO ET DE UNION AFRICAINE (MISMA) que le Mali et ses partenaires de l’AES tentent d’y suppléer par des moyens propres endogènes avec l’aide de la Russie. Compte tenu de la porosité de nos frontières avec ces vastes enclavés, la CEDEAO doit se repencher sur cette problématique qui une cause hautement commune. Nous sommes tous également concernés. Ne croisons pas les bras et seulement nous complaire dans la critique de la situation prévalente. Soyons proactifs et solidaire