Issakha Diop : « On ne peut nullement garantir zéro inondations mais on peut apporter des solutions… »

Issakha Diop : « On ne peut nullement garantir zéro inondations mais on peut apporter des solutions… »

« La prévention et la lutte contre les inondations font appel à plusieurs acteurs« , d’après Issakha Diop. Le ministre chargé de la prévention et de gestion des inondations, lors d’un entretien avec L’Obs, ce lundi, a été interpellé, particulièrement sur la gestion des inondations.

Le maire de Pikine-Est de préciser, toutefois, qu’ils ne peuvent « nullement garantir zéro inondations mais on peut apporter des solutions« . Entretien…

M. le ministre, depuis votre nomination, vous avez effectué une série de visites sur le terrain. Est-ce à dire que vous maîtrisez la situation maintenant ?

Je vous remercie. Oui effectivement, dès ma prise de fonction, j’ai entamé une série de visites particulièrement dans les zones les plus touchées par les inondations de l’année dernière, il s’agit de la région de Dakar, de Touba et Thiès où je viens de boucler une visite des trois départements ce vendredi 31 mars.

L’objectif global de ces visites, il faut le rappeler, c’est surtout de donner corps aux instructions du Chef de l’Etat Son Excellence M. Macky SALL, qui, dès sa prise de fonction en 2012, a placé la question des inondations au cœur de ses priorités par un changement radical de paradigme qui s’est traduit par un premier plan décennal de gestion des inondations 2012-2022, qui a vu beaucoup de localités sortir des eaux.

Le Gouvernement a réaffirmé sa volonté de renforcer le mécanisme avec un deuxième programme décennal 2023-2033 qui va couvrir notamment les zones jusqu’ici non prises en compte.

Il est heureux de constater l’état d’avancement très satisfaisant des nombreux chantiers en cours et qui tendent à soulager durablement les populations en proie aux inondations.

S’agissant des zones touchées mais pour lesquelles des travaux d’envergure ne sont pas encore entamés, les services s’attellent à mettre en place un dispositif transitoire dans le cadre de la phase d’urgence notamment un dispositif pour assurer un système de pompage performant. Ceci, pour dire qu’aucune localité ne sera négligée.

Et pour répondre de façon précise à votre question, je peux dire aujourd’hui, tenant compte des moyens financiers et techniques mis en œuvre et la parfaite connaissance de la situation dont nous dispositions que nous tendons vers une maitrise de la situation.

A la suite des missions, pouvez-vous nous assurer sur toutes les solutions seront données au problème ?

Oui comme je vous le disais tantôt, il est quasi impossible de cerner les questions d’inondation, cependant nous nous sommes donnés les moyens de les prévenir dans plusieurs endroits identifiés et nous nous préparons à prendre les mesures conservatoires pour les zones où il n’y a pas encore de réseaux et où les travaux ne seront pas achevés.

Quelles sont les zones où vous pourrez garantir zéro inondation cette année ?

On ne peut nullement garantir zéro inondations mais on peut apporter des solutions. En effet, dans les zones où il existe des ouvrages structurants, les inondations ont sensiblement baissé pour ne pas dire disparu.

Quelles sont les zones qui posent le plus de problèmes ?

On se souvient encore des pluies de l’hivernage 2020 qui ont causé d’importants dégâts à Keur Massar. La mise en œuvre d’un plan d’urgence de 15 milliards FCFA, entièrement financé par l’Etat, a permis aujourd’hui de sortir une bonne partie des populations du département de Keur massar des eaux.

Cependant, le Phénomène semble s’être déplacé, notamment dans la zone péri-urbaine de Rufisque avec l’arrondissement de Sangalkam et de manière globale, Touba, Joal et certaines zones de la région de Fatick.

Autrement dit, partout où l’Etat est intervenu en mettant en place les infrastructures nécessaires, le phénomène des inondations a connu un net recul. C’est cette dynamique que nous entendons poursuivre pour juguler le problème.

Concrètement, quelles sont les actions d’envergure et travaux en cours pour prévenir les inondations ?

La prévention et la lutte contre les inondations font appel à plusieurs acteurs. Ces derniers sont répartis entre plusieurs localités avec des moyens d’intervention différents souvent dictés par la nature des problèmes. Les actions d’envergure consistent, sur plan infrastructurel, en la construction de collecteurs primaires et secondaires et l’aménagement de bassins de rétention et d’exutoires de rejet.
Au plan non infrastructurel, il s’agira de travailler à améliorer la planification urbaine de nos villes, mais également d’engager la mobilisation communautaire pour la préservation des ouvrages.

En plus de ces actions, nous pouvons noter l’acquisition, par la Direction de la Prévention et de la Gestion des Inondations d’un Modèle Numérique Terrestre (MNT) doublé de lidar, d’un radar en bande x pour la METEO, et d’un système de télégestion pour une gestion des infrastructures par temps de pluie.

A combien s’élève le montant des investissements d’urgence sur le terrain ?

Si nous prenons juste l’exemple de Keur Massar, pour vous donner une idée, nous sommes à près de 100 milliards de fcfa dont 15 issus du Budget consolidé d’investissement.

La gestion des inondations étant transversale, est-ce que la dispersion des forces ou l’éclatement des centres de décisions ne constituent pas une limite à l’atteinte des objectifs ?

Effectivement, la gestion des inondations est transversale et multisectorielle. Elle fait appel à plusieurs acteurs.

C’est pour cette raison d’ailleurs que le Gouvernement, a mis en place un Comité national de gestion des inondations (CNGI) dans le but d’une meilleure identification d’abord, ensuite d’une mise en œuvre efficiente et enfin une coordination et un suivi efficace de toutes les actions de prévention et de gestion des inondations.

Dans certaines zones comme Keur Massar, les populations sont toujours sous les eaux. Ne faudrait-il pas envisager une solution radicale ?

Effectivement cette question est à l’étude.

Le Plan ORSEC a fait son bilan essentiellement axé sur le pompage des eaux Est-ce la meilleure solution ?

Le Plan ORSEC est un dispositif déclenché en cas de situation exceptionnelle et ne fait pas partie du dispositif normal de lutte contre les inondations, constitué essentiellement par l’occupation des sols, les travaux d’assainissement et de drainage des eaux ainsi que le pompage de la nappe. D’ailleurs il est toujours souhaitable que ce dispositif soit efficace pour éviter le déclenchement du plan ORSEC.

L’assainissement pose problème dans beaucoup de villes, mais l’on se rend compte qu’on n’a pas tiré les leçons avec de nouvelles localités qui se créent, surtout dans les départements de Rufisque et de Thiès sans aucune mesure de prévention des inondations…

Votre question me permet de pointer du doigt une des causes de la survenue des inondations à savoir la cause humaine notamment avec le comblement des regards par des ordures, la mise en place d’infrastructures dans des zones inondables et l’occupation des points bas par les populations.
La cartographie des risques d’inondations en cours de réalisation avec le Modèle Numérique Terrestre évoqué tantôt, va régler une bonne partie des questions d’urbanisme. En effet, Avec ces outils, nous serons désormais en mesure d’apprécier, pour chaque zone les opportunités de lotir ou pas.

Le Président vous a instruit de trouver des solutions urgentes. Est-ce que vous avez les moyens pour faire face ?

Oui, comme je l’ai rappelé plus haut, la question des inondations est une priorité du Chef de l’État qui a effectivement instruit tous les acteurs techniques comme financiers à travailler à la juguler. C’est ainsi que l’Etat, en premier dans son budget, à travers le BCI finance beaucoup d’investissements pour la lutte contre inondations, Ces actions sont également soutenues par des partenaires techniques et financiers.
La deuxième phase du Plan décennal de prévention et de gestion des inondations qui va s’étendre sur la période 2023-2033 permettra d’apporter des solutions pérennes.

Autrement dit, Il ne s’agit pas de problème de moyens mais plutôt un problème de timing pour tout faire à temps.

A Touba, cette année la Magal va coïncider avec l’hivernage. Pouvez-vous donner des garanties que la ville ne vivra pas les problèmes des années passées?

Sans vraiment rien garantir, compte tenu du caractère imprévisible des inondations, je puis vous assurer que tout est en train d’être fait dans ce sens. Je m’y suis rendu, deux fois depuis ma prise de fonction et j’ai constaté que les travaux sont menés avec un rythme acceptable. Il faut juste noter qu’à Touba, en plus du ruissèlement, il y’a le problème de la remontée de la nappe mais nous y travaillons.

L’exécution des travaux par les entreprises connaît parfois des retards en raison des défauts de paiement. Avez-vous fait des diligences pour que ces entreprises puissent rentrer dans leurs fonds ?

Nous faisons un suivi régulier de l’exécution des travaux et du paiement des entreprises. La mise en œuvre des budgets- programmes va permettre plus de célérité dans la procédure d’exécution des dépenses.

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