Grogne sociale persistante : Les recommandations du Dr Sahite Gaye pour une communication efficace…
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Depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement de Bassirou Diomaye Faye, le Sénégal fait face à une grogne sociale persistante. Grèves, revendications syndicales et critiques sur les réformes économiques et sociales mettent en lumière les difficultés de la communication publique.
Dans une interview accordée à l’Enquête, Dr Sahite Gaye, expert en communication et enseignant-chercheur au CESTI, analyse les failles et les défis de la stratégie gouvernementale.
Depuis plusieurs semaines, le Sénégal est secoué par des mouvements de grève et des revendications croissantes. Le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a reconnu la gravité de la situation : « Les résultats de l’audit ont mis en exergue des manquements d’une gravité inouïe. Le poids de la dette du Sénégal est extrêmement important et a freiné nombre de nos ambitions et initiatives. »
Cependant, les syndicats refusent de se plier aux mesures d’austérité annoncées. Le Syndicat Autonome des Médecins, Pharmaciens et Chirurgiens-Dentistes du Sénégal (SAMES) rejette fermement toute baisse de salaire. « Au niveau du SAMES, nous allons demander une revalorisation de notre rémunération parce que c’est une rémunération qui a été assez catastrophique pendant des décennies, et cela plombe la qualité des services offerts par les structures de santé », affirme Mamadou Demba Ndour, secrétaire général du syndicat.
Le climat social est d’autant plus tendu que le gouvernement a annoncé des réformes d’austérité, notamment la réduction des salaires, la suppression des subventions sur l’électricité et le carburant, et la rationalisation des agences publiques. Ces mesures, justifiées par Ahmadou Al Aminou Lo, ministre secrétaire général du gouvernement, ont suscité des réactions mitigées.
Dr Sahite Gaye revient sur la stratégie de communication du gouvernement, marquée par plusieurs phases distinctes. « Les premiers mois, la communication était axée sur l’immensité du travail à venir, les attentes et l’appel à la mobilisation, notamment après les législatives », explique-t-il.
Cependant, il souligne que cette phase a été marquée par des « couacs » médiatiques. Chaque ministère cherchait à occuper le devant de la scène, ce qui a créé une cacophonie et une absence de cohérence. De plus, les affaires liées à l’ASER et à l’ONAS ont parasité la communication gouvernementale, éclipsant les priorités nationales.
« La communication s’est transformée en une éternelle répétition, centrée sur la dénonciation de la gouvernance de Macky Sall et sa responsabilité dans les scandales passés », poursuit Dr Gaye. Cette posture a empêché une évolution vers une phase plus constructive.
Les syndicats dénoncent un manque d’échange avec leurs ministères de tutelle. « La communication n’est pas simplement de l’information. Elle accorde une place importante à la relation. Or, les autorités de tutelle semblent avoir oublié cette dimension essentielle », affirme Sahite Gaye.
L’absence de dialogue a exacerbé les tensions, notamment dans les secteurs de l’éducation et de la santé, où les grèves se multiplient. « Le gouvernement devrait dépasser la communication alarmiste et miser sur une approche pédagogique pour expliquer ses réformes et rassurer l’opinion publique », recommande l’expert.
Dans ce contexte tendu, Dr Sahite Gaye estime que le gouvernement doit revoir sa stratégie de communication. « La communication publique ne peut reposer sur une seule personne. Elle doit être portée par une pluralité de voix pour toucher tous les segments de la société », analyse le journaliste Mamadou Ndiaye.
Pour l’expert, une meilleure concertation avec les syndicats, une pédagogie accrue et une transparence dans les échanges avec les médias pourraient contribuer à apaiser les tensions et à restaurer la confiance des citoyens. « La communication publique dépasse les petites phrases et les contenus sur les réseaux sociaux. Elle doit dessiner un horizon clair pour obtenir l’adhésion des citoyens. C’est ce qui manque actuellement », insiste-t-il.
Le peuple sénégalais n’écoute jamais le baratin des politiciens. Il veut des ACTES.