De l’idée à l’impossibilité d’un 3e mandat (Par Honoré Pascal NDEYE)

La révision de la constitution, qu’elle soit totale ou partielle prend une tournure
polémique remarquable du fait des usages contre natures. Souvent, elle est guidée
par des pensées politiciennes qui constituent de nos jours une pathologie du
constitutionnalisme.

Le Sénégal, a connu quatre (04) constitutions. Celle de 1959 dans le cadre de la
fédération du Mali, celle de 1960 après l’éclatement de ladite fédération, la
constitution de 1963 avec une vingtaine de révision et celle de 2001 qui a enregistré
également des révisions dont la plus récente est le référendum de 2016.
Ainsi, la constitution est considérée comme étant l’expression directe de la volonté
populaire par le biais du référendum qui constitue dès lors la base de toute
constitution démocratique. La démocratie, elle-même, définie comme étant le
gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple.

Suivant cette logique démocratique, le peuple sénégalais en 2001, a adopté une
nouvelle constitution avec beaucoup de réformes novatrices comme la limitation du
mandat du président à deux (02). Ces réformes constitutionnelles avec la stabilité du
pays ont prévalu au Sénégal une réputation de démocratie exemplaire en Afrique.
L’article 27 de la constitution de 2001 disposait « La durée du mandat du Président
de la République est de sept ans. Le mandat est renouvelable une seule fois.
Cette disposition ne peut être révisée que par une loi référendaire ».

Au regard des dispositions de cet article, on en déduit que l’histoire d’un éventuel 3 e
mandat est dors et déjà réglé sans aucun doute. Maintenant, ce qui s’est passé en
2012 avec le Pr. Wade, c’est l’œuvre de manipulation de certaines personnalités
politiques et la malhonnêteté intellectuelle de certains juristes. Si on s’en tient au
Titre XIII des « dispositions transitoires » en son article 104 disposait que « Le
Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu'à son terme.
Toutes les autres dispositions de la présente Constitution lui sont applicables ».
Donc Interprétation faite, avec toute la clarté de cet article, Me Wade pouvait
juridiquement prétendre à un 3 e mandat d’autant plus que cette constitution de 2001
ne prenait pas en compte le 1 e mandat, mieux encore, Me Wade était élu sous la
constitution de 1963 alors que cette dernière ne prévoyait aucune limitation.

Le 20 Mars 2016 les sénégalais ont voté oui au projet de constitution soumis au
référendum avec le raffermissement de la limitation du nombre de mandats
présidentiels à deux (02). C’est important de préciser que ce n’est pas une nouvelle
constitution qui a été élaborée mais d’une simple révision qui maintient en vigueur
celle de 2001. Il est à noter que l’article 27 modifié dispose «  La durée du mandat
du Président de la République est de cinq ans.
Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ».

Suivant l’esprit du législateur, le doute n’est plus permis, les mandats du président
sont limitatifs. Encore, les dispositions transitoires (articles 104 à 108) sont
abrogées, même si la constitution révisée parle de mandat de 05 ans, il n’en
demeure pas moins que le 1 e mandat de 07 ans soit compris parmi les deux
consécutifs c’est à dire « les deux qui se suivent sans interruption dans le
temps ».

L’on se demande maintenant comment un 3 e mandat peut exister ?
La réponse à cette question trouve toute sa signification dans les régimes politiques
africains « la révision de la constitution », en se basant sur l’article 103 d’où les
paroles d’un célèbre professeur et constitutionaliste « les textes peuvent tout faire
sauf changer un homme en femme ».
Eu égard de toutes ces considérations, il est important de se poser la question à
savoir : la constitution est elle une loi fondamentale? Ou un texte « tripatouillable » ?

Honoré Pascal NDEYE
Juriste, analyste politique
honorepascalndeye@yahoo.fr

1 COMMENTAIRE
  • baba 99

    Belle angle de vue. Bonne analyse. Et bonne quetion à l.a fin. Instructif .

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