Conseil des ministres décentralisé en banlieue : Du « tapalé » (tape-à-l’œil) ! (Par Daouda Gueye)

Ainsi notre président tient effectivement le Conseil des ministres de cette semaine en banlieue dakaroise ! En vérité, nous avons eu vent de ce projet bien avant la tenue du référendum. Mais nous n’y avons pas cru, d’autant plus que l’information ne nous est pas parvenue par voie officielle, mais via quelques-uns de ses partisans au niveau local. Nous avons estimé en son temps qu’il s’agissait que d’une simple rumeur. Qui plus est, comment pouvions-nous accorder du crédit à cette information, sachant que non seulement la source n’était pas fiable, mais aussi nous ne voyions pas la pertinence de déplacer tout un gouvernement pour la tenue d’un Conseil des ministres consacré à une localité distante du Palais présidentiel de seulement 12 kilomètres ?
Mais voilà, le président et son gouvernement viennent effectivement tenir ce Conseil des ministres en banlieue. On ne saura peut-être jamais combien cela va coûter inutilement au contribuable sénégalais, entre les frais de séjour et de mobilisation des militants pour l’accueil, payés d’une part par l’État central (ou peut-être le parti présidentiel), d’autre part par les maires APR de la banlieue. Mais une chose est certaine, cette manifestation n’a nullement pour finalité la prise en charge des problèmes de cette partie du pays. En fait, il s’agit, comme pour les autres fois où cela s’est tenu dans les régions, d’une cynique opération de communication, d’une campagne électorale, payée avec l’argent public, pour servir les intérêts électoralistes d’une organisation privée, l’APR.

En vérité, Monsieur le président, avez-vous réellement besoin de dépenser autant d’argent inutilement pour vous imprégner des problèmes de Pikine, Guédiawaye, Rufisque, localités ne se trouvant pas à plus de 15 kilomètres du lieu où vous tenez chaque mercredi votre conseil des ministres ?
Et voilà ce qui fâche dans votre façon de faire, Monsieur le président. C’est cette façon, érigée en modus operandi, par votre régime et en tout, et qui consiste à enrober votre agenda électoraliste d’un emballage républicain tape-à-l’œil.. Mais nous avons compris, car à Pikine, Guédiawaye, Rufisque, « du ñu ay ngaaka ». Nous pouvons même dire le scénario de film qui a déjà commencé. Oui, le film a déjà commencé avec qui se sont réveillés ce mardi 12 juillet devant un spectacle qui mériterait l’épithète incroyable s’il n’y avait pas ces éléments de contexte relatifs à la tenue de ce « Conseil des ministres décentralisé ». Il s’agit du spectacle des travaux d’embellissement de leur cadre de vie, avec çà et là des trottoirs qui sont retapés, l’hôtel de ville qui déchire ses haillons pour revêtir ses plus beaux atours pour se mettre sur son… 20 juillet, l’effervescence chez les militants de votre parti qui battent le rappel des troupes pour de grandes mobilisations aux dépens du pauvre contribuable. Fermons le ban !
Ce sont nos maires qui ne nous respectent pas .Depuis belle lurette, nous crions notre frustration générée par l’occupation anarchique de la voie publique, l’état d’insalubrité lié à un défaut d’assainissement, tutti quanti, mais ils sont restés aussi flegmatiques que le sphinx, peu sensibles au pouls de la rue. Et voilà qu’en un temps record, moins d’une semaine, les trottoirs sont pavés, les lampadaires brillent de tous leur feux, la voie publique est dégagée, l’hôtel de ville fait sa mue, bref, ce que nos élus locaux n’ont pas fait depuis 2014 pour ceux qui les ont élus et dont les impôts alimentent leur budget et paient leur salaire et autres commodités, ils l’ont fait en 05 jours pour votre confort et celui de votre gouvernement. Voyez, c’est le même rapport fortement « colonialisé » que notre État central a vis de l’ancienne puissance coloniale que nos exécutifs locaux ont à l’égard de l’exécutif central. On embellit Dakar que Hollande vient. Il faut changer cela. Mais, ce comportement de nos élus locaux, nous allons le régler bisso na bisso.

Pour la suite, Monsieur le Président, vous allez venir avec votre gouvernement, vos militants vont sortir vous accueillir en compagnie de ceux qui se seront déplacés moyennant finances. Vous tiendrez vos discussions, rendrez des visites de recrutement ou de fidélisation à quelques courtiers politiques locaux. Et à la fin, il y aura le communiqué du Conseil des ministres décentralisé dans lequel, entre autres mesures, il y aura quatre cents, cinq cents, peut-être même plus de milliards de promesses pour financer des « projets structurants » pour porter la banlieue à l’émergence dont se gargarise votre gouvernement. Après cela, il n’y aura rien. Et ce n’est pas une affirmation gratuite.
Combien de milliards ont déjà été promis partout où vous avez été mener votre campagne électorale déguisée en Conseils des ministres ?
Plus de 3.000 milliards de promesses aux 11 régions du Sénégal où vous avez tenu votre conseil, presque le budget national, sans suite. Les échéances sont dépassées.
Le 20 juin 2012, vous avez annoncé à Saint-Louis un programme triennal 2012-2014 de 300 milliards de FCFA pour des projets structurants dans les domaines de la pêche, de l’agriculture, du tourisme, etc. Nous sommes en 2016. Nous ne voyons pas la matérialisation de cette promesse.

Après Saint-Louis, vous êtes allé à Kaolack où la promesse de 255 milliards d’investissement n’est toujours pas suivie d’effets.
À Ziguinchor, vous vous êtes engagé à dégager la somme de 360 milliards pour le financement de 54 projets pour l’émergence de la région. Vous avez même demandé que cette enveloppe soit inscrite dans le Programme triennal d’investissement prioritaire (PTIP) 2012-2014, comme pour Saint-Louis. Nous sommes bien en 2016. Nous ne voyons rien.
Diourbel, non, plus n’a rien vu concernant les 209 milliards pour financer son développement, les 112 milliards devant être financés sur ressources internes. Rien de visible dans les domaines de l’assainissement, de la santé, de l’éducation qui avaient été ciblés.

La mise en œuvre de ces projets majeurs, dans ces quatre régions, dans le cadre du PTIP et du Budget consolidé d’investissement (BIC) 2013, devait, suivant votre engagement, Monsieur le président, démarrer en 2013, pour être réalisés entièrement « dans les années à venir ».
250 milliards ont été annoncés à Louga pour un plan spécial de réhabilitation de la ville. L’échéance, c’est 2017. Nous sommes, Monsieur le président, à 05 mois de 2017.
Où sont, Monsieur le président, les 127 milliards annoncés à Matam, et les 200,5 milliards promis à Kolda pour en faire un pôle de croissance ouvert sur la sous-région en désenclavant la région et en la sortant de la pauvreté, dans le cadre du PTIP 2013-2015, alors que nous sommes aujourd’hui dans la seconde moitié de l’année 2016 ?
201 milliards annoncés à Tambacounda, 109 milliards à Kédougou, 448 milliards à Thiès.

Alors, venez sous l’emballage d’un « conseil des ministres décentralisé », à 12 kilomètres de l’endroit où se tient le conseil des ministres hebdomadaire qui ne coûte presque rien au contribuable, qui n’entraîne aucun chamboulement dans le quotidien des braves gens de la banlieue, faire votre campagne électorale aux frais du contribuable sénégalais et au grand dam des braves populations de la banlieue qui devront changer leur quotidien pour satisfaire le protocole le temps de votre activité. Ne vous laissez surtout pas abuser par le sourire et la joie de vivre qui brillent sur le visage des femmes, des jeunes et des personnes âgées de cette banlieue ! Derrière il y a, en effet, les mille et un soucis qui maculent leur quotidien, et pour l’effacement desquels ils vous ont élu. Ils sont fiers et dignes les banlieusardes et les banlieusards. Souriant, malgré tout. Les Pikinois ont souffert de ces désagréments le 24 février 2012. Alors, candidat à la présidentielle, vous êtes venu clôturer votre campagne électorale au stade Alassane Djigo de Pikine. Les Pikinois ont encore pâti de ces désagréments le 18 mars 2016, et un enfant y a perdu la vie, quand vous êtes venu clôturer votre campagne électorale pour le référendum du 20 mars. C’est à croire que si l’on vous demandait de situer Pikine, vous ne pourriez le faire que sur la carte électorale !

Maintenant, en ce qui concerne les annonces et autres promesses que vous allez faire, nos compatriotes de Saint-Louis, Kaolack, Ziguinchor, Thiès, Matam, Kolda, etc., nous disent déjà, et ils ont raison : « N’y accordez pas foi ! ». De toute façon, vous avez conditionné les Sénégalais, avec une facilité dont Pavlov serait jaloux, à ne plus croire à vos annonces. Et cela a tué l’espoir chez toutes les couches de notre peuple. La confiance, Monsieur le président, c’est comme un timbre. Ça ne colle qu’une seule fois.

Signé Daouda GUEYE de Pikine
Professeur de Philosophie
Grand Parti Suxalli Sénégal
davehegel@yahoo.fr

3 COMMENTAIRES
  • Thione

    Un développement très riche en idée, seulement en matière politique faire des promesses est un courage par rapport à ceux qui n’en font jamais, Maky est chez lui dans les banlieues ou Madame Faye Sall est déjà passer pour faire des dons de passe droit afin de faciliter la tache à son mari président, peut être qu’elle sera sur place elle aussi pour faire des promesses qui seront tenues au moins par elle.

  • NG

    c’est un plaisir de vous lire Monsieur Guèye et je suis parfaitement en phase avec votre position. Il faudrait que nos dirigeants soient plus sérieux et moins bavards. En tout cas j’aime bien l’analyse d’autant plus que le style est clair et pas arrogant. Certains contributeurs aux idées versatiles devront en prendre exemple.

  • Baye fall galsene

    Les gens ont paye le tiquet du train, ils ont embarque il nous on fait toute les verifications est rien a signaler. Le train est dejas plein depuis les annees 1960. Mais on dirait que lon na pas de conducteur.beaucoup des cliens ont laisser le train avec un cercueils et le reste na plus d’espoire du depart du train avant de mourir. Sil vous plais chaires eleves conducteur on attend depuis tres longtemp si vous pouvez faire deplacer ce train. Ne le nous promettent pas fait si vs aussi vs ne pouvez pas faire faire votre metier ce nest pas la peine de forcer les gens de rester toujour a bord. Ils peuvent se debrouiller. Laisser les partir.

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