Ces morts sont évitables (Par Mary Teuw Niane)*

Nous vivons, nous nous soumettons inconsciemment à un fatalisme qui disqualifie notre intelligence, encourage le laxisme, la corruption, le népotisme. Ce fatalisme négatif cautionne l’irresponsabilité individuelle, l’inconscience collective et la fuite des responsabilités des autorités, de presque toutes les autorités administratives, sociales, religieuses, politiques et traditionnelles.

Les morts s’accumulent sur les routes à travers des accidents inimaginables, des voitures dont certaines à vue d’œil ne respectent aucune règles techniques, des chauffeurs surexploités et aussi des chauffeurs trop jeunes et même sans permis de conduire. Dans les banlieues des maisons poussent dont certaines ne respectent aucune règle de construction, aucune administration n’intervient pour arrêter la pose de ces étages brimbalants qui demain, sans surprise, s’effondreront sur des familles.

Nous continuons à ne pas porter des masques, à aller dans des rassemblements, des khew, des baptêmes, des mariages, des funérailles, des levées des corps, etc., et tranquillement, sincèrement, nous pleurons nos malheureux morts qui nous quittent un à un, en grande partie, par nos propres errements. Et nous continueront à répéter pour nous dessaisir malicieusement de nos responsabilités complètement engagées : Atté Yallah ! Le Verdict Divin !

Nous sommes dans un pays où la mort n’émeut plus, elle a intégré la routine quotidienne. La mort s’est banalisée. La mort de nourrissons dans un centre de santé, la mort d’enfants dans une crèche ou un daara, la mort par overdose d’enfant de la haute société, les noyades massives de jeunes dans l’Atlantique, auraient partout suscité, au-delà de la compassion, une révolte intérieure, une introspection générale et des mesures radicales pour éradiquer ces fléaux et redonner à la vie tout son sens.

Toute la société est tétanisée, paralysée. La chaine de confiance s’est brisée. Le citoyen n’a plus confiance en sa Police, la police n’a plus confiance en la Justice, la justice n’a plus confiance en l’Administration. Ceux qui ont la responsabilité de réguler la vie civile et publique ne régulent plus. Ils sont résignés car ils disent urbi et orbi, à qui veut l’entendre, à leur échelle, prendre des décisions radicales ne sert à rien du moment que le coupable ou les coupables vont, à travers aujourd’hui un système bien huilé, finir par être libre et les narguer sur la voie publique, les quartiers et les villages. À quoi bon être impopulaire dans ces conditions !

Comment expliquer qu’un jeune enfant, sans permis de conduire, puisse, après avoir commis un accident, continuer à conduire impunément des camions qui n’ont aucune assurance. Notre conception de la mort est tragique. Car contrairement aux européens, aux asiatiques, aux américains, cette conception nous ramollit face aux voies et moyens d’éliminer cette mort évitable qui relève exclusivement de notre responsabilité, de nous battre résolument pour allonger très rapidement l’espérance de vie de notre population et l’espérance de vie individuelle de chacune et de chacun et enfin, d’assumer notre rôle d’humain que nous confère les religions révélées comme d’ailleurs nos religions endogènes.

La promotion de la culture scientifique et technique, l’exhibition à travers les médias d’exemples de pays qui ont éradiqué ou fortement atténué certaines causes de mortalité importantes chez nous, pourraient aider à une prise de conscience des populations et des élites. Nos élites, particulièrement nos élites intellectuelles ont démissionné, peut-être ont-elles fui l’espace public par peur de prendre des positions que ne manqueront pas de fustiger ces hordes d’ignorants qui se sont emparés des réseaux sociaux et imposent le silence par la terreur de leurs invectives. Se pose alors la question : avons-nous de vrais intellectuels ? L’intellectuel doit assumer ses positions argumentées.

Les morts évitables doivent réunir toute la société pour les éradiquer ou les atténuer.

Unis et engagés, nous vaincrons,

Dakar, le 2 septembre 2021

* Mary Teuw Niane.

9 COMMENTAIRES
  • Diop

    La racine de tout le mal c’est que nous sommes dans pays qui manque terriblement de leaders. Dans tous les domaines les responsables sensés tenir le langage de la vérité font constamment du wax waxeet. Leur discours ne portent plus et sont incapables de mobiliser ou de sensibiliser sur quoi que ce soit. Absence de leadership, voilà notre gros problème. Il y en a qui en arrivent à souhaiter un « despotisme éclairé » dans notre pays pour nous en sortir. Triste.

  • lesalafiste

    Et Dieu dans tout cela ?? Son décret pour la fin d’une vie ! L homme peut il changer un décret divin ???? damaay laaj donng !

    • Djibson

      Le décret divin n’existe pas. Point. Voilà un tontou.
      Texte bi pointe justement notre fatalisme. Il faut prendre le parti de la VIE, au lieu de cela, nous préférons une vie future hypothétique, improbable même,
      tout à fait problématique. Yaakar trop ci euleuk ba negliger tey

  • Djibson

    Texte criant de vérité.

  • ABCD

    Quand la société se putréfie, quand la machine sociale détracte, le rôle du Penseur, de l’Ecrivain, est d’observer chaque plaie nouvelle, et d’interpréter.
    L’article épouse vraiment cette pensée.
    Quand le Temporel et le Spirituel sont en connivence, le Petit peuple qui étouffe sous le poids de l’oppression et de la mystification, n’est pas apte à l’introspection.

  • Mamadou

    Quand la société se putréfie, quand la machine sociale détracte, le rôle du Penseur, de l’Ecrivain, est d’observer chaque plaie nouvelle, et d’interpréter.
    L’article épouse vraiment cette pensée.
    Quand le Temporel et le Spirituel sont en connivence, le Petit peuple qui étouffe sous le poids de l’oppression et de la mystification, n’est pas apte à l’introspection.

  • Cheikh Seck

    L’EFFET CONJUGUÉ DE L’EFFONDREMENT DES INSTITUTIONS , UNE DICTATURE CONFRÉRIQUE J’ALLAIS DIRE SECTAIRE ET UNE ABSENCE PÉREMPTOIRE DE L’AUTORITÉ PARENTALE AUTANT DE RAISONS QUI S’INSTALLENT DÉSORMAIS IRRÉVERSIBLEMENT DANS NOTRE PAYS

  • Gorel Diallo

    Le drame du Sénegal particuliérement c’est l’incivisme, des ignorants se sont emparés des résraux siciaux et imposent leurz dictats. Les intellectuels ont déserté l’aréne politique de peur des invéctives, les guides réligieux avides de conforts et gains faciles encouragent l’inféodation aux confréries pour attirer le maximum d’adhérents qu’on appellera fiérement disciples avec des retombés économiques qui permettront davantage de d’exercer une influence sur le pouvoir temporel à la recherche pérpetuelle d’une masse électorale qui soit les permettra de se maintenir ou de parvenir au pérchoire. Pour des raisons purement mércantiles, le spirituel adopte des positions selon sa convenance au mépris total de régles de bonnes conduites indispensables à une société civilisée. Le mauvais chaffeur, le dealer, le vendeur de faux médicaments, le marchand dit ambulant qui occupe illégalement la voie publique etc etc… tous sont excusables voir intouchables s’ils rèpondent au nom de la « tarikha ».

  • deug

    Vrai mais ils ne parlent que politique pendant que certains voisins sont entrain de cartonner économiquement et innover.

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