Benoo Bokk yaakar: Une belle leçon de maturité politique », Par Abdou Fall*

Personne en 2012, au regard des antécédents dans les expériences de gouvernance partagée du pouvoir au Sénégal, ne pariait sur la longévité de la coalition qui dirige le pays depuis cinq ans.   Pour avoir relevé un tel défi  dans un  contexte où l’APR,  parti dominant de la coalition    ne s’était pas donné  une majorité parlementaire propre, garante de sa stabilité et de sa sécurité, le Président Macky et ses alliés ont administré à la classe politique sénégalaise et africaine une belle leçon de maturité politique et de  sens élevé des responsabilités.

  Ce résultat est d’autant plus important  qu’il intervient  en ces moments ‎troubles où presque dans tous les pays, y compris dans les démocraties dites avancées, les compétitions électorales donnent lieu à des spectacles qui n’honorent ni les partis, ni les hommes politiques, ni la démocratie. Un simple regard sur la campagne électorale  encore en cours en France, après les   tempêtes de l’élection américaine et du référendum britannique,  suffit pour rendre compte de l’état de détresse dans lequel les crises du politique et les errements de l’économie sont en train de plonger les nations, dans le camp occidental en particulier  où le modèle de démocratie représentative était considéré jusque là  comme la référence absolue. 

Pour être arrivé  à construire un consensus durable  dans un environnement politique si agité, Benoo Bokk Yakaar mérite bien  attention et intérêt comme exemple réussi de partenariat politique dans l exercice concerté du pouvoir.  Ce qui atteste encore une fois de la maturité de notre pays en tant que référence démocratique.

C’est pourquoi il est important  de partager quelques réflexions sur les   principaux facteurs ayant  rendu possible ce bel acquis d’un consensus qui a su autant résister à l’épreuve du temps qu’aux  menées déstabilisatrices de  certaines composantes  du groupe victorieux initial de 2012,  et de certains leaders influents  au sein des principales formations politiques de la majorité.

En ces moments de fièvre politique caractéristique des opérations  d’investitures, il est indispensable que une évaluation sérieuse et rigoureuse prépare cet exercice démocratique majeur au sein des partis et de la coalition de manière à ce que les logiques de carrière ne remettent en question  la belle  perspective d’émergence inscrite dans les   dynamiques de réformes économiques, sociales, institutionnelles et politiques riches de toutes les promesses.

On ne le répétera jamais assez,  la coalition Benoo Bokk Yakaar  est le « bloc parti » gagnant par ce qu’il s est donné les moyens du succès  .Il ne faut jamais perdre de vue que le combat  politique  s inspire toujours  de  la stratégie militaire. L ‘organisation et la discipline sont la clé du succès sur les champs d’opérations qu’ils soient militaires ou politiques.

Le camp majoritaire restera gagnant  tant qu’il continuera de se reconnaître dans un leadership incontesté,   autour d’une plate-forme programmatique minimale que le gouvernement s applique à mettre en œuvre de façon déterminée  et qu’il restera  politiquement  adossé  au  « bloc parti  » hégémonique  ‎qu’ il constitue depuis 2012.

L instrument politique des  conquêtes électorales successives  n’est ni l’APR, ni l’AFP,  le Ps, la LD, le PIT ou toute autre composante de Benoo. C’est le » bloc parti  » Benoo qui est la force et l’outil politique  de consolidation de la majorité. ‎Il convient toutefois de préciser  que  l’APR, parti du Président, est bel et bien  la locomotive et la  principale force physique de la majorité. Il a marqué son entrée dans l’histoire politique du Sénégal  en réussissant, avec ses alliés en 2012, le tour de force de mettre un terme à l hégémonie du PS et du PDS qui ont dominé  la vie politique sénégalaise  sur une trentaine d années. Il serait donc tout à fait  indiqué, du point de vue strictement démocratique, qu’il lui soit accordé une posture de confort et de sécurité dans la prochaine législature. 

Il  reste cependant évident à nos yeux  que  l’enjeu des investitures se joue moins au sein des partis pris isolement qu’au niveau de la capacité de l’équipe dirigeante de Benoo de  trouver les  formules les plus adaptées  permettant de croiser représentativité,  légitimité , compétence et expérience afin de bâtir à partir de ces paramètres les consensus les plus larges sur les listes de candidats  . A cet égard, le patriotisme de parti devra bien primer sur les logiques de carrière individuelle. Et  la sauvegarde de l’unité, la cohésion et la discipline au sein du  bloc majoritaire pour assurer la poursuite des réformes dans la stabilité doit largement prévaloir  sur les intérêts partisans, étant entendu qu’aucun parti   ou bloc de partis ne peut se soustraire aux contraintes  des  recompositions et reclassements en cours dans l espace politique de nos jours.  

Et c est précisément l’avantage comparatif de Benoo dans sa capacité de rester un bloc soudé autour d un socle solide de partis dominants qu’il convient de préserver à tout prix en améliorant cependant les mécanismes de concertation et les procédures de décisions en son sein. 

Notre pays est mur pour des consensus et des partenariats politiques de nouvelle génération.

 Au-delà des équilibres à sauvegarder à travers  des investitures qu’il faut effectuer sous le sceau de la responsabilité, il y a bien lieu que Benoo travaille sur un « contrat  de législature »  de nature à contribuer significativement à la réconciliation entre l’élu et le citoyen.

 Les partis et mouvements politiques de l’avenir sont précisément ceux qui travaillent sans cesse  à fournir une offre politique toujours plus attractive  par la prise en charge en particulier  des fortes attentes Citoyennes sur les questions de gouvernance, d’éthique de gestion et  les missions et rôles des mandants qu’ils se désignent. 

On ne peut plus faire l’économie d’un débat de fond sur la  démocratie représentative telle  qu’ elle  s’est imposée comme modèle de référence  au sortir de la deuxième guerre mondiale en accompagnement au développement fulgurant de l’économie de marché ayant abouti aujourd’hui à une  mondialisation de tous les déséquilibres.

Ce modèle est manifestement arrivé à bout de souffle en ce qu’ il n’est plus, aux yeux du citoyen, porteur de ses aspirations pour une société prospère et de  justice sociale dont les partis et les hommes politiques sont censés être les porte- étendards . Considérant que ni la démocratie telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, ni l’économie telle qu’elle marche de nos jours  ne sont au service premier  du citoyen  et de la communauté ‎, donc du plus grand nombre, la tendance est à la défiance vis à vis des partis, des hommes politiques et des élites économiques et sociales de manière générale. 

Nous avons une démocratie à réinventer et un nouveau modèle de croissance partagée à construire. Le Sénégal est incontestablement  sur cette trajectoire.

Nos pays, n’ayant pas  encore achevé de bâtir leurs fondamentaux, l’exercice d’une démocrate participative, coopérative et inclusive qui nous éloigne des logiques de tensions et de conflits correspond parfaitement à l’esprit des réformes en cours de notre système démocratique.

C’est pourquoi  il est du devoir impérieux de la classe dirigeante au pouvoir de travailler ‎à nourrir et entretenir le profond désir d’unité qui a rendu possible cette belle expérience d’entente politique salutaire pour la stabilité du Sénégal  et de ses institutions. Il convient de souligner, sous ce rapport, que dans un contexte historique où des groupes non-étatiques disposent de moyens de violence comparables parfois à ceux des Etats,   notre pays est sans conteste   parmi les pôles majeurs de stabilité sur notre continent, en particulier dans notre environnement sous régional traversé par des convulsions qui appellent à des urgences de coopération et de solidarité. Ce sont là  quelques uns des défis majeurs qui interpellent le Président Macky Sall, son gouvernement et sa majorité. Au-delà ‎, la classe politique dans son ensemble.

C’est à travers cette grille de lecture qu’il convient d’appréhender les actuels  enjeux politiques et électoraux pour mesurer toute la portée de l’appel  du Président de la République, leader de la coalition Benoo Bokk Yakaar pour des investitures de responsabilité et pour une démocratie apaisée.

*Ancien Ministre d État

Membre du Sen de l’Apr

Président du mouvement

Alternatives Citoyennes 

Andu Nawlé

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