Une Gambienne forcée à l’exil pour avoir publié une vidéo de violence policière
Minah Manneh, activiste des droits de la femme en Gambie, a publié sur Facebook une vidéo montrant un policier frappant avec un bâton une écolière. À cause de cela, elle a subi des pressions qui l’ont forcée à l’exil.
Minah Manneh, militante des droits de la femme de 23 ans, a posté sur Internet une vidéo où un policier gambien donne des coups de bâtons à une écolière. Un geste qui l’a contrainte de quitter le pays. Car en Gambie, il est interdit de mettre en ligne des vidéos « portant atteinte à l’image de l’État ».
Mercredi 18 mars, la jeune activiste Minah Manneh surprend un policier gambien en train de réprimander des écoliers qui se bagarraient sur la voie publique à Banjul, la capitale gambienne. Avec son téléphone portable, elle filme le policier qui donne des coups de bâtons à une écolière pour la punir.
Rien ne justifie selon Minah le comportement du policier. La jeune femme va même jusqu’à interpeller celui qu’elle vient de filmer, en enregistrant cette fois la conversation avec le micro de son téléphone.
Voyant qu’il n’a aucun remord, l’activiste décide de poster sa vidéo sur Facebook et de l’envoyer directement aux autorités gambiennes en utilisant un logiciel de messagerie instantanée.
64 000 euros d’amende ou 15 ans de prison pour la diffusion de cette vidéo
En postant la vidéo sur Internet, la jeune activiste devient hors la loi. Car depuis le 5 juillet 2013, la Gambie a ratifié une « loi sur l’Internet « , décriée par les organisations de défense des libertés, qui stipule :
Samedi 21 mars, plus de quarante-huit heures après sa disparition, Minah Manneh poste enfin un message sur son compte Facebook, visible seulement de ses amis, où elle explique qu’elle est en sécurité. Elle a bien été détenue pendant deux jours. Suite à sa libération, elle a décidé de quitter le pays pour éviter d’être emprisonnée ou d’avoir à payer une amende exorbitante. À l’heure actuelle, elle ne se trouve plus sur le continent africain.
Interrogé sur le cas de Minah Manneh par France 24, le ministre de l’Information et de la Communication de Gambie, Sherriff Bojang, répond :
Minah Manneh n’avait jamais été directement inquiétée par les autorités gambiennes, mais elle est connue pour son combat en faveur des droits des femmes avec l’association « Think Young Women ». Elle est notamment en première ligne dans la lutte contre les mutilations génitales des jeunes filles, un sujet très sensible en Gambie.
« Je suis sûr que d’autres personnes vont suivre son exemple pour dénoncer des situations injustes »
Modou Lamin (pseudonyme) a fréquenté Minah Manneh au sein d’associations.
Elle voulait dénoncer l’attitude d’un policier pour que celui-ci soit puni, et au final, c’est elle qui doit s’exiler pour sa sécurité. Cet épisode montre que tout Gambien qui chercherait à avoir une attitude citoyenne s’expose à des sanctions.
Lorsque je vois le flot de commentaires sur Internet en faveur de Minah, je me dis qu’elle a apporté une contribution majeure dans la lutte pour la liberté et les droits de l’Homme en Gambie. Je suis sûr que d’autres vont suivre cet exemple pour dénoncer des situations inacceptables.
Cet article a été rédigé par Alexandre Capron (@alexcapron), journaliste à FRANCE 24.
Chei Gambia. May the Almighty Allah save us.