Sous l’essaim des Njeereer : Chronique d’un pillage national*

Alors que le régime de Macky Sall appartient désormais au passé, ses effets continuent de hanter la République. Corruption, injustice, prédation systématique : le Sénégal se relève difficilement d’un pillage organisé. Face à cette guerre larvée, il est temps de nommer les responsables, de mobiliser les consciences et d’agir.

À observer l’ampleur des dégâts laissés par le régime de Macky Sall, on se demande sérieusement dans quel pays nous avons vécu durant ces douze dernières années. Le Sénégal a été littéralement assailli, tel un champ mûr dévasté par un essaim de Njeereer — ces criquets pèlerins sans foi ni loi — qui n’ont laissé derrière eux que ruines, chaos et désillusion.

Les scandales ont été aussi nombreux que gravissimes :

– Le dossier Petro-Tim, révélant l’implication du frère du président dans la gestion opaque de nos ressources pétrolières.

– Le scandale des 1 000 milliards du COVID-19, dont à peine 20 % auraient servi à la santé publique, le reste s’étant évaporé dans un partage incestueux entre amis du régime.

– Les affaires de corruption et de détournements massifs, notamment dans la gestion des terres, des contrats miniers et des projets de BTP.

– L’instrumentalisation de la justice, transformée en arme pour museler l’opposition, avec des vagues d’arrestations ciblées : opposants, activistes, journalistes — tous victimes d’une même logique de terreur politique.

– Une dette publique abyssale, résultat d’une gestion dispendieuse et opaque, ayant conduit le pays à un niveau d’endettement insoutenable, sans réelle amélioration des conditions de vie des populations.

– Le scandale de la dette cachée, révélant des engagements financiers dissimulés au peuple et au Parlement, engageant l’avenir de générations entières sans aucune transparence ni justification économique valable.

Pendant ce temps, Macky Sall nous narguait, publiquement et cyniquement. Il déclarait avec une aisance déconcertante qu’il était « au courant de tous les dossiers de malversations financières » — et qu’il avait « mis son coude ». Comment un président peut-il revendiquer une telle irresponsabilité ? Comment peut-il regarder tout un peuple dans les yeux et lui infliger un tel affront ?

Le peuple sénégalais ne méritait pas cela. Nous nous sommes battus pour cet homme. Nous l’avons porté au pouvoir avec espoir et confiance, croyant bâtir une démocratie forte et équitable. En retour, nous avons récolté mépris, brutalité et pillage.

Aujourd’hui encore, alors qu’il n’est plus aux commandes, Macky Sall continue de nous humilier, en s’affichant à travers des nominations internationales grotesques, comme pour amuser la galerie et rappeler qu’il peut encore défier l’éthique, la justice et même le bon sens.

Depuis son refuge somptueux au Maroc, Macky Sall manœuvre pour affaiblir le président Diomaye Faye, comme ce dernier l’a révélé lors de son interview du 4 avril. En visant le chef de l’État, c’est toute la souveraineté populaire qu’il attaque, cherchant à semer le trouble pour maintenir son emprise. Cette attitude, marquée par un profond mépris pour la démocratie, révèle une hostilité ouverte à la République. Nous ne faisons plus face à un ancien président en retrait, mais à un acteur actif du désordre — un véritable danger pour la nation. Une guerre larvée est bel et bien en cours.

Il est temps que la nation sénégalaise tout entière se redresse, debout et digne, pour faire front contre cet essaim de ravageurs infiltré jusque dans les rouages de nos institutions, de nos entreprises, de nos administrations et de notre vie quotidienne.

L’opposition, de son côté, doit assumer une posture véritablement républicaine, se réveiller enfin, et rompre avec cette politique de sabotage, d’obstruction systématique et d’irresponsabilité politique mise en œuvre par certains.

La société civile doit, elle aussi, assumer son rôle de sentinelle républicaine : alerter, mobiliser, et refuser toute compromission face aux dérives passées comme aux menaces actuelles.

Quant au gouvernement actuel, il doit faire preuve de fermeté et d’intransigeance, et se montrer résolument déterminé à mettre hors d’état de nuire ces ravageurs encore tapis dans l’ombre, en activant pleinement les mécanismes de lutte contre l’enrichissement illicite.
Il ne doit pas céder à cette fausse sagesse qui prétend : « il faut travailler et arrêter de parler ».

Non.
Il faut travailler et parler.
Il faut agir et expliquer.
Il faut réformer et assumer.

Le peuple doit être informé, accompagné et respecté. Car il en va de la survie de notre République, de l’honneur de notre peuple, et de l’avenir de nos enfants.

Abdoulaye DIENG*

Entrepreneur