Une partie significative des intervenants dans la sphère éducative favorise souvent les matières
scientifiques au détriment des autres.
Cette perception autant grave qu’elle soit gravée dans les mémoires. On attend certains décideurs prôner le favoritisme au sein des matières et des disciplines ! D’aucuns croient que ceux qui sont orientés vers les séries (S) ont plus de chance de réussite que leurs camarades qui n’y sont pas.
A notre sens, cette perception uniforme ne reflète guère la réalité du contexte, ni les besoins réels du marché. Pire, elle insulte maladroitement certaine théorie d’apprentissage qui mesure l’intelligence et ses stades de développement. Notre analyse est une invitation à la réflexion sur une offre éducative de qualité qui repose sur
l’égalité des chances.
Notre postulat de départ incite fondamentalement à la primauté de multiplicité de l’intelligence dans les politiques éducatives d’aujourd’hui. Le favoritisme entre les matières dites scientifiques et les autres appelées littéraires ou sociales est un frein voire l’opium de l’intelligence de l’être humain, pour paraphraser Marx. Il n’est pas superflu d’axer davantage la réflexion sur la théorie de Gardner relative à la multiplicité de l’intelligence.
Si pendant longtemps, les bons élèves ont été estampillés “matheux” ou bien “littéraires”… aujourd’hui ces sobriquets sonnent creux. Et pour cause, résumer le potentiel d’un élève à sa seule capacité linguistique ou logico-mathématique semble désormais plus que hasardeux.
Une prise de conscience récente pour certains, mais que d’autres, comme le Professeur Howard Gardner, défendent avec ferveur depuis les années 80. La trame de sa théorie est que chaque individu est doté d’un potentiel inouï qui se révèle au moyen d’intelligences multiples. Il n’y a plus les bons élèves d’un côté et les mauvais de l’autre mais un ensemble d’individus dotés de forces complémentaires.
Dans son livre “Frames of mind : the theory of multiple intelligence”, publié en 1984, Gardner balaie les idées préconçues et démontre que les tests utilisés pour mesurer les aptitudes des sujets ont leurs limites puisqu’ils se basent uniquement sur deux types d’intelligences : la logicomathématiques et la linguistique alors qu’en réalité les êtres humains sont dotés de bien plus d’intelligences !
A vrai dire, cette théorie devrait être revisitée chaque fois que nous voulons trouver les voies et moyens d’une politique éducative inclusive. A défaut, nous risquons de semer les graines d’un conflit inopportun entre les disciplines, sans oser faire une conciliation des savoirs. L’idéal d’une offre éducative repose adéquatement sur l’égalité des chances, la diversité de approches, ainsi que la pluralité des interventions, et non sur une marchandisation des savoirs.
Toutefois, il est bon de rappeler qu’être brillant dans les matières scientifiques ne devrait aucunement justifier le basculement vers l’intelligence unitaire. Par contre, l’enfant a besoin d’être encadré, suivi, orienté vers les matières dans lesquelles il a des prédispositions manifestes. Il faudrait, donc, une politique éducative basée sur le principe que les séries et spécialités du système éducatif sont toutes d’égale dignité. Si le débat portait antérieurement posait sur les barrières linguistiques, aujourd’hui, il se situe ailleurs.
Tout type de savoir devrait trouver sa juste valeur dans les orientations de notre politique éducative. On n’a jamais vu une société prospère s’appuyant seulement sur les sciences pures, non-plus sur les sciences sociales, mais en œuvrant vers l’intégration de la multiplicité de l’intelligence. Chaque savoir peut construire une dynamique d’éveil, d’alerte et de développement. Les savoirs se relient entre eux et se mutualisent. Chaque intelligence peut être considérée comme un mode d’acquisition de capacités spécifiques, pouvant s’exprimer dans une variété de domaines ou de rôles.
Les savoirs dits d’action, n’ont pas le monopole d’une meilleure employabilité à l’opposé des savoirs savants qui sont souvent relégués au second plan. Cependant, pour que ce défi de rompre avec les politiques éducatives d’exclusion soit relevé dans toutes les stations de décision, il faut un changement de paradigme dans la conception de nos politiques éducatives. Il faudrait une politique éducative calquée sur des mata-intervention sur une intégration systémique des intelligences, des savoirs et des valeurs communes de la société.
Et si, nous approfondissons nos réflexions au tour de nous-même, nous trouverons que les dynamiques du changement de cette nouvelle ère, l’élection du Président Diomaye avec le PROJET rythme avec la théorie de l’intelligence multiple. Évitons d’embarquer nos enfants vers des combats inutiles, souvent stériles, rompant ainsi avec la conception unitaire de l’intelligence.
N’insultons jamais l’intelligence de nos enfants. Chaque intelligence compte pour une instruction significative dans une école inclusive.
Mouhamadou Fadil KANE
Docteur en Sciences de l’Éducation
Enseignant- Chercheur au département d’arabe à la FASTEF-UCAD.
Ancien membre du conseil au programme de la Faculté de l’Education Permanente de l’Université de Montréal, Québec –Canada.
Membre du Mouvement des Arabophones du Sénégal (MAS)