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Me Madické Niang : du divorce politique à la découverte de soi ? Par Pape Sadio Thiam

« Rompre, être quitté, vivre la fin d’un amour sont des épreuves. Comme pour le deuil, il y a un chemin à parcourir pour se reconstruire, après la perte d’un proche ». Cette réflexion de Christophe Fauré (Le couple brisé) pourrait aussi s’appliquer aux relations politiques. Certaines relations politiques se transforment en relations purement familiales : les rompre est, dès lors, une épreuve à la fois pénible mais stimulante. Pénible parce que toute rupture se vit au début, comme un dépaysement mental et physique, surtout quand les relations se sont tissées aussi bien dans des situations de bonheur que dans des contextes moins favorables de lutte et de péril constant. Stimulante aussi, parce qu’il faut se remettre en cause, pour à la fois se motiver soi-même et convaincre les autres de sa bonne foi, mais aussi de sa bonne conscience.

Dans le champ politique, les relations sont très souvent imbibées de calculs obéissant à des intérêts parfois diffus et disparates. Ces interférences sont nuisibles à l’harmonie, parce qu’émettant toujours à partir d’ondes difficiles à circonscrire : le champ politique est un monde de ténèbres où s’affrontent des volontés sournoises et peu soucieuses de la loyauté.

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Comment, dans un tel univers, ménager ses amis, tout en restant intransigeant dans les principes et déterminé à atteindre ses objectifs politiques ? Comment ruminer la peine d’une séparation pour la sublimer en ciment de réconciliation ? Pour comprendre le challenge de Madické Niang, il faut le mettre en rapport avec cette problématique. C’est dire donc que la Présidentielle de 2019 est pour lui, un doublé challenge : battre ou affaiblir Macky Sall et prouver à ses amis ainsi qu’aux observateurs qu’il avait fait le bon choix. Les grandes décisions qui ont fait changer le monde ont toutes été controversées, la tradition et le conformisme étant têtus.

Les hommes n’aiment pas les grands bouleversements et ce, non parce qu’ils ne veulent pas du changement, mais par peur de l’incertitude qu’entraîne l’ébranlement de leurs certitudes. Ces dernières sont toujours commodes, et comme l’homme préfère la commodité, il ne recourt au bouleversement que s’il est convaincu que celui-ci peut lui offrir plus de confort et de sécurité. C’est par ailleurs ce qui fait la difficulté de la démocratie : l’homme politique courageux doit sans cesse vaciller entre la popularité et l’impopularité, s’il veut réellement accomplir de grands desseins pour son peuple et son époque. Le conformisme absolu tue le mouvement et le progrès : il faut sans cesse, risquer la déviance et la marginalisation, pour avoir cette capacité de réformer en profondeur les affaires humaines. Les grands hommes sont devenus grands le jour où ils ont compris, avant tout le monde, la direction de la marche de l’histoire et ont habilement, réussi à y embarquer avec leur ambition. L’adage dit qu’il y a beaucoup de génies étouffés et finalement perdus à cause d’un défaut de courage.

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Avec l’invalidation attendue et finalement confirmée de la candidature de Karim Wade, le camp libéral et les Sénégalais restent divisés : faut-il aller jusqu’au bout de la logique de l’immobilisme ? Le courage et la lucidité sont parfois d’une précocité qui indigne le commun des mortels, et ce n’est que lorsqu’ils aboutissent à des résultats qu’on les comprend véritablement. Dans la configuration actuelle de la scène politique sénégalaise, les forces en présence peinent à mobilier les citoyens, qui ne sont ni militants ni sympathisants d’un quelconque parti. Il faut donc trouver un nouveau souffle au discours politique ainsi qu’à la vision qui la sous-tend, pour davantage accrocher les citoyens et approfondir le débat, sans verser dans la surenchère verbale et la violence physique.

Pour un tel changement de posture, nombreux sont les Sénégalais qui disent qu’il nous faut un homme de consensus, de dialogue et surtout d’une sobriété exemplaire. La discrétion qu’on lui connait, le caractère courtois de son discours et l’urbanité, dont il habille ses positions les plus fermes font de Me Madické Niang une alternative à envisager avec objectivité, sans préjugé ni émotivité. La raison politique n’étant pas a priori, la raison morale, il faut trouver une mesure ou un juste milieu entre les idéaux politiques et les impératifs moraux.

Parmi les candidats retenus pour la Présidentielle de 2019, Me Madické Niang apparait, sans doute, comme le plus apte à trouver cet équilibre nécessaire. Pour avoir été au cœur des affaires politico-judiciaires qui secouent le pays depuis 1993, il peut se prévaloir d’une expérience politique dans les abysses les plus dangereuses de la jeune, mais dynamique démocratie sénégalaise. Au delà de la façon dont il a défendu ses clients et de la nature des résultats atteints, il y a la marque diplomatique qui a permis de gérer le droit dans les arcanes de la politique sans laisser l’un contaminer l’autre.

Il faut dire que sa nomination au poste de ministre des Affaires étrangères sous le régime de Wade était bien inspirée : c’est en toute connaissance de cause que l’ancien président avait nommé Madické Niang à la tête de la diplomatie sénégalaise. En politique intérieure, Wade a dû certainement le voir à l’œuvre et a mesuré sa formidable capacité d’adaptation qui en fait un négociateur au talent diplomatique presque inné. Ce n’est pas à n’importe quel avocat que Serigne Cheikh Ahmed Tidiane Sy va confier une affaire judiciaire ! Sa connaissance du milieu maraboutique, ses liens privilégiés avec les différentes confréries et confessions religieuses du pays font de Me Madické Niang un homme politique respecté et jusque-là, crédible.

Sur le plan de la politique étrangère, son carnet d’adresses et sa maîtrise de la géopolitique font de lui une personne ressource, dont le Sénégal pouvait être fier. On oublie peut-être que dans les pays arabes, comme dans la sous-région, Madické a vite réussi à tisser un réseau de relations pouvant faciliter sa politique étrangère, s’il venait à être élu en 2019. Sous l’ombre de Wade, il a, en toute modestie, construit sa propre personnalité politique au service d’un homme et d’un parti. Et malgré son opposition au choix actuel de son parti, Madické s’est gardé de verser dans l’amalgame, les joutes verbales et les invectives généralement infertiles en politique. S’il a réussi à défricher sa voie sans tambour ni trompette, au point de réussir le cap fatidique du parrainage, c’est la preuve qu’il ‘est loin d’être un manchot en politique. Avec lui, au moins, on a la confirmation que l’adversité n’implique pas fatalement des dérives verbales et autres actes de violence. L’éloignement de la tutelle du Pds a révélé aux Sénégalais une facette jusque-là inconnue de l’homme : le courage dans la tempérance. Nombre de militants déboussolés par l’exil de Karim et l’invalidation de sa candidature ont naturellement trouvé en Madické Niang le vengeur du père, dont le nom et l’œuvre ont été salis par le régime de Macky Sall. C’est dire donc qu’en lui, se rencontrent les qualités d’homme d’État, de diplomate.

L’équation reste cependant de savoir comment transformer ces dispositions et talents en force politique, pour aller à la conquête du suffrage universel ? Même si le Pds n’en veut pas pour ce qu’il convenu d’appeler un « plan B », il dispose encore au sein de la formation libérale, de solides relations qui, si elles parvenaient à être exploitées, pourraient constituer une force politique opérationnelle pour les élections présidentielles de février prochain. En ce qui concerne la vision, le candidat lui-même revendique l’héritage de Wade, dont il dit vouloir achever l’œuvre, en l’adaptant aux nouvelles exigences induites par la découverte de ressources pétrolières et gazières. Faut-il rappeler que l’essentiel des infrastructures présentement intégrées dans le PSE et dont se targue le régime de Macky Sall, sont des projets de Wade ? Qu’y a-t-il, mieux que Me Madické Niang, pour restituer à cette vision sa forme initiale, dépoussiérée de toute politique politicienne ?

La politique, disait G. Flaubert, sera une éternelle niaiserie, tant qu’elle ne sera pas une dépendance de la science. Cette science ne doit pas seulement être théorique, elle doit désormais être pratique : il est temps que les citoyens exigent des hommes politiques des preuves de leur compétence dans un domaine quelconque. Il est temps que le peuple puisse se prononcer sur le choix des candidats par une sorte de certificat de services faits : la politique ne saurait être un métier sans service de bas instincts et de vils intérêts égoïstes. Avocat, ministre, diplomate, député, président de groupe parlementaire : y a-t-il meilleur profil actuellement dans le landerneau politique, pour solliciter le suffrage des Sénégalais ?

La science dont parle Flaubert est à la fois une expertise concernant les relations politiques et sociales et un savoir-vivre tiré de l’expérience. Me Madické peut se prévaloir de cette science, mais également de sa culture de la tolérance : dans les combats politiques les plus épiques, on ne l’a jamais entendu ni vu faire l’apologie de la haine et de la violence. La plupart de nos hommes politiques sont prisonniers de leur ego, ce qui les empêche d’être objectifs dans leur lecture des événements. L’égocentrisme et l’égotisme sont devenus dans ce pays, des freins à l’exercice plein de la citoyenneté. Il est donc temps de cesser de faire des citoyens une propriété ou un bétail électoral, dont on peut se servir à sa guise et s’en débarrasser après usage. Il faut redonner au citoyen sa véritable posture dans une démocratie d’opinion comme la nôtre. Or, pour ce faire, il est impératif que les hommes politiques qui aspirent à nous diriger, quittent la station de la divinité pour occuper celle d’humain.

Il faut, pour reprendre la formule de Pascal, que les hommes politiques apprennent à se haïr pour aimer les autres, puisque comme le dit l’auteur des Pensées, « la vraie et unique vertu est de se haïr, car on est haïssable par sa concupiscence ». Obama fut un grand président, mais il ne s’est jamais prévalu d’avoir un surplus d’humain sur ses concitoyens, il a accepté ses faiblesses et a signé avec son peuple, un pacte de redevabilité intégrale et sans tricherie aucune. Il nous semble que c’est de cela qu’il s’agit pour les démocraties modernes. On ne peut pas s’aimer comme Narcisse et être apte pour l’exercice du pouvoir politique en démocratie. Si l’on tient compte de sa trajectoire politique et de ses relations empreintes d’humanité, on peut au moins, espérer qu’avec Madické Niang, il n’y aura plus de culte de la personnalité au sommet de l’État, comme c’est le cas présentement.

Notre pays et notre sous-région ont besoin de dirigeants sobres dans leur vision, réfléchis dans leur discours et sages dans leurs décisions. On ne dirige pas un pays dans l’ivresse d’une nature intempérante et d’une jeunesse sans expérience, ni dans la sénilité d’une conduite trop hésitante et finalement handicapante. Madické Niang pourrait également être un trait d’union entre la jeunesse et la vieille classe politique : il entretient des relations saines aussi bien avec les jeunes leaders qu’avec les leaders historiques en activité ou en retrait. La politique, au sens noble du terme, est l’alternative de la guerre, mais elle doit être l’affaire de stratèges et d’orfèvres du compromis. C’est précisément sur ce point que la candidature de Me Madické Niang est précieuse aussi bien pour les politiques que pour les membres de la société civile.

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2 commentaires

  1. Madiodio

    Je peux menpermetre de dire que Mr NIANG a un profil très rare en politique. L’homme aura réussi l’équilibre entre les extrémités de la société que lui a permis son talent de grand diplomate. Il est le candidat naturel de la société civil.


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