Une mutinerie dans une prison de Manaus, dans le nord du Brésil, a fait 56 morts dans la nuit de dimanche 1er à lundi 2 janvier. Il s’agit d’un nouvel épisode dans la guerre qui oppose deux importantes organisations criminelles du pays.
“Je n’ai jamais vu si terrible spectacle”, a déclaré le juge fédéral des affaires criminelles d’Amazonie, Luís Carlos Valois, cité par la Folha de São Paulo, en arrivant au complexe pénitentiaire Anisio Jobim (Compaj), en périphérie de Manaus (nord du Brésil), le 2 janvier. Entre dimanche après-midi et lundi matin, 12 surveillants et 74 détenus ont été pris en otage dans le complexe pénitentiaire. La mutinerie a fait 56 morts.
« Les corps étaient les uns sur les autres, certains découpés, sans bras, sans jambe, sans tête… Une scène dantesque.”
Pour le secrétaire à la sécurité publique de l’État d’Amazonie, Sergio Fontes, il ne fait aucun doute que la guerre entre factions criminelles est à l’origine de ce bain de sang. Cité par le Globo, il a souligné que “de tels événements ont malheureusement déjà eu lieu dans d’autres États du pays […]. Il s’agit d’un fléau national qui touche la société entière, et pas seulement l’Amazonie.”
Récemment, des émeutes ont éclaté dans les prisons du nord et du nord-est du pays. Le quotidien précise qu’il s’agit du plus gros massacre dans une prison brésilienne, après celui de 1992, où 111 personnes avaient trouvé la mort à Carandiru, dans l’État de São Paulo.
“Les factions criminelles contrôlent les prisons du pays”
La Folha de São Paulo souligne par ailleurs que, pour le personnel pénitentiaire des prisons brésiliennes, il est quasiment impossible de gérer les conflits entre les détenus, en raison de la surpopulation carcérale, en particulier à Manaus, “la ville la plus violente du Nord”. L’établissement Compaj, dont la capacité d’accueil est de 454 prisonniers, en comptait 1 244 en décembre.
Selon le journal, la mutinerie est un nouveau chapitre dans la guerre entre deux importantes organisations criminelles, le Primeiro comando da capital (PPC) et le Comando vermelho (CV). Ces factions se disputent la frontière entre l’État brésilien du Mato Grosso do Sul et le Paraguay, porte d’entrée principale de la drogue dans le pays.
En juin dernier, le meurtre d’un important trafiquant de drogue du Comando vermelho, attribué au PCC et mis en scène dans une vidéo de quatre heures, a déclenché une escalade de violence entre ces organisations, “qui contrôlent les prisons et les favelas du Brésil”.
Plaque tournante du trafic international
Mi-octobre, le conflit a dégénéré en règlements de comptes dans les prisons du Nord, du fait d’alliances passées entre ces organisations criminelles et des gangs locaux. Pour El País Brasil, le massacre de Compaj impliquerait ainsi la Família do Norte, principale faction criminelle d’Amazonie, qui est alliée avec l’organisation Comando vermelho, et a la mainmise sur la prison Compaj, où s’est déroulée la mutinerie.
Parmi les 56 victimes, la plupart appartenaient au clan rival, le PCC. “En faisant preuve d’une telle cruauté, les assaillants ont voulu envoyer un message à leurs rivaux”, avance le journal. El País Brasil rappelle que la région nord du Brésil est une plaque tournante du trafic de drogue international : “Les principales routes de la drogue traversent sa frontière, bordée de grands pays producteurs de cocaïne comme le Pérou, la Bolivie et la Colombie […]. La drogue qui transite par le nord-est du Brésil va jusqu’en Afrique et en Europe.”
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