Les droits de douane de Trump, une chance à saisir pour Pékin

droits de douane tous azimuts, Donald Trump promet de refaire le monde au bénéfice des travailleurs américains. Mais l’un des bénéficiaires pourrait se révéler être la Chine, vue comme l’adversaire numéro un par le président américain.
La Chine a immédiatement répliqué aux nouveaux droits de douane américains en annonçant ses propres taxes ainsi que des contrôles à l’exportation d’éléments de terres rares vitaux pour l’imagerie par résonance magnétique ou l’électronique grand public.
A la différence cependant de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump ne vise pas que la Chine mais le monde entier, y compris des pays alliés qui avaient adopté la ligne de fermeté de Washington vis-à-vis de Pékin.
Peu avant les dernières annonces de Donald Trump sur les importations– droits de douane plancher de 10% et taxes supplémentaires pour les pays jugés particulièrement hostiles en matière commerciale — la Chine, le Japon et la Corée du Sud ont dit vouloir « accélérer » leurs négociations sur un accord de libre-échange.
« Si Trump poursuit sur sa lancée unilatéraliste, je m’attends à ce que Pékin courtise ces capitales de manière plus agressive, se présentant comme un facteur de stabilité économique dans la région », juge Lizzi Lee, spécialiste de l’économie chinoise à la Asia Society Policy Institute.
« Et n’oublions pas l’habillage. La Chine présente les droits de douane de Trump comme la preuve du déclin des Etats-Unis, le recours au protectionnisme, les menaces contre les alliés et la défiance envers les normes internationales ».
- « Balle dans le pied » –
Yun Sun, du Stimson Center, explique qu’elle s’attendait à ce que la Chine « soit un peu plus cool », ajoutant que Pékin semble moins inquiet que durant le premier mandat du milliardaire républicain.
« Je pense que la Chine voit ça plus comme une opportunité et estime que les Etats-Unis se tirent une balle dans le pied », dit-elle.
« On a un certain nombre de mécontents, des alliés solides et fidèles des Etats-Unis », poursuit-elle. « Aujourd’hui, leur confiance dans la politique américaine envers le reste du monde n’est pas brisée, mais au moins remise en question ».
La Chine, qui a exporté l’année dernière pour plus de 500 milliards de biens aux Etats-Unis, devrait certes pâtir des droits de douane américains.
Les détracteurs de Pékin ont salué le glas du quasi-consensus régnant aux Etats-Unis sur l’intérêt d’intégrer le géant asiatique à l’économie mondiale.
« L’idée que la Chine communiste puisse être un membre responsable du système commercial international — l’Organisation mondiale du commerce — doit être fondée sur des échanges équilibrés et justes », déclare Chris Smith, élu républicain qui s’insurge depuis des années contre le découplage des échanges commerciaux de la question des droits humains promu par l’ancien président Bill Clinton.
« A la différence de présidents précédents, le président Trump comprend parfaitement l’étendue et la nature du problème, de la menace existentielle que représente la Chine, et ce qui doit être fait ».
- « Domination et force » –
Jacob Stokes, du Center for a New American Security, fait valoir que Pékin entretient des relations difficiles avec d’autres pays, entre différends territoriaux avec le Japon, l’Inde et l’Asie du Sud-Est et inquiétudes européennes quant au soutien apporté à la Russie dans la guerre avec l’Ukraine.
« La Chine s’est montrée adepte quand il s’agit de se saboter elle-même, spécialement avec ses voisins, via ses exigences, voire son agressivité », ajoute-t-il.
L’analyste fait valoir que l’ancien président Joe Biden avait réussi à former des coalitions avec d’autres pays pour faire pression sur la Chine, sur des questions allant de l’accès à l’internet de cinquième génération à la sécurité.
« Pékin se sentait un peu isolé à la fin de l’administration Biden et je pense qu’une grande partie de cette pression est retombée car le perturbateur est maintenant clairement Washington ».
La Chine a pu être identifiée à Washington comme le principal rival des Etats-Unis mais pour Lizzi Lee, Donald Trump considère fondamentalement le président Xi Jinping « non pas comme un méchant, mais comme un pair – un autre homme fort ».
« Pour M. Trump, la guerre économique n’est pas une question d’économie ou même de marchés boursiers, mais plutôt une question d’image de domination et de force », estime-t-elle.
« Et cela laisse juste assez de place pour un pivot – si Xi Jinping concède le genre de victoire dont Donald Trump pourrait se revendiquer ».