« Le Sénégal a besoin d’hommes d’Etat et non de zèbres d’Etat » (Par Babacar Justin Ndiaye)

Citadelle de tous les raffinements, sous le magistère du poète-président Léopold Sédar Senghor, le Sénégal devient inexorablement le bastion de toutes les grossièretés.

Maitre Lamine Guèye qui avait le double don de l’élégance et de l’éloquence, trésaille convulsivement dans son linceul, en recevant, outre-tombe, les échos répugnants du débat débile en cours sur l’échiquier politique.

Les observateurs interloqués s’interrogent : par quelle malvenue alchimie, le fécond choc des idées s’est mué en triste télescopage des insanités ? L’une des explications (la liste des causes est évidemment longue) renvoie globalement à la dégradation accélérée de la gouvernance étatique et à la vie politique subitement au rabais. Le culte de l’ascension sociale – via la politique – et l’absence d’initiation à la responsabilité nationale en sont les nettes illustrations.

La réalité est de plus en plus accablante. Les artilleurs de l’injure massive et les voltigeurs des insanités en rafales tiennent fâcheusement le haut du pavé. La littérature ordurière et l’éloquence boueuse (celle des caniveaux) structurent, de façon rageuse, le débat national. Chose, à la fois cocasse et curieuse, le trio déchainé (Moustapha Cissé, Farba Ngom et Yakham Mbaye) furent et/ou demeurent des fidèles fiévreux voire furieux du Président Macky Sall.

Bien entendu, les prestations, toutes outrancières, reflètent un tiercé de styles bien décalés. Le polémiste Yakham Mbaye peaufine ses écrits, en y couchant une fine pellicule d’érudition ou un vernis d’académisme. Ce qui embellit mais n’amortit guère la frappe toujours ajustée là où ça fait atrocement mal. Le Député Moustapha Cissé Lo balance des bordées d’injures à la manière d’un tireur sourd au cessez-le-feu. Quant au Maire Farba Ngom, il parle sans ambages ni emballages. Avec un verbe qui allume sa cible, à la manière d’une mitraillette en folie. Chez Farba Ngom, la pertinence est le cadet des soucis, l’essentiel est de déchiqueter les contempteurs ou les ennemis du Président Macky Sall.

On est aux antipodes des débats – percutants mais savants – de l’ère Senghor-Cheikh Anta Diop-Majmout Diop. C’était la profusion des idées et non la débauche des inepties. On était convié au festival de la pensée et non attiré vers le banquet de la bêtise. Les grandes plumes du senghorisme (Abdou Salam Kane alias ASAK, Mocktar Kébé, Habib Thiam, Bara Diouf, et l’Ambassadeur Momar Seyni Mbengue) croisaient le fer avec les rédacteurs idéologiquement bien armés (Samba Diouldé Thiam, Sémou Pathé Guèye et le Président Mamadou Dia) du journal « AND SOPI » et des publications de la gauche sénégalaise.

Le regrettable virage a été amorcé durant le premier mandat du Président Abdoulaye Wade. Au lendemain de la brouille entre le Président et son Premier ministre, Idrissa Seck, le journal « Il est Midi » fut porté sur les fonts baptismaux. Objectif : démolir Idrissa Seck et pulvériser son influence immense dans le PDS. Pour la première fois, le débat politique a évacué les arguments et amoncelé les immondices. La littérature ordurière a fait florès dans les allées du Pouvoir libéral. Des attaques en dessous de la ceinture ont visé les bêtes noires du wadisme triomphant comme Latif Coulibaly, Penda Mbow, Idrissa Seck, Ousmane Tanor Dieng etc. La vérité historique commande de rappeler que le Président Abdoulaye Wade et le Premier ministre Macky Sall avaient parrainé et financé le journal « Il est Midi ».

Il est temps que les Sénégalais soucieux de la protection et de la vitalité des institutions sonnent le tocsin ; afin que cette pluie d’injures cesse de tomber. Car le débat sale, salace et dégueulasse éloigne le pays des cimes de la bonne gouvernance et, à contrario, le précipite dans les bas-fonds où grouillent et grenouillent des fripouilles de la politique. Les compatriotes et administrés du Président Macky Sall sont nostalgiques des hommes d’Etat, d’hier, et horrifiés par les zèbres d’Etat, d’aujourd’hui.

Par Babacar Justin Ndiaye
6 COMMENTAIRES
  • Bob

    Totalement d’accord avec l’analyse de BJN. Hier c’était le débat des idées, on avait hâte de lire la nouvelle parution d’AND SOPI qui répond aux articles du SOLEIL, ou la parution de SIGGI. Point d’injures, que des critiques, très acerbes certes, mais on y trouvait la grandeur intellectuelle des auteurs des articles dans les différents journaux. Aujourd’hui ce sont les injures, parce que  les politiciens ne sont guidés que par leurs intérêts égoïstes. C’est triste de constater que le niveau du débat politique est très bas. Je me demande même s’il y a réellement un débat dans le vrai sens du mot.

  • Alioune Diop

    Mais grand frère je vais vous dire ce que les ivoiriens disaient au Sénégalai .le français est trop fort .il faut diminué .( blague) je dirais que cette contribution est très pertinente .mais malheureusement la nouvelle génération auront du mal à comprendre votre texte .parce qu’ils seront obligés d’aller fouillé le dictionnaire souvent et revenir à la lecture de votre texte félicitation frère

  • Eumeu

    Ok le texte est très pertinent mais quelle est la part des sénégalais qui font tout et acceptent tout et les kilifeu qui n’inspirent plus un respectt dissuasif des gros écarts les pères de famille en somme tout le monde regarde faire tous coupables

  • maze

    belle analyse ! mais tant que les enfants de ce pays ne sont pas formés sur le sens de la responsabilité, le respect de l’autre et les bonnes manières dans nos écoles alors cette situation va perdurer et va aller de mal en pis.

  • Pardon le zèbre

    Eh oui le zèbre voit en noir et blanc…
    Désolé cher zèbre tu vaux mieux que ces
    insulteurs. Comparaison n’est pas raison

  • Ahmo

    Un pays à toujours les dirigeants qu’il méritent

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