La nouvelle réforme judiciaire au Sénégal : entre centralisation et équilibre des pouvoirs
La création du Pool Judiciaire Financier (PJF) par la Loi n°2023-14 du 2 août 2023 marque une refonte majeure du système judiciaire au Sénégal. Cette nouvelle juridiction, spécialisée dans le droit pénal financier, redéfinit ses compétences par rapport aux procureurs traditionnels. Le PJF est conçu comme une juridiction répressive centrale pour les infractions financières, capable de prononcer des sanctions variées.
Compétences du Pool Judiciaire Financier
Le PJF a une compétence exclusive sur de nombreuses infractions, y compris la corruption, le détournement de fonds publics, et le blanchiment d’argent. Sa compétence concurrentielle lui permet de traiter des affaires généralement supervisées par d’autres procureurs, soulevant des questions sur l’autorité des procureurs traditionnels. Le PJF peut réclamer des dossiers éligibles dans un délai de 72 heures, ce qui pourrait réduire le rôle des procureurs de droit commun.
Débat sur la compétence concernant les ministres
Un débat émerge autour de la capacité du PJF à poursuivre des ministres pour enrichissement illicite, en remplacement de la défunte CREI. Bien que le PJF soit juridiction ordinaire, il pourrait traiter de telles affaires dans le cadre des infractions financières. Néanmoins, il reste une ambiguïté sur la poursuite des ministres, qui doit être clarifiée pour éviter une centralisation excessive du pouvoir judiciaire.
Impact de la réforme judiciaire
Cette réforme soulève des préoccupations sur un déséquilibre potentiel des compétences entre le PJF et les juridictions ordinaires. Le risque d’une centralisation excessive est apparent, nécessitant une gestion prudente pour éviter la marginalisation des procureurs de droit commun.
Comparaison avec le modèle français
Le PJF s’inspire du Parquet National Financier (PNF) en France, mais avec une portée plus large. Tandis que le PNF traite principalement de la probité et des finances publiques, le PJF englobe une gamme plus étendue d’infractions économiques. Cette différence souligne l’adaptation du modèle au contexte sénégalais.
La réforme vise à renforcer la lutte contre la corruption au Sénégal, mais nécessite de garantir que l’autonomie et l’équilibre des rôles judiciaires soient préservés. Il est crucial de maintenir les droits de la défense afin d’assurer une justice équitable et efficace.