Faudrait-il voter tous les jours ? (Par Madiambal Diagne)

Le Sénégal est un pays où les arsenaux de l’Armée nationale sont violés et des quantités de munitions, qui pourraient alimenter toute une guerre civile, sont dérobées et dont une partie a pu être retrouvée fortuitement, à la faveur de banals contrôles de la circulation routière, sans que cela n’émeuve pas grand monde !

Le Sénégal est un pays où la Marine nationale peut mettre la main sur une cargaison de drogue dure et que la moitié de la drogue saisie disparaisse, comme par enchantement, sans que cela ne dérange ou ne semble préoccuper personne ! Deux faits majeurs de l’actualité qui devraient mériter que des voix s’élèvent pour exiger que toute la lumière soit faite et que les responsabilités soient situées et bien situées. Il y va en effet de notre sécurité nationale qui, encore une fois, doit primer sur tout autre chose.

Le Sénégal est un pays qui vient de vivre une rentrée dans les écoles et universités, avec moult difficultés pour les élèves, les étudiants et leurs parents, sans que cela ne suscite le moindre débat au sein de la classe politique !

C’est comme qui dirait que le devenir du pays ne constituerait pas une préoccupation de premier ordre. Le Sénégal est un pays qui vient de terminer une campagne agricole, sans que personne ne pose la question sur les modalités d’assurer le financement de l’achat des récoltes et le sort des producteurs !

La réussite ou l’échec de cette campagne ne constitue point un sujet de préoccupation ; nul ne cherche à savoir si les objectifs de production fixés ont été réalisés ou pas. Le Sénégal est un pays dont le gouvernement est en train de faire examiner le budget de l’État pour l’exercice prochain, sans pour autant que cela ne fasse un débat sur les choix budgétaires et leurs implications et conséquences !

Le Sénégal est un pays en péril dans ses frontières, avec une situation de terrorisme latent chez ses voisins du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger et Nigeria) sans que la classe politique ne s’en soucie !

Le Sénégal est un pays dont la sécurité intérieure et la stabilité économique et sociale sont menacées par d’éventuels graves troubles politiques en Guinée-Bissau et en Guinée Conakry, sans qu’aucun homme politique ne daigne s’en soucier !

Personne ne se demande comment le Sénégal devrait-il s’organiser pour jouer un rôle dans la pacification de ces crises chez nos voisins ou (scénario du pire) comment faire pour recevoir des hordes de plus de deux millions de réfugiés au cas où la situation dégénérerait chez le président Alpha Condé par exemple. Quelles dispositions l’État du Sénégal a-t-il déjà prévues pour faire face à une telle fatalité qui s’annonce ?

Dans ce pays, on discute et on ne discute que de la date des prochaines élections. A peine le pays est-il sorti de l’élection présidentielle de février 2019, qu’on se projette sur celle prochaine de 2024, pour discuter de qui sera candidat et qui ne le sera pas et dans quelles conditions cette élection sera-t-elle organisée. On voudrait installer ainsi le pays dans une campagne électorale permanente.

Rien n’intéresse la classe politique que le calendrier électoral. Cela est tellement vrai que certains hommes politiques, entre deux échéances électorales, désertent le débat public ou quittent même le pays, jusqu’à une nouvelle campagne électorale. Qui sont nos hommes politiques ? James Freeman Clarke répondait qu' »un politicien pense à la prochaine élection. L’homme d’État, à la prochaine génération ».

À mer agitée, écarte ta pirogue !

Le débat public au Sénégal ne cesse donc de tourner autour de la question électorale. C’est une lapalissade que de dire qu’il y a bien des choses dans la vie d’un pays en dehors des joutes électorales. L’éducation, la santé, la sécurité, les préoccupations sociales et les perspectives pour les jeunes générations sont des enjeux qui doivent être adressés lucidement et de façon dépassionnée. Rares sont les fois où les responsables politiques, de la majorité comme de l’opposition, ont adressé les nombreux drames sociaux à moins d’un émoi populaire.

Les indignations sur des questions économiques comme le sort des entreprises, les difficultés du secteur industriel, les problématiques de l’emploi et de l’employabilité se comptent du bout des doigts. Des déclarations incendiaires sont faites sur des questions choisies pour leur capacité à créer la controverse, histoire de faire un tabac dans les médias ou de ne chercher qu’à nuire. On constate que depuis plus de quatre bonnes années, le débat public est très centré sur un supposé scandale dans l’attribution de licences d’exploration d’hydrocarbures.

À entendre certains hommes politiques, c’est comme si le Sénégal avait déjà produit du pétrole ou du gaz, déjà vendu, et dont le fruit a été détourné par des élites au pouvoir. C’est également la même chose dans le débat sur un prétendu détournement de la somme de 94 milliards suite à une transaction sur un terrain litigieux, depuis plus de trente ans. On finit par croire que le fameux terrain a été vendu et que l’État a sorti des deniers pour conclure la transaction et que ces sommes sont tombées dans de poches profondes d’hommes politiques au pouvoir.

Or, de tout cela, il n’en est rien. Des hommes politiques ont voulu prendre leurs accusations comme des vérités sans aucune preuve et imposer aux autres citoyens d’accepter cela. Convoqués par les enquêteurs, ces hommes politiques, notamment Abdoul Mbaye, Ousmane Sonko, Mamadou Lamine Diallo ne peuvent dire plus qu’ils ne nourrissent que des soupçons. Dans quelle situation serait-on si les soupçons de chacun sur son voisin devraient pouvoir faire l’objet de procédures judiciaires ?

La mauvaise foi est telle que tous les coups sont permis. « On ne ment jamais tant qu’avant les élections, pendant la guerre et après la chasse. » Les personnalités de la Société civile sont entrainées dans ce débat au point que d’aucuns parmi elles en arrivent à oublier les missions fondamentales des organisations qu’elles représentent. Ainsi, découvre-t-on que des « droits-de-l’hommistes » par exemple, en arrivent à plus parler de calendrier électoral, à contester le droit de tel ou tel autre candidat de pouvoir briguer un mandat supplémentaire, qu’ils ne parleraient de violations des libertés fondamentales ou de respect de la dignité humaine.

Les cas de torture, de maltraitance ou autres abus contre les personnes sont relégués au second plan. Il faut bien le dire, certains responsables de la société civile sont davantage portés vers les questions politiques et électorales que les responsables de partis politiques. Dans une telle ambiance, devrait-on s’étonner d’entendre dire que « la société civile sénégalaise est plutôt un conglomérat d’opposants au régime en quête de reconnaissance ou d’espaces de conquête du pouvoir ou de tribune pour pouvoir justifier une existence qui permettrait de capter des financements » ?

Il demeure également que le discours est systématiquement sous le registre de la contestation, de la véhémence, que sur celui des propositions alternatives. On se rappelle un candidat à l’élection présidentielle qui disait, sur un plateau de télévision, garder ses bonnes idées pour lui, afin d’éviter que ses adversaires ne s’en inspirent ou les lui volent. Le citoyen lambda finit par se faire une religion dans une telle atmosphère. Il se détourne de tout ce qui est vient du monde politique, quel que soit l’instigateur.

Face à la « vapeur » et la « houle », le Sénégalais s’inspire d’Aristote et « écarte son vaisseau ». Cette indifférence à la parole politique sur toutes les questions touchant la vie courante du pays noie les rares propositions concrètes, caricature les actions conduites et joue sur la légitimité de tous. On ne peut être dans un pays où il n’y ait de parole reconnue.

L’expertise, sans cesse conspuée et rabrouée, finit par se terrer. Ils sont nombreux, les intellectuels sénégalais et professionnels dans différentes filières, qui se privent totalement de parole, sur des questions dont leur connaissance et expérience éclaireraient des lanternes. Qui peut leur reprocher de ne pas se livrer à une meute d’insulteurs dont la quête de contradictions hors de toute logique fait son essence ?

Ces derniers, incapables d’apporter un quelconque argumentaire contre une idée ou une question soulevée, recourent de manière systématique à l’injure et à l’invective. Des officines où des spécialistes de l’injure sur les réseaux sociaux, sont installées par des hommes politiques afin d’exercer une certaine terreur sur des adversaires. L’espace des débats est occupé par l’agitation et les contradictions sans fin sur les choses les plus puériles. A vouloir tout rendre léger, on en oublie qu’il y a des choses dont le sérieux exige un poids.

La place des médias dans ce vacarme

Dans une chronique en date du 10 août 2015, intitulée « Méritez de nous gouverner ! », nous interpellions la classe politique. Dans le même temps, nous relevions « Quelle est aussi la responsabilité des médias dans ce charivari ?

Le souci de donner la parole à toutes les sensibilités politiques ne devrait pas pousser à relayer n’importe quel propos. Une rédaction doit pouvoir apprécier souverainement de refuser de relayer un propos qui heurte la morale ou les principes républicains ».

Les médias sénégalais ont un rôle crucial dans le nivellement d’une telle atmosphère. Toutes les opinions se valent en démocratie, mais il est des tribunes offertes qui consciemment, ne sont d’aucune valeur ajoutée à la communauté ou pire, lui nuisent. Une diversification des questions proposées dans les médias s’impose à tous. Une plus grande attention portée aux questions sociales, économiques et culturelles au-delà des caricatures ou des couvertures en lien à des événements communs, aiderait à faire bouger des lignes.

Il y a bien des choses intéressantes et créatives au Sénégal à faire découvrir au grand public. La logique de course effrénée à la nouvelle choquante a fini d’entrainer la plupart des médias dans un engrenage où le client favori reste le politique sénégalais.

Entre déclarations aériennes, controverses à susciter ou entretenir, mise en valeur à force d’ego, la tribune offerte aux politiques de tous bords par les médias sénégalais finit par lasser l’opinion. La recherche du plus grand nombres de « clics » pousse certains médias nouveaux à privilégier le sensationnel dans la diffusion de l’information, avec un contenu ou une « titraille » qui ne correspondent pas à la véritable information. Il faudra bien du temps pour vomir tout ce qui a été dit et proposé sur le fait politique et la chose publique, afin de partir sur des bases nouvelles.

La quête d’un dragon a pu hanter Dakar par la force des médias. Un rire tout jaune vaut mieux qu’une indignation. Le plus grave est qu’ils sont nombreux, parmi le public sénégalais, à cause de la vacuité des contenus et des carences professionnelles qui sautent à l’œil, à se détourner des chaines et radios sénégalaises pour suivre des stations étrangères. Allons-nous les accuser d’être soumis à l’étranger pour leur choix ?

8 COMMENTAIRES
  • IBRA Bocar WANE

    Bravo, Mr DIAGNE pour ce papier, malheureusement il l’attirer pas grand monde pour des raisons que vous y avez citées.

    Tout le monde est responsable mais la classe des politiciens pas des vrais « politiques », la « société civile » si elle existe dans notre pays et surtout la presse ont conduit notre nation à cette « désintégration » qui n’émeut personne.

    Cette situation, ce comportement est devenu normal, ce sont les autres qui pensent autrement qui sont dans l’anormal ».

    Et le spirituel dans tout ça?
    On a peur ou on a une pudeur d’en parler.
    « On a peur de parler vrai, de faire vrai et d’être vrai ».

    Merci Mr DIAGNE.
    C’EST la où attend les hommes de média.

  • gainde

    Madiambal juste un mercenaire d la.plume avec sn group d pression

  • gainde

    Mr diagn a vous lir on a.l impression o votre group sort du.lot kan a la press poubell du senegal i be rassure vs we’re a bien servi au mem titre k tous les mercenaires d la plum embrigader sue la mem lign editorial k le palais un peu de decence d votr part vs obligerait a etr moins donneur d lecon

  • ass

    Tais-toi malhonnête

  • Vincent

    Une vraie presse poubelle maintenant au Sénégal c’est terrible

  • Malick Diallo

    Madial tu connait tres bien ce qui se passe dans pays les narko traficans savent nos pays a cest corruption cest le serieux qui nous manque toi badiabel tu est le premier qui ne montre pas un bon excemple il faudra voire le ka de aliou sall cest pas digne dun homme detat dans toutes lafrique cest corruption un vraie passoire lafricains nest pas digne est cest la pauvrete un peut partout pas dicipline dans nos etats il ne montre jamais un bon.excemple ont parle trop rien du mengeonge ont nas interet de faire attention lafrique edt male partie

  • Vieux Diop

    Rien à dire vérité absolue

  • Vieux Diop

    Té mouye deugue

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