Expiration de BBY – Chronique d’un compagnonnage politique à la douloureuse agonie… Par Papa Ibrahima Diassé*

« Gagner ensemble et gouverner ensemble », telle est l’estampille du contrat autour duquel Macky Sall a réuni et convaincu plusieurs partis politiques et mouvements autour d’un idéal commun en 2012, pour les faire adhérer à son projet politique. Benno Bokk Yaakar (BBY) venait d’être mise sur pied en tant qu’entité politique incongrue, historique et inédite à la fois, large par sa taille mais aussi riche par la diversité de ses composantes au point que l’aspect contre nature n’a pu résister à la volonté ferme de s’unir.

Soudain, la chaîne de solidarité politique improvisée devient incontournable. Mais elle
était certes fondée au début sur un désir commun de se débarrasser de Wade.

Chose faite, elle prit de l’ampleur et s’est adossée sur une ossature formée d’hommes forts et influents ayant pratiqué le pouvoir et qui pouvaient s’ils le décidaient, faire et défaire quid même à rendre la vie difficile à tous ceux qui mettraient en jeu leurs intérêts au sein de ce regroupement politique et/ou en dehors de leurs lignes.

Tanor et Niass, pour ne pas les nommer ont été les garants de la longévité de cette coalition dirigée par Macky Sall d’une main de maître. Elle est ensuite devenue une réalité, la première force politique du Sénégal qui est parvenue à résister aux intempéries politiques et caprices du pouvoir bien qu’ayant fait des victimes pour braver le temps et les ouragans.

Mais le contexte qui l’a vue naître, lié à la disgrâce entre le peuple et Wade en 2011 et 2012, est aujourd’hui loin derrière nous. Une époque nouvelle, accompagnée d’un vent nouveau, symbole du renouveau exigé par le peuple, s’est immiscée dans le courant de notre quotidien politique et a bouleversé les choses en 2019. Contre toute attente Wade-père est redevenu ce chouchou adulé des années 90, de surcroît un papi adorable en qui, somnolent plus que jamais l’intelligence et la ruse politique.

Il aura réussi à renverser la tendance garder pendue, contrairement à une certaine croyance, l’épée de Damoclès sur Macky Sall et sa bande en leur mettant la pression jusqu’au cou. Mais fort heureusement pour le président Sall, son prédécesseur s’est abstenu à la présidentielle au dernier virage faisant dissiper comme de la fumée blanche dans le ciel, sa rage de le destituer de retour à Dakar en grand pompe. Les vents de Conakry ont soufflé en sa faveur.

BBY a su alors profiter de cette posture qui l’a permis de facilement jouir d’une dernière chance de survie actée notamment par l’élection de Macky Sall dès le premier tour. Et voilà arrivé cet ultime moment de faire les adieux naturellement après un compagnonnage rythmé par des circonstances les plus alambiquées quoique loué à sa naissance mais décrié pour sa boulimie foisonnante. La coalition réussit tout de même la prouesse de rester debout malgré quelques épisodes tragiques. Mais de nos jours, elle est arrivée en phase d’expiration comme une bouteille de lait oubliée longtemps au fond d’un rayon de supermarché, après avoir gravi tous les échelons et connu toutes les étapes de la vie: de la naissance à la maturité.

Le déclin est inévitable hélas ! Et le premier facteur menaçant qui s’est dressé sur son chemin fut la mise en place de la grande coalition de la majorité présidentielle à la dernière élection qui est une sorte de BBY bis constituée de personnes animées d’ambitions semblables sur la forme mais antagonistes sur le fond donc difficilement conciliables sur le moyen terme. Voilà la première pomme de la discorde. Un paradoxe qui révèle un cercle vicieux, une réunion de caciques politiques agités dont les désirs s’enchevêtrent et les moyens inégaux.

Certains responsables de BBY assisteront impuissants à la promotion d’adhérents de dernière minute lors du prochain gouvernement. Ces gens cependant, ont eu l’intelligence de bien choisir le « mercato électoral » pour intégrer la coalition de la majorité présidentielle, histoire de rehausser leur valeur marchande. A l’arrivée, la démarche aura été payante.

Ce qui a été toujours passé sous silence ou du moins la question que beaucoup n’ont jamais osé aborder clairement, c’est que cette coalition est inscrite dans le temps et l’espace. Elle est loin d’être éternelle avec sa durée de vie réduite et surtout suspendue aux intérêts des uns et des autres. Si beaucoup à savoir entre autres: Cheikh Bamba Dieye, Malick Gackou, Thierno Alassane Sall, Mamadou Ndoye LD, Khalifa Sall ont faussé compagnie plus tôt que prévu, il faudra s’attendre à une autre vague de frondeurs, ou de simples démissionnaires au courant de ce dernier mandat de Macky Sall.

Premièrement, parce que chacun est désormais devenu libre. Deuxièmement, parce qu’il il n’ya plus rien à gagner avec cette coalition qui aura accompli sa mission et fait son temps. L’Apr restera l’Apr, le Ps, le Ps, idem pour l’AFP et les autres. Autre facteur subsidiaire, la percée inattendue de Sonko peut s’avérer être une source de motivation pour quelques uns qui voudront se jauger et prendre leur destin en main.

De la matière politique, il y’en a encore dans ce pays.

Verra qui vivra…

1 COMMENTAIRE
  • Khalaasse

    C’est la première dans l’histoire politique du Sénégal que le Conseil Constitutionnel, statuant en matière électorale, proclame des résultats

    1) sans aucune considération des observations jointes en annexe émanant d’un des candidats,

    2) sans se soucier de l’étendue et du contenu des Procès Verbaux confisqués à l’Etranger par les représentants diplomatiques de l’Etat puisque favorables à l’Opposition (et que le Président Demba Kandji a mentionné dans son rapport destiné au même Conseil Constitutionnel)?

    alors que le candidat déclaré victorieux n’a dépassé (théoriquement) la barre des 50% qu’avec seulement 362069 VOIX ! Et cela ne gène personne du côté des « vainqueurs » !

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