Dette publique : le professeur Amath Ndiaye dément l’affirmation d’un endettement de 10 200 milliards FCFA en 14 mois

Alors qu’une affirmation relayée par certains responsables de l’Alliance pour la République (APR) soutient que l’État du Sénégal se serait endetté à hauteur de 10 200 milliards FCFA en seulement 14 mois, l’économiste Amath Ndiaye, enseignant-chercheur à la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’UCAD, rejette catégoriquement cette information.

Après avoir analysé les données issues des Lois de Finances Rectificatives de 2024 et 2025, le professeur Ndiaye souligne que ce chiffre est inexact. Selon lui, le déficit budgétaire cumulé sur cette période — c’est-à-dire le véritable endettement net de l’État — s’élève à 4 022,4 milliards FCFA, bien loin des 10 200 milliards avancés.

Il explique que la différence entre les montants autorisés à l’emprunt et le déficit réel est due au refinancement, une pratique normale dans la gestion des finances publiques, consistant à rembourser des emprunts arrivés à échéance.

Ainsi, en 2024, l’État a été autorisé à emprunter 4 556,9 milliards FCFA, mais le déficit budgétaire réel n’a été que de 2 362,5 milliards FCFA. En 2025, sur une autorisation de 5 714,5 milliards FCFA, le déficit prévu est de 1 659,9 milliards FCFA, le reste servant à honorer des engagements antérieurs.

Le professeur Ndiaye insiste sur la nécessité de distinguer entre emprunt brut et endettement net. Selon lui, confondre ces notions contribue à brouiller le débat public et à propager des chiffres erronés.

Il reconnaît toutefois que le poids croissant du service de la dette est préoccupant : en 2025, près de 26 % des recettes fiscales seront consacrés au remboursement de la dette, réduisant ainsi les marges de manœuvre de l’État pour financer les secteurs prioritaires comme la santé, l’éducation ou l’investissement.

Face à ces défis, il recommande : la rationalisation des dépenses de fonctionnement, une meilleure mobilisation des recettes fiscales et la relance de l’investissement privé, estimant que l’investissement public seul ne peut soutenir durablement la croissance.

Enfin, il appelle à une meilleure transparence budgétaire, notamment à travers la publication régulière du Bulletin statistique de la dette publique, comme le prévoit la loi organique. Il exhorte aussi les acteurs politiques, majorité comme opposition, à fonder leurs déclarations sur des analyses rigoureuses et des données vérifiables, pour préserver la qualité du débat démocratique.

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