De la folie à la plume : Ken Bugul brise les chaînes du destin (Vidéo)

De la folie à la plume : Ken Bugul brise les chaînes du destin (Vidéo)

À l’Université Cheikh Anta Diop, Ken Bugul a livré un témoignage poignant sur son parcours de vie et la lutte constante contre les carcans sociaux qui ont longtemps cherché à la définir. L’écrivaine est revenue sur les étiquettes qu’on lui a collées, sur les stéréotypes qui auraient dû la mener à la défaite.

« On disait de moi, entre guillemets, que j’étais destinée à l’errance, à la mort, à la folie, à la drogue, à finir dans la rue. Une femme sans avenir, sans mari, sans enfants… une figure réduite à l’absence et à l’impossibilité de réussir dans une société qui impose ses normes », raconte-t-elle avec une grande clarté.

Mais plutôt que de se soumettre à cette fatalité, Ken Bugul a décidé de la déconstruire, de la transformer. Elle a écrit, et dans ses trois premiers livres, elle a trouvé la force de se réinventer. « J’ai refusé de m’arrêter aux échecs. Chaque épreuve, je l’ai transformée en force, en énergie. Le désir de vivre, soutenu par la foi en moi-même, est devenu mon moteur », confie-t-elle.

L’écrivaine explique que c’est à travers la culture, l’ouverture d’esprit et le savoir qu’elle a pu reconstruire son identité. « Croire que j’existe, que c’est possible, même par l’accumulation des connaissances. Mes expériences m’ont éclairée, elles m’ont ouvert les yeux et tracé un chemin que j’ai suivi avec conviction », affirme-t-elle, insistant sur l’importance de la construction personnelle plutôt que d’une vie prédéterminée.

« Écrire est devenu une nécessité. La vie n’est pas figée, elle se fait et se vit. Pourquoi ne pas utiliser ce que j’ai reçu, les capacités de percevoir le monde, pour créer la vie que je souhaite ? », déclare-t-elle, affirmant ainsi que la vie ne doit pas se laisser dicter par un destin imposé.

Ken Bugul revient également sur les nombreux jugements qu’elle a subis : « On disait que j’étais folle, perdue, possédée par l’esprit du blanc… ». Mais plutôt que de se laisser accabler, elle a affronté ces étiquettes, brisé les chaînes du jugement et s’est emparée de sa vie.

L’écrivaine raconte aussi une anecdote marquante de son parcours, où un célèbre écrivain, Boubacar Boris Diop, l’a défiée. « Un jour, j’ai voulu arrêter d’écrire. Il m’a demandé si je continuais à écrire, et je lui ai répondu que non, que je ne me considérais pas comme une écrivaine. » Pourtant, ses livres avaient déjà fait le tour du monde. Lorsqu’il lui a posé la question sur ce qu’elle voulait faire de sa vie, Ken Bugul a évoqué des projets comme une galerie ou un restaurant. Sa réponse ? « Il fallait commencer par vendre du gombo. »

Surprise, elle se souvient : « Pour qui il se prend, celui-là ? Moi, vendre du gombo ? » Mais elle a compris, et ce défi l’a poussée à aller plus loin, à affronter ses propres doutes pour continuer d’écrire.

« Oui, la folie avance. Et moi avec », conclut-elle avec une détermination inébranlable, prouvant ainsi que même les plus durs défis peuvent être surmontés grâce à la foi en soi et à la résilience.

1 COMMENTAIRES
  • Avi

    Il y a des choses que des intellectuels prennent pour une dictature de la société mais ici par exemple, soigner son hygiène corporelle pour être plus présentable devant l’assistance ne peut être qu’une normalité qu’on s’impose à soit même si on veut vraiment participer à la civilisation.

    Nos ancêtres n’étaient pas bêtes du tout, ni archaïques comme le prétendent certains penseurs modernes, c’est leurs long vécus qui les a amenés à identifier et instaurer des normes sociales indispensables à la perpétuation de la communauté, et au vivre ensemble. Seulement, il y a des individus qui sortent du lot, et le récit de leurs parcours et expériences peut être instructif, mais ne doit en aucun cas être érigé en exemple pour les jeunes générations.

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