Aïssatou dieng, artiste plasticienne : « Au Sénégal, la culture se limite à la musique et la danse »

Aïssatou Dieng fait partie de cette race d’artistes qui sont nés et ont grandi avec la passion des formes et du beau. Elle a l’art dans la peau et ce, depuis sa tendre enfance. Dans cette interview qu’elle accordée à senego.com, elle parle de sa passion pour son métier, des difficultés de la pratique de ce métier au Sénégal et du manque de considération des autorités pour cet aspect fondamental de la culture.

Pouvez-vous nous relatez vos débuts dans ce métier ?

J’ai très tôt versé dans ce métier. Je dirai même qu’il a car déjà quand j’étais petite, je voyais des formes et des images sur les murs. Ainsi bien avant l’âge requis pour entrer à l’Ecole des arts, j’y étais admise comme auditrice. Au début cela n’agréait pas mes parents mais j’ai dû batailler ferme et à la fin j’ai réussi à les convaincre d’accepter ma passion. Depuis, j’ai continué dans cette voie avant d’intégrer formellement cette école où je suis sortie diplômée avec une spécialisation en environnement. Je fais de la décoration et des maquettes.

Est-il facile d’être une femme artiste au Sénégal ?

Non cela n’a pas été facile comme je l’ai dit plus haut. Mes parents ne pouvaient pas imaginer leur fille dans l’art qui véhiculait plusieurs clichés malsains avec les artistes et leurs styles jugés marginaux, la drogue, les dreadlocks etc…. Vu aussi que ma famille est très conservatrice, imaginez un peu que ce n’était pas trop facile. Mais on est obligé de faire avec toutes ces considérations et essayer d’avancer.

Le métier d’artiste, est-il facile à exercer au Sénégal ?

Les artistes sont en effet très fatigués dans notre pays. Nous sommes toujours stressés. Nous n’avons pas de salaires et il nous est très difficile de joindre les deux bouts. L’art ne nourrit pas son homme a-t-on coutume de dire. S’y ajoutent les difficultés économiques qui n’aident pas vraiment les populations à être portées sur l’art car un père de famille irait plutôt acheter un sac de riz qu’un tableau d’art. Mais dans la vie, il faut se battre. Allez chercher des marchés, proposer et convaincre les clients.

L’Etat, vous vient-il en aide ?

Pas du tout ! Là je suis formelle. Le département de la Culture sous la tutelle de laquelle nous sommes, a des priorités autres que l’art. Pour les autorités, l’art se limite à la musique et à la danse. Pour le département Culture, c’est la musique, la danse et l’art plastique vient après. Un musicien qui peut chanter le ministre ou un comédien qui va parler du ministre sera bien assisté et aidé mais comme nous ne sommes pas dans le registre de la laudation, nous ne comptons pas par eux. Quand nous avons une exposition, nous nous débrouillons seuls pour faire face aux dépenses. Nous sommes en quelque sorte les oubliés du système.

Et pourtant, on dit que le Chef de l’Etat est le Protecteur des Arts et des Lettres…

On le dit, je l’entends souvent mais je n’y crois pas. Parce que je ne sens pas sa main dans notre secteur. Vraiment je n’y crois sans pour autant aller au fond des choses… Vous savez, notre problème principal réside dans le fait que les medias aussi nous oublient. Il n’y a pratiquement pas de publicité autour de nous qui sommes constamment dans nos toiles, alors que ces dernières ne parlent pas. Je dirai aussi que notre pays ne dispose pas d’école d’Art car l’Ecole nationale des arts est logée dans des appartements. Notre pays doit avoir une école d’art digne de ce nom.

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