Xxe sommet extraordinaire de la Cedeao: Alassane Ouattara préoccupé par la situation sécuritaire au Sahel

Alassane Ouattara a pris part, le samedi 24 février 2024, au Sommet extraordinaire de la Communauté́ Économique Des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la situation sécuritaire et politique dans la sous-région. Le Président de la Côte d’Ivoire a interpellé sur les « défis inédits… sur notre capacité et celle de nos Institutions communautaires à consolider l’unité et les valeurs de notre Espace commun« .

Texte extenso :

Excellence Monsieur Bola Ahmed TINUBU, Président de la République Fédérale du Nigeria, Président en exercice de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la Communauté Économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO),

– Excellences Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats membres de la CEDEAO,
– Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO,
– Mesdames et Messieurs,

J’aimerais, à l’entame de mon propos, remercier le Président Bola Ahmed TINUBU pour l’accueil chaleureux ainsi que pour les excellentes facilités mises à la disposition de ma délégation et moi-même.

Je voudrais vous saluer, Monsieur le Président, pour l’initiative que vous avez prise de réunir notre Conférence, en ce moment de grande incertitude au sein de notre Communauté. En effet, notre région est confrontée à une situation sécuritaire et humanitaire préoccupante au Sahel et au-delà, ainsi qu’à une grave remise en cause de notre modèle d’unité et d’intégration économique et politique, à la suite de la demande de retrait de la CEDEAO, du Mali, du Burkina Faso et du Niger.

Ces défis inédits nous interpellent sur notre capacité et celle de nos Institutions communautaires à consolider l’unité et les valeurs de notre Espace commun. A ce propos, ma délégation prend note des rapports qui viennent d’être présentés, en particulier des conclusions et recommandations de la Session extraordinaire du Conseil de Médiation et de Sécurité (CMS) relatif au retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO, qui s’est tenue à Abuja, le 8 février 2024. Je voudrais d’ailleurs saisir cette occasion pour féliciter le Président du Conseil de Médiation et de Sécurité pour la qualité des délibérations et la pertinence des recommandations contenues dans ce rapport. En outre, ma délégation prend note du Mémorandum sur les impacts sociopolitiques des décisions de la CEDEAO suite au coup d’État au Niger, et salue la qualité de ce rapport.

Monsieur le Président,
Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement,
Mesdames et Messieurs,

Le retrait annoncé du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO intervient après le départ forcé et mouvementé des Forces internationales, la sortie unilatérale des accords de paix, les retards observés dans la mise en œuvre des chronogrammes de retour à l’ordre constitutionnel, supervisés par la CEDEAO, et la création subite d’un cadre alternatif d’intégration dénommé l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Ce retrait annoncé est lourd de conséquences pour notre modèle d’intégration et pour nos objectifs de développement économique et social.

A ce titre, mon pays regrette cette décision qui, si elle était maintenue, constituerait un sérieux recul dans notre ambition de bâtir une communauté économique stable et prospère, dans l’intérêt de nos peuples.

Au regard de cette perspective, nous devons œuvrer résolument pour ramener par le dialogue, les autorités maliennes, Burkinabè et nigériennes à reconsidérer leur position.

Dans ce contexte, je voudrais féliciter le Président Faure GNASSINGBE de la République Togolaise, pour toutes les initiatives qu’il a prises, en notre nom, et qui ont abouti entre autres, à la libération du fils du Président Mohamed BAZOUM. Nous devons lui réitérer notre confiance et l’encourager à persévérer, en collaboration avec les Présidents Patrice TALON du Bénin et Julius Maada BIO de la Sierra Leone, dans la mission qui leur a été confiée, lors de notre dernier sommet, le 10 décembre 2023.

A cet égard, je propose que la Troïka des Chefs d’État soit également mandatée par notre Conférence pour entamer des discussions avec le Mali, le Burkina Faso et le Niger, sur la question de leur maintien au sein de la Communauté. Toutefois, nous devons nous rendre à l’évidence que la tâche ne sera pas aisée, et que tous les cas de figure doivent être envisagés au terme de la période d’une année prévue à l’article 91 du Traité révisé de 1993. Dans ce contexte, la Commission de la CEDEAO devra mettre en place une task force technique pour examiner les différentes étapes et conditions d’un tel retrait.

Monsieur le Président,
Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Mesdames et Messieurs,

Mon pays est préoccupé par la situation humanitaire alarmante au Sahel, en particulier au Niger telle que présentée dans le Mémorandum de la Commission, sur l’impact Sociopolitique des décisions de notre Conférence depuis le putsch du 26 juillet 2023. Nous devons agir vite afin de soulager les populations nigériennes durement impactées. Dans cette perspective, mon pays prend note des recommandations formulées dans le Mémorandum mentionné ci-dessus, et soutient la levée à titre humanitaire, des mesures de fermeture des frontières et des sanctions commerciales, compte tenu de leur impact sur la population. Il s’agit plus précisément des mesures suivantes :

– La fermeture des frontières terrestres et aériennes entre le Niger et les pays de la CEDEAO ;
– L’interdiction de survol de l’espace aérien de la CEDEAO à tout aéronef commercial à destination ou en provenance du Niger ;
– La suspension des transactions commerciales et financières entre les pays de la CEDEAO et le Niger concernant les produits alimentaires, les médicaments, les produits pétroliers, l’électricité ainsi que les produits et services nécessaires aux activités autorisées.
– Le Gel des avoirs de la République du Niger dans les Banques Centrales de la CEDEAO ;
– Le Gel des avoirs de l’État du Niger ainsi que des entreprises publiques et parapubliques logés dans les banques commerciales.

Ces mesures constituent une avancée importante et un signe d’ouverture et de soutien au peuple nigérien. Elles pourraient en outre faciliter la réussite de la mission que nous avons confiée aux Présidents Faure GNASSINGBE, Patrice TALON et Julius Maada BIO.

Avant d’aller plus loin dans la levée des autres sanctions encore en vigueur, et conformément à l’esprit des décisions de notre Sommet du 10 décembre 2023, notre Conférence doit réitérer son appel à la libération immédiate du Président Mohamed BAZOUM et de ses proches et le retour à un ordre constitutionnel normal au Niger.

Excellences, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Mesdames, Messieurs

Ce Sommet décisif comme vous le savez, est également le dernier auquel participe notre frère Macky SALL, en qualité de Président de la République du Sénégal. Je voudrais devant notre Conférence réunie, et en ce moment de grande fraternité, rendre un hommage solennel au Président MackySall, homme d’Etat exceptionnel et démocrate sincère, dévoué à la cause de son pays et à la grandeur de l’Afrique. Tout au long de ces années, j’ai côtoyé un grand bâtisseur qui a su transformer son pays, et un homme d’idées qui a changé à bien des égards le regard porté sur l’Afrique. Macky, tu nous manqueras c’est certain, mais sache que notre œuvre commune continuera pour le bien de nos peuples.

Monsieur le Président,
Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement,
Mesdames et Messieurs,

Pour conclure, je voudrais réitérer la solidarité de mon pays avec les peuples frères du Mali, du Burkina Faso et du Niger, victimes de la violence des groupes armés terroristes et des régimes putschistes.

Par ailleurs, je voudrais réitérer mes remerciements au Président Bola Ahmed TINUBU pour l’initiative de cette importante rencontre ainsi que pour l’accueil chaleureux qui a été réservé à ma délégation et à moi-même.

Je vous remercie.

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