Les alarmants “faits alternatifs” du président Trump

Le nouveau président et son entourage ont soutenu des contre-vérités manifestes sur le nombre de personnes ayant assisté à son investiture le vendredi 20 janvier. Une proche conseillère a expliqué qu’il s’agissait de “faits alternatifs”. Des déclarations alarmantes, estiment plusieurs journaux américains.

Des “faits alternatifs”. C’est le nouveau concept invoqué à la télévision par une proche conseillère de Donald Trump, Kellyanne Conway, pour caractériser les affirmations fantaisistes du nouveau porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer, lors de son tout premier point de presse, le samedi 21 janvier. L’idée n’a pas rencontré le succès escompté : “Les faits alternatifs ne sont pas des faits ; ce sont des contre-vérités”, lui a répondu le présentateur de l’émission, Chuck Todd.

Sean Spicer a plutôt “menti de façon éhontée”, préfère dire une chroniqueuse du Washington Post. Le porte-parole avait soutenu que la foule présente à Washington le vendredi 20 janvier pour l’investiture de Donald Trump était “la plus large audience à avoir jamais assisté à une investiture – point final”. Les photos montrent pourtant que le rassemblement était de moindre ampleur que pour la première investiture de Barack Obama, le 20 janvier 2009.

Le président lui-même a avancé des chiffres évidemment faux (de 1 à 1,5 million de personnes) lors d’une visite à la CIA le samedi 21 janvier, tout en accusant les chaînes de télévision d’avoir menti sur le nombre de personnes présentes (qui a été estimé à 250 000) et d’avoir montré “un terrain vide” dans leurs photos du Mall, l’esplanade centrale de Washington, où la foule était rassemblée. Trump a carrément lancé :

« Je suis engagé dans une guerre contre les médias. Ce sont les êtres humains les plus malhonnêtes sur Terre, pas vrai ? »
Une stratégie dangereuse

En somme, constate The Boston Globe dans un éditorial, le nouveau gouvernement a cherché à “construire une réalité alternative” sur cet événement – ce que le journal juge “alarmant”. Bien sûr, rappelle le quotidien, cette réponse de l’équipe Trump s’inscrit dans la droite ligne de la campagne, où de nombreuses informations bidon et contre-vérités manifestes ont circulé, souvent lancées ou relayées par les partisans de Trump, voire par son entourage ou par le candidat lui-même. Dans “l’univers alternatif” où vivent de nombreux supporters de Trump, estime le quotidien, toute information embarrassante pour le milliardaire est une fiction fabriquée de toutes pièces par des médias biaisés.

La presse américaine est néanmoins choquée de voir le nouveau président, son équipe et le porte-parole de la Maison-Blanche reprendre la même stratégie, aussi ouvertement et avec une telle agressivité. Dans des domaines aussi sensibles que le renseignement ou la politique étrangère, les “faits alternatifs” pourraient mettre des vies en danger, estiment de hauts responsables interrogés par Politico. Le chef d’État américain n’est pas vraiment en guerre contre les médias, estime toutefois un journaliste du site Vox. “Sa vraie guerre est contre les faits”, rien de moins.

Prise de conscience

Pour la chroniqueuse du Washington Post précédemment citée, les premières déclarations du porte-parole de la Maison-Blanche doivent conduire les médias à une prise de conscience. Les journalistes ne doivent plus se fonder sur la parole officielle émanant de ces points de presse. Comme l’a dit une journaliste de ProPublica, citée par le Post : “Les journalistes n’auront pas de réponse de Sean Spicer. Nous aurons des réponses en fouillant. En mettant les mains dans le cambouis. Alors allons-y tous.

Avec courrierinternational.com

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