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« La décrue de la démocratie et l’apogée de la gouvernance orageuse », Par Babacar Justin Ndiaye

« La décrue de la démocratie et l’apogée de la gouvernance orageuse », Par Babacar Justin Ndiaye

Jusqu’au seuil du week-end, le Mali caracolait en tête des sujets retenus par et pour le présent Laser. L’heure est, en effet, grave chez le voisin de l’Est qu’on scinde méthodiquement en deux Etats ou ersatz d’Etats. La France planifie la scission et la MINUSMA, totalement instrumentalisée, l’exécute.

Le scénario est un chef d’œuvre d’amputation territoriale, programmé en douceur mais bloqué (provisoirement) dans la douleur par les jeunes patriotes et martyrs de Gao. Comme en témoigne Hama Ag Mahmoud, successivement ministre du Plan du Président Moussa Traoré, Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie, ministre des Relations Extérieures du Gouvernement Transitoire de l’Azawad et chef de l’Etat (artificiel) anciennement mis en place par le MNLA. Avec bureaux à Nouakchott. Brouillé avec le parrain français, Hama Ag Mahmoud a accordé une interview ruisselante d’exclusivités au journal « Le Courrier du Sahara ».

Hélas, les craquements de la démocratie, au Sénégal, ponctués par les boum-boum des grenades lacrymogènes, à la place de l’Obélisque, ont changé le cap thématique initialement pris par le présent Laser. Kidal ou Colobane ? Le choix a vite cessé d’être cornélien ; puisque le reliquat du nationalisme légué par Modibo Keita, a momentanément fait échec à l’Accord pour l’Etablissement d’une Zone Temporaire de Sécurité.

Ce « machin » co-signé par le MNLA et l’ONU, est introuvable dans les Accords de Ouagadougou et non envisagé par les pourparlers d’Alger. Il s’agit d’une bizarre trouvaille du Général français Christian Thibaut, Chef d’Etat-major et Comchef par intérim de la MINUSMA. La création d’une telle zone-tampon dans le Nord-Mali équivaut, aux yeux des citoyens du pays, à l’érection d’une frontière entre le Mali et l’Azawad. D’où la température politique qui grimpe à Gao et à Bamako.

A Dakar, le thermomètre est en voie d’être cassé. La soudaine décrue de la démocratie a fait tristement le lit d’une violence politique très consternante. Comment une démocratie, jusque-là adulte, a subitement installé le personnel politique au carrefour des puérilités et des périls ?

Entre les motifs des manifestations, les interdictions administratives et les failles sur les documents signalées par le Préfet, il y a bel et bien un espace où l’esprit civique et la sincérité démocratique peuvent faire une salutaire jonction. A condition que la haine, la peur, la ruse et la cécité tous azimuts (toutes également sources de bêtises politiques) ne tiennent le haut du pavé.

Aujourd’hui, le degré zéro de la politique et le plafond des turbulences de même nature, sont en voie d’être atteints, au grand dam de la majorité (calme et silencieuse) de Sénégalais plus sages que les bruyants et agités leaders politiques progressivement abonnés à l’affrontement.
Dans l’épreuve de force en cours, le Président de la république, chef de l’Etat et – malheureusement – chef de Parti, a une part de responsabilité, sans commune mesure, avec celle des autres. Le Président Macky Sall est accablé par un évènement puis rattrapé par une déclaration.

Il ne peut pas aller, outre-Méditerranée, manifester pour des causes très aériennes, et interdire, sur les rives du Fleuve Sénégal, une manifestation, pour des motifs à l’échelle des préoccupations citoyennes. Cela veut dire que le Gardien de la Constitution du Sénégal a plus de respect pour les Constitutions européennes qui consacrent les libertés que celle, tout aussi démocratique, dont il est le Protecteur.

On convoque ici la cohérence qui est, dans certaines situations, un facteur de crédibilité. Car, un antécédent peut bien faire jurisprudence. C’est pourquoi l’homme d’Etat, avant de prendre une décision – aller ou ne pas aller à Paris – balaye en amont les faits déjà enregistrés et scrute en aval, les retombées des actes ultérieurs.

Avant Paris, il y a eu Terrou-bi où le Président de la république, hôte à déjeuner d’une partie de la presse nationale, a déclaré, sur un ton badin, qu’après le sommet de la Francophonie, les marcheurs pourront marcher jusqu’à Diamniadio. Faut-il rappeler que les propos d’un chef d’Etat sont dignes de foi, jusqu’à la preuve du contraire ? Au demeurant, le déficit de silence et l’excédent de discours constituent le talon d’Achille de Macky Sall ; en tant que vecteurs de tous les contretemps, de toutes les contradictions et de tous les orages qui secouent la gouvernance du pays.

L’exemple du mandat est éloquent et contrariant à cet égard. Le mutisme présidentiel aurait mis le pays à l’abri de deux imminentes consultations dont l’une passera par des controverses politiques et, surtout, des contorsions juridiques fort délicates.

Même si Abdoulaye Wade exprime des motifs clairs (libertés d’expression et de marche) et avoue des motifs sous-jacents (pressions sur la justice via les politiques), il gagne la bataille de l’opinion qui n’est pas libérale, loin s’en faut, mais reste très attachée aux droits spécifiquement consacrés par la Constitution de janvier 2001, plébiscitée par voie référendaire, et par ce peuple au nom de qui Macky Sall gouverne, et à qui il destine les bienfaits du PSE.

Comme on le voit, tout se tient et tout doit être conséquent. La défense des principes démocratiques n’est pas incompatible avec un vigilant décryptage des intentions, finalement peu secrètes, d’Abdoulaye Wade. Par ailleurs, la solution politiquement intelligente, démocratiquement satisfaisante et constitutionnellement correcte consiste à autoriser une marche sur cinq dûment déclarées auprès de l’autorité. D’autant que les populations seront les premières à se dresser contre des manifestations perlées qui s’échelonneront et échelonneront des perturbations sur une ou deux semaines.

Avant-hier, samedi, la gouvernance sagace a cédé la place à la gouvernance bornée, myope, nerveuse et orageuse. La ruse d’Etat et la répression policière ont été combinées. D’abord, le Préfet de Dakar interdit, sans explications, le rassemblement du vendredi. Peu de temps après, il sort de son silence, en signalant des failles dans le document déposé par le PDS et ses alliés.

Certes, la vocation du Préfet n’est pas de conseiller l’opposition, mais rien ne l’empêche de demander un complément d’informations, si le lieu du meeting est omis par inadvertance ou mal nommé : place de l’obélisque ou place de la nation. Ensuite, la Police déploie une armada fortement dissuasive. C’est l’apogée d’une gouvernance orageuse qui balafre l’image du Sénégal.

Le panorama pré-chaotique doit tirer les élites de la torpeur coupable. Par-delà Macky Sall, Abdoulaye Wade et autre Karim Wade, il y a la démocratie et l’Etat de droit qui ont foncièrement assuré le bonheur des Sénégalais davantage que les Plans d’Ajustement Structurel (PAS) du Président Abdou Diouf, la GOANA du Président Abdoulaye Wade et le présent PSE du Président Macky Sall. Ce n’est point un hasard, si les institutions étatiques solidement léguées par Léopold Sédar Senghor ont survécu au « miracle économique » gratifié à la Côte d’Ivoire, par Félix-Houphouët Boigny.

Il revient donc au quatrième Président du Sénégal indépendant, en l’occurrence Macky Sall, de veiller sur des acquis historiques que maints pays africains et non africains admirent et/ou envient au pays de a Téranga. Evitons toute confusion ! Défendre âprement la Constitution, garante des libertés, ce n’est pas défendre les desseins de Maitre Wade. C’est strictement être digne de notre Histoire.

Sans les manifestations courageusement organisées par Majmouth Diop (Saint-Louis), sans les marches bravement conduites par les téméraires cadres du PRA (Amadou Makhtar Mbow, Assane Seck et autre Djaraf Diouf), sur les Allées du centenaire, sans les épreuves physiques et morales stoïquement endurées par Cheikh Anta Diop et Abdoulaye Wade, Macky Sall ne serait pas, aujourd’hui, le locataire du Palais présidentiel. L’hégémonie socialiste aurait constitué une indestructible chape de plomb.

Mieux, Macky Sall est la parfaite illustration de la vitalité d’une démocratie à mettre à l’abri de toute décrue. En effet, son parcours extrêmement méritant et remarquable, gonfle d’espoir les futures générations. Car, sans les vertus de nos Constitutions successives, en 55 ans d’indépendance, le jeune et modeste fatickois ne gouvernerait pas le Sénégal, avant Famara Ibrahima Sagna (grosse fortune dès les années 60-70) ou Abdoul Mbaye, un produit de HEC né avec une cuillère d’or dans la bouche.

Dans l’attente d’un sursaut de lucidité ou d’un regain de pondération, les observateurs notent, avec tristesse, une escalade fulgurante et inquiétante qui invite, sans hésitations, le loup militaire dans la bergerie politique. De prime abord, le péril militaire est surréaliste, mais les fameux « mémoires » du Président Abdou Diouf qui dévoilent une tentative de coup d’Etat militaire et dissimulent d’autres, prouvent que dans la vie des nations situées dans l’Hémisphère Sud, aucun acquis n’est irréversible. Décidément, la démocratie n’est- pas une question d’apparat juridique (textes à gogo) mais d’attitude sincère. C’est-à-dire un problème d’homme. La démocratie est un peu dans les textes et beaucoup dans les têtes.
dakaractu

1 COMMENTAIRES
  • Yaguexam

    Sérieusement mon gars tu parles trop! Il s’y ajoute que tes références nous ennuient.
    Un peu de silence et laisse les autres parler plus simple – parlée sénégalais quoi.
    Merci de comprendre que parler ne veut pas dire être entendu!

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