Diomaye–Sonko : entre espoirs de rupture et critiques précoces, quelle voie pour un Sénégal en transition ?

Diomaye–Sonko : entre espoirs de rupture et critiques précoces, quelle voie pour un Sénégal en transition ?

L’élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence du Sénégal et la  nomination d’Ousmane Sonko comme Premier ministre ont marqué un  tournant majeur dans l’histoire politique récente du pays.  

Ce tandem, porté par une aspiration populaire à la rupture, incarne une  nouvelle génération politique, perçue comme l’antithèse du « système ».  Mais quelques mois à peine après leur installation, les critiques fusent, les  impatiences montent, et l’espoir semble parfois vaciller.  

Faut-il y voir les premiers signes d’un désenchantement, ou plutôt les  inévitables secousses d’un changement de cap profond dans un État  marqué par des inerties structurelles ?  

Un duo sous le feu des critiques  

Dès les premiers mois, les reproches n’ont pas tardé. Absence de résultats  concrets, gestion administrative jugée brouillonne, promesses de rupture ralenties par les réalités du pouvoir. Le président Faye est décrit comme  discret, parfois effacé, tandis que Sonko concentre l’attention, le pouvoir et  les critiques. Cette configuration, où la Primature semble parfois éclipser la  Présidence, interroge la clarté des rôles institutionnels et la stabilité du  leadership.  

Certaines accusations sont plus virulentes. On parle de manque d’efficacité  dans la conduite des affaires publiques, d’un discours populiste qui peine à  se traduire en politique publique, voire d’arrogance. Ces critiques, souvent  relayées par des figures de l’ancien régime, s’appuient sur des attentes  légitimement élevées, mais oublient parfois que toute réforme réelle  s’inscrit dans le temps long.  

L’impact sur la gouvernance et l’image du Sénégal  

Le risque est bien réel : voir le souffle populaire qui a porté le duo au  pouvoir s’essouffler face à des résultats qui tardent. L’effet d’entraînement  sur la jeunesse, la confiance des partenaires internationaux et la dynamique  d’investissement dépendront de la capacité du gouvernement à rassurer,  structurer et produire des résultats tangibles.  

L’image d’un pouvoir bicéphale mal articulé ou d’un gouvernement hésitant  pourrait freiner les ambitions du Sénégal sur la scène africaine et  internationale, dans un contexte géopolitique où clarté, stabilité et vision  stratégique sont des atouts précieux.  

Prendre le temps du changement, sans perdre celui de la confiance  

Il serait injuste d’ignorer les contraintes systémiques qui freinent toute  réforme : lenteur de l’appareil d’État, inertie des élites administratives,  habitudes enracinées dans une culture de gestion opaque et peu efficace.  Le duo hérite aussi d’un passif politique lourd, marqué par une dette  publique considérable, probablement sous-estimée ou dissimulée par  l’ancien régime, ce qui limite considérablement les marges de manœuvre  budgétaires.  

Changer les pratiques et rompre avec les logiques clientélistes prend du  temps, d’autant plus lorsque les résistances internes sont fortes et que les  acteurs du changement doivent faire leurs preuves dans un système encore  dominé par les anciens réflexes.  

Mais les critiques, parfois légitimes, sont aussi précipitées. On exige des  résultats immédiats, oubliant que les plus grandes transformations exigent  du temps, de la méthode et une stratégie d’ancrage solide. Ce  gouvernement n’a pas seulement hérité d’un pays à gouverner, il doit reconstruire la confiance institutionnelle, réorganiser les priorités nationales  et réconcilier les promesses électorales avec les contraintes de la réalité.  

Repenser la mobilisation des forces vives, notamment la diaspora  

Face à l’ampleur des défis, il devient impératif de mobiliser toute l’expertise  nationale, sans exclusive ni réflexe partisan. Et dans cette perspective, la  diaspora sénégalaise représente une ressource stratégique sous-exploitée.  Sa richesse intellectuelle, son expérience internationale, sa distance critique  par rapport aux pratiques de l’ancien régime font d’elle un levier puissant  de transformation.  

Ces Sénégalais de l’étranger, porteurs d’autres cultures de gestion, peuvent  contribuer à réinventer l’action publique, insuffler des méthodes nouvelles  et participer à la refondation de l’État, à condition d’être réellement  intégrés aux processus de décision et de mise en œuvre.  

Un engagement personnel pour la confiance et l’avenir  

En tant qu’observateur engagé et acteur du développement, je renouvelle  personnellement ma confiance en ce duo qui incarne l’espoir de tout un  peuple. Je crois en leur sincérité, en leur volonté de rupture et en leur  capacité à faire émerger un Sénégal nouveau. Ce moment exige patience,  vigilance mais aussi engagement.  

J’en appelle à mes concitoyens, et particulièrement à la jeunesse, à soutenir  cet élan. Non pas par suivisme ou par opportunisme mais par  responsabilité collective. Le changement ne se décrète pas, il se construit,  ensemble.  

Conclusion  

Le Sénégal vit un moment rare, où l’histoire ouvre une brèche pour le  changement. Le duo Diomaye–Sonko, malgré les critiques et les  maladresses, porte cette promesse. Mais l’espoir populaire ne se satisfait  pas de symboles : il attend des actes, une vision claire et des résultats. Le  temps de l’excuse touche à sa fin ; vient désormais celui du cap, du  courage et de la construction.  

Amar Thioune  

Consultant en gouvernance et développement stratégique 

3 COMMENTAIRES
  • Ados

    Accélérez la cadence! Trop de lenteur sur les réformes.
    – AGRO-INDUSTRIALISATION EN OUTRANCE: pour créer massivement des emplois pour les jeunes, pas d’autres issues dans le court et moyen terme.
    – RÉFORME ET AUMENTATION DE L’ASSIETTE FISCALE: pour diminuer l’endettement.

  • Alioune Toure

    LES CHIENS ABOIENT LA CARAVANE PASSE.

    • kinebadji

      Si les chiens aboient, c’est parce que la caravane est conduite par des menteurs

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