Barrick Mining au Mali : La justice place la mine d’or sous administration provisoire pour six mois

Le tribunal de commerce de Bamako a placé lundi la plus grande mine d’or du Mali sous administration provisoire pour six mois. Cette décision fait suite à un bras de fer entre l’État malien et le géant canadien Barrick Mining, propriétaire à 80% de la mine de Loulo-Gounkoto, située dans l’ouest du pays. La junte au pouvoir a sollicité cette mesure afin de relancer les activités d’extraction, interrompues depuis janvier sur ce site, l’un des plus importants gisements aurifères au monde. Le Mali détient les 20% restants de la mine.
Zoumana Makadji, nommé administrateur provisoire, aura pour mission de « rouvrir la mine dans les plus brefs délais », a déclaré un magistrat du tribunal de commerce à l’AFP. Barrick Mining a confirmé la perte de son « contrôle opérationnel » et a rappelé avoir engagé une procédure d’arbitrage auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) à Washington. Une source représentant l’État malien a indiqué que cette mesure vise à « protéger les intérêts économiques nationaux » et à éviter une « fermeture brutale de la mine » sans accord révisé. Le magistrat a précisé : « Au bout de six mois, le juge constatera l’évolution des négociations et/ou d’un accord et avisera ».
Barrick Mining avait déclaré avoir été « contrainte » d’arrêter ses opérations à Loulo-Gounkoto après la saisie de trois tonnes d’or par des soldats le 11 janvier. L’entreprise a rappelé que la junte empêchait déjà l’exportation d’or du site et que quatre employés maliens sont détenus depuis novembre. Ces actions « injustifiées » ont conduit à la suspension temporaire des opérations, mais Barrick affirme vouloir trouver une « solution constructive et mutuellement acceptable ».
Au nom de la souveraineté économique, le Mali a réformé son code minier en 2024 et réclame des centaines de millions de dollars d’arriérés d’impôts à Barrick. La junte, arrivée au pouvoir par la force en 2020, souhaite une plus grande part des revenus des activités extractives. Les services fiscaux maliens ont fermé les bureaux de Barrick à Bamako en avril pour « non-paiement d’impôts ». Barrick a déclaré avoir versé 85 millions de dollars à l’État malien en octobre « dans le cadre des négociations ». Le 8 mai, le gouvernement malien avait déposé une requête pour une administration provisoire de Loulo-Gounkoto. Une source proche de Barrick a expliqué : « Depuis 2024, l’État est en conflit avec les majors de l’or au Mali. Barrick, comme les autres, est accusée d’avoir ouvert des comptes offshores, ce que la législation permet. » L’or représente un quart du budget national du Mali, l’un des pays les plus pauvres au monde, dirigé par des militaires depuis deux coups d’État en 2020 et 2021. La junte a fait de la lutte contre la corruption et de la souveraineté sur les ressources naturelles ses priorités.
Selon Sud Quotidien, cette situation met en lumière les tensions entre l’État malien et les compagnies minières étrangères.