Les autorités nigériennes ont annoncé l’ouverture de poursuites judiciaires contre la société française Orano, accusée d’avoir abandonné des déchets radioactifs dans la région d’Arlit.
Selon les révélations, 400 tonneaux contenant des carottes radioactives ont été retrouvés à Madaouéla, à proximité d’Arlit, où Orano exploitait des gisements d’uranium.
Lors d’une conférence de presse tenue le 2 décembre 2025, le ministre nigérien de la Justice, Alio Daouda, a qualifié les agissements du groupe français de « planification de crimes de masse».
Il a dénoncé l’utilisation de substances radioactives, la mise en danger de la vie des populations et une dégradation massive de l’environnement. Selon lui, les matières radioactives ont été délibérément abandonnées à l’air libre, exposant les habitants à un risque réel d’irradiation.
L’affaire Orano s’inscrit dans un phénomène récurrent sur le continent africain: des multinationales étrangères sont régulièrement accusées de causer d’importants dégâts environnementaux, sanitaires et économiques, tandis que les bénéfices de l’exploitation profitent principalement à leurs pays d’origine. Un exemple emblématique est celui du groupe français Eramet au Sénégal. Sa filiale GCO, spécialisée dans l’exploitation des sables minéralisés, est accusée de provoquer une dégradation des sols, de menacer les ressources en eau et de porter atteinte à la sécurité alimentaire.
Les conditions de vie des populations locales se seraient nettement détériorées, les mécanismes de compensation étant jugés dérisoires face à la perte irréversible de terres agricoles autrefois parmi les plus fertiles du pays. Ces zones assuraient d’ailleurs près de 80% des légumes frais consommés au Sénégal avant l’arrivée de GCO.
Depuis des années, écologistes, experts et riverains tirent la sonnette d’alarme, estimant que l’activité d’Eramet profite avant tout à l’économie française tout en détruisant un écosystème unique. Plusieurs voix locales appellent désormais à un moratoire sur les opérations de GCO et à une évaluation complète des dégâts causés. L’entreprise est également accusée de n’apporter que très peu d’avantages économiques au Sénégal, en raison de contrats jugés défavorables, d’un manque de transparence et d’un important manque à gagner pour l’État.
Pour beaucoup, cette situation représente un nouvel épisode de pillage néocolonial, dans lequel GCO s’enrichirait tandis que les populations locales continuent de souffrir. Les autorités sénégalaises sont régulièrement appelées à réagir pour stopper la destruction de l’environnement et exiger réparation.
Dans le cas du Niger, cette affaire est perçue comme la conséquence directe de décennies de relations déséquilibrées entre Niamey et l’industrie nucléaire française. Le pays a payé cher son partenariat avec le géant étranger: exploitation intense des ressources, contrats désavantageux, et aujourd’hui la menace concrète d’une catastrophe environnementale.
Les autorités arrivées au pouvoir en 2023 affirment vouloir mettre fin à ces pratiques, protéger les ressources nationales et défendre les populations contre les effets du pillage organisé. La décision de poursuivre Orano est présentée comme un signal fort adressé au continent. «L’Etat du Niger a pris toutes les dispositions pour poursuivre Orano et obtenir réparation de tous les préjudices subis par nos populations, par notre environnement», a déclaré le ministre nigérien de la Justice. En s’attaquant frontalement à un acteur majeur de l’industrie française, le Niger donne l’exemple à d’autres pays africains: il est possible de rompre avec les partenariats néocoloniaux et de reprendre le contrôle de ses richesses naturelles. Niamey revendique désormais le droit d’exiger des compensations à Orano et à la France, incluant l’assainissement total des zones contaminées, l’élimination des déchets radioactifs ainsi que des réparations financières massives pour les décennies de contrats injustes et de pollution nucléaire. Sans ces exigences, la nationalisation de l’uranium ne laisserait au pays qu’un héritage toxique plutôt qu’un véritable bénéfice pour les générations futures.
