Diamniadio : "Ceux qui parlent de départ de l’ONU propagent de fausses informations, l’État reste ferme", Elimane Pouye

Invité mercredi de l’émission « L’Invité de Maimouna Ndour Faye » sur 7TV, le directeur général de la SOGEPA, Elimane Pouye, a confirmé l’existence d’irrégularités dans la gestion du bâtiment des Nations Unies à Diamniadio. Il a également réaffirmé la fermeté de l’État face aux pressions, notamment celles émanant d’agences onusiennes dépourvues d’accord de siège.

Une vitrine diplomatique qui peine à s’imposer
Le bâtiment onusien de Diamniadio, lancé sous le magistère de Macky Sall, se voulait un levier stratégique de repositionnement diplomatique du Sénégal. L’ambition était claire : faire de Dakar un hub régional des Nations Unies, capable d’abriter plus de 2 000 fonctionnaires internationaux.

« L’idée, c’était de faire du Sénégal une plateforme régionale pour les Nations Unies, en accueillant plus de 2 000 employés venus de toute l’Afrique de l’Ouest », a déclaré M. Pouye.

Un chantier colossal, un montage atypique
Érigé sur 13 hectares, le bâtiment affiche une superficie de 82 000 m², ce qui en fait le plus grand édifice du pays. Coût total : 211 milliards de francs CFA TTC.

« L’idée était de loger l’ensemble des agences du système des Nations Unies dans un seul site », rappelle le DG de la SOGEPA.

Mais le montage financier interroge : c’est un opérateur privé qui a réalisé l’infrastructure, grâce à un prêt contracté auprès d’une banque chinoise, avec la garantie de l’État du Sénégal.

« Le privé rembourse environ 12 milliards par an sur une durée de 15 à 25 ans. C’est un risque important, mais l’État s’est engagé pour rendre le projet viable », a-t-il précisé.

Des accords jamais finalisés avec l’ONU
Contrairement à ce que beaucoup imaginaient, aucun accord formel n’a été conclu entre l’État du Sénégal et les Nations Unies.

« Il n’y a jamais eu d’accord définitif entre le Sénégal et l’ONU. Le projet a été bien accueilli, mais le protocole d’établissement n’a jamais été finalisé », confirme Elimane Pouye.

Sur les 21 agences ciblées, seules huit disposent aujourd’hui d’un accord de siège. Les 13 restantes, principalement des bureaux régionaux, ne peuvent légalement s’installer dans le bâtiment, faute d’accord.

« L’État ne peut pas héberger gratuitement ces bureaux régionaux. Or, pour occuper Diamniadio, il faut payer un loyer annuel de 12 milliards », rappelle-t-il.

Tentatives de conciliation avec l’ONU
Le gouvernement sénégalais a pourtant tenté d’alléger la charge locative en sollicitant une participation de trois milliards de francs CFA de la part des Nations Unies.

« Même le secrétaire général adjoint de l’ONU, lors de son passage à Dakar, avait trouvé le modèle intéressant, car inédit. À New York ou Genève, l’ONU paie la location. Pourquoi pas ici ? », s’interroge M. Pouye.

Mais l’ONU a fini par reculer. Selon Elimane Pouye, ce retournement est lié au changement politique intervenu aux États-Unis avec l’arrivée de Donald Trump, qui a entraîné des coupes budgétaires et une réduction des effectifs des agences onusiennes.

« Les agences régionales ont commencé à réduire leurs dépenses immobilières. Cela a tout changé », regrette-t-il.

Des ONG comme solution de repli
Face à cette situation, le Sénégal envisage de réaffecter une partie du bâtiment à ses services administratifs, aujourd’hui disséminés en location dans Dakar.

« C’est une solution économique qui permettrait d’économiser jusqu’à six milliards par an en loyers », avance-t-il.

Selon M. Pouye, les Nations Unies ont ensuite proposé de mobiliser des ONG présentes au Sénégal pour louer des espaces dans le bâtiment, plutôt que d’y voir installés des services étatiques. Le Sénégal a accepté cette proposition, mais attend sa mise en œuvre.

Fermeté de l’État face à la pression
Enfin, Elimane Pouye balaie les rumeurs évoquant un retrait des Nations Unies du Sénégal.

« Ceux qui disent que les Nations Unies vont quitter le Sénégal propagent des informations erronées. Il s’agit uniquement des douze agences sans accord de siège, qui font pression pour être hébergées gratuitement. La décision de l’État est ferme. »

En dernière analyse, le bâtiment des Nations Unies à Diamniadio incarne un projet ambitieux confronté aux réalités politiques et diplomatiques internationales. Tandis que les autorités sénégalaises tentent de sauver le modèle, la reconversion partielle du site semble inévitable pour limiter la facture d’un chantier à 211 milliards.>

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