Walf Tv : Le ministre de la communication est-il habilité à couper le signal ?

En application de l’article 94 de la loi n°2017-27 du 13 juillet, le ministre de la communication, des Télécommunication, de l’économie numérique, Moussa Bocar Thiam, a annoncé la suspension des programmes du groupes Wal fadjri pour une durée de 30 jours. Une première dans l’histoire du Sénégal de voir un ministre s’arroger de ces pouvoirs réputés dévolus au Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra). De quoi susciter l’indignation de toute une corporation, qui dénonce un abus de pouvoir. Qu’en est-il ?

D’abord, une lecture minutieuse de l’article, 94 du Code de la presse laisse constater que le ministre n’a pas visé la bonne disposition. En effet, le dit article ne fait que prévoir la nécessité d’une autorisation du ministre de la communication avant le démarrage de toute activité de communication audiovisuelle. Mais, elle n’autorise pas la suspension. « L’exercice de toute activité d’édition, de distribution et de diffusion de
services de communication audiovisuelle quelle que soit la technologie utilisée, est subordonné à une autorisation délivrée par le Ministre chargé de la Communication, après avis conforme de l’organe de régulation, dans les conditions définies par le présent Code
« , prévoit l’alinéa 1 du texte.

Quel article autorise donc la coupure d’un signal TV dans le Code de la presse ?

C’est l’article 210 du Code de la presse autorise la coupure d’un signal en cas de manquement aux obligations prévu dans le Code, ainsi que par les conventions et cahiers des charges. Et d’après ce texte, seul le CNRA est habilité à exercer ce pouvoir après observations ou une mise en demeure aux contrevenants, rendue publique.

Ces deux articles n’autorisent donc en aucun cas un ministre à suspendre un signal, l’abus d’autorité de Moussa Bocar Thiam est donc manifeste.

Il faut aussi noter que la suspension d’un signal peut être faite par une autorité administrative compétente (Gouverneur, Préfet ou Sous-préfet), mais seulement « pour prévenir ou faire cesser une atteinte à la sécurité de l’État, à l’intégrité territoriale, ou en cas d’incitation à la haine ou d’appel au meurtre », selon l’article 192 du Code de la presse.

Le ministre est donc exclu dans toutes ces hypothèses, il y a de fortes probabilités pour Walf de gagner la bataille judiciaire, enclenchée ce mardi devant la cour suprême.

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