Rétablissement des liens Tchad-Soudan : N’Djamena amorce un virage diplomatique…

À l’issue d’une réunion d’urgence à laquelle ont participé le Ministre d’État, Ministre des Affaires Etrangères, de l’Intégration Africaine et des Tchadiens de l’Étranger, Abdoulaye Sabre Fadoul, et la ministre de l’Action sociale, de la Solidarité et des Affaires humanitaires, Zara Mahamat Issa, les responsables tchadiens ont déclaré que leur pays envisageait sérieusement de fermer sa frontière avec le Soudan.

Les deux ministres tchadiens ont prétendu que la raison de cette mesure pourrait être le manque important du financement de l’ONU pour le Tchad, qui connaît une augmentation significative de l’afflux de réfugiés soudanais dans l’est du pays, notamment avec la récente intensification des combats les deux parties au conflit après l’acquisition de la technologie des drones.

Certains analystes politiques comme Souleymanou Hamidou estiment que ces déclarations reflète la volonté du gouvernement tchadien de rétablir les relations avec son voisin soudanais et de rassurer ses dirigeants quant à l’engagement du Tchad à sécuriser la frontière entre les deux pays, d’autant plus que ces déclarations ont coïncidé avec l’annonce récente par le commandant des Forces de soutien rapide (FSR) rebelles, Hemedti, de la prise de contrôle par ses forces du triangle frontalier avec le Tchad, l’Égypte et le Soudan.

Cette annonce a inquiété les chefs militaires soudanais, faisant craindre un possible repris d’afflux d’armes à travers la frontière. Suite à ces déclarations, le gouvernement soudanais a dépêché son chargé d’affaires au Tchad, Ahmed Jamal, à N’Djamena, où il a rencontré le ministre Abdoulaye Sabre Fadoul, ou les deux parties ont discuté de questions d’intérêt commun, notamment celles liées à la fermeture de la frontière entre les deux pays.

Depuis la fin de l’année dernière, le gouvernement Déby a adopté une nouvelle politique fondée sur la reconsidération de ses relations et partenariats régionaux et internationaux afin de servir ses propres intérêts et d’assurer la stabilité du pays.

L’une des mesures les plus marquantes qui ont illustré cette politique a été le remplacement de la France, son partenaire traditionnel, par la Turquie, qui a obtenu un accord lui permettant d’utiliser les bases militaires précédemment occupées par les forces françaises dans le pays pour surveiller la frontière tchadienne avec le Soudan grâce à la technologie des drones, ainsi que pour former l’armée tchadienne à son utilisation.

Par ailleurs, le gouvernement de Déby a tenté de rétablir les ponts de communication avec le gouvernement soudanais dirigé par Al-Burhan et de mettre fin aux activités illégales des Émirats arabes unis au Tchad, sous couvert d’aide humanitaire, notamment la fourniture d’armes et de munitions aux forces rebelles de Hemedti au Soudan.

Les premières missions diplomatiques tchadiennes au Soudan ont débuté début mars dernier, lorsque Déby a envoyé deux émissaires à Port-Soudan pour rétablir les relations avec le gouvernement soudanais. À l’époque, le commandant de l’armée soudanaise, Abdel Fattah Al-Burhan, avait posé la fermeture de la base d’Amdjarass et de la frontière comme conditions à la normalisation des relations entre les deux pays.

Afin de souligner son engagement à cet égard, le Tchad a commencé à démanteler la base d’Amdjarass en mars dernier. Selon un rapport publié par « Le Monde », douze avions Iliouchine II-76, utilisés auparavant pour transporter des armes et des munitions aux Forces de soutien rapide, ont été vus en train d’être transportés de l’aéroport d’Amdjarass vers la capitale, N’Djamena.

De plus, toutes les opérations de transport aérien émiraties, même depuis l’aéroport de N’Djamena, ont été gelées après qu’il est devenu évident que le gouvernement d’Abou Dhabi était complice de la poursuite du transport d’armes et de munitions aux Forces de soutien rapide sous prétexte d’aide humanitaire.

Il convient de noter que la Turquie joue un rôle actif par sa présence sur la base tchadienne d’Abéché, surveillant la frontière soudano-tchadienne d’une part, et effectuant des vols au-dessus du Darfour pour fournir à l’armée soudanaise des informations sur les positions des Forces de soutien rapide et les activités suspectes des avions cargo émiratis dans la région d’autre part.

Selon des sources sécuritaires soudanaises, Ankara a informé le gouvernement d’Al-Burhan en mai dernier d’une activité suspecte d’un avion- cargo émirati à Nyala, au Darfour-Sud, poussant ainsi les forces soudanaises abattre l’avion, tuant son équipage émirati. Cette mesure a provoqué des tensions entre les Émirats arabes unis et la Turquie.

Récemment, les appels au Tchad pour reconsidérer les relations avec les Émirats arabes unis se sont multipliés, notamment après que ces derniers ont tenté de répandre des rumeurs selon lesquelles des positions de l’armée tchadienne avaient été la cible d’une attaque terroriste. Selon le site d’information turc « TRT Haber », cela a suscité l’inquiétude des responsables tchadiens quant aux intentions des Émirats arabes unis derrière cette dangereuse mesure.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *