France : Lafarge réclame 200 millions d’euros à ses anciens dirigeants

Le fabricant de ciment Lafarge, actuellement sous propriété suisse par le biais de Holcim, a lancé une demande de réparations à hauteur de 200 millions d’euros envers son ex-PDG Bruno Lafont et quatre autres individus. Cette initiative judiciaire a pris place lundi devant le tribunal des activités économiques de Paris. Le contexte de cette affaire remonte aux accusations de financement de groupes terroristes en Syrie pesant sur l’entreprise.
Durant l’audience, Lafarge a réaffirmé sa position accusatrice, tenant les anciens dirigeants comme responsables d’un lourd préjudice financier et d’atteinte à sa réputation. Les accusations portent sur des paiements réalisés entre 2013 et 2014, s’élevant à plus de 5 millions d’euros. Ces paiements auraient été réalisés sous forme de « taxes » et d’achats de matières premières auprès de groupes terroristes, y compris Daech. Cette stratégie visait à poursuivre les opérations d’une cimenterie située à Jalabiya, au nord de la Syrie, en proie à la guerre civile.
En 2022, Lafarge avait déjà reconnu les faits devant la justice américaine et accepté de payer une amende de 778 millions de dollars. Aujourd’hui, l’entreprise impute la responsabilité de ces actions à Bruno Lafont, PDG de la société entre 2007 et 2015, ainsi qu’à trois autres anciens cadres et un intermédiaire syrien.
Quentin de Margerie, l’avocat de Bruno Lafont, a également réagi vivement à ces allégations durant l’audience, qualifiant la demande de Lafarge de « délirante ». Il a insisté sur le fait que son client et les autres dirigeants visés n’avaient jamais eu connaissance des transactions incriminées, ni n’avaient approuvé de tels versements.
Bruno Lafont critique également le fait que Lafarge et Holcim aient admis leur culpabilité aux États-Unis sans l’en informer, ce qui, d’après lui, compromet sa présomption d’innocence dans les procédures en cours. Ces dernières incluent un procès pénal prévu pour 2025 devant le tribunal correctionnel de Paris, où Bruno Lafont, sept autres responsables, ainsi que Lafarge seront jugés pour « financement d’entreprises terroristes ». Certaines personnes sont aussi visées pour non-respect des sanctions internationales.
Une autre procédure pourrait les traîner devant les assises pour complicité de crimes contre l’humanité, un chef d’accusation exceptionnellement rare en France.
Le délibéré du tribunal des activités économiques est attendu le 1ᵉʳ avril, bien qu’il puisse être différé à cause des procès pénaux à venir.
Ces informations ont été relayées par l’agence Anadolu, selon laquelle cette affaire pourrait marquer un tournant significatif pour les entreprises accusées de financement illégal.