« En tant que juristes et soucieux de notre pays le Sénégal, rompre le silence devient fatal face à cette situation juridico-politique… »

En tant que juristes et soucieux de notre pays le Sénégal, rompre le silence devient fatal face à cette situation juridico-politique pouvant conduire notre mère patrie dans des nuits sombres.

Depuis quelques jours, l’actualité politique sénégalaise est fortement marquée sur deux points : l’éventuelle irrecevabilité de la liste YEWI ASKAN WI à Dakar et l’irrégularité de la liste du BENNO BOKK YAKAR ;

En l’espèce, la coalition de Yewi Askan Wi a déposé une liste non conforme à la loi sur la parité qui est foncièrement une loi d’ordre public. Sur ce, au cas où la liste serait déclarée irrecevable par la direction générale des élections et qu’un recours aurait été introduite devant le Conseil Constitutionnel, la liste de YEWI aura de faible chance de présenter une liste pour le département de Dakar.

Par ailleurs, contrairement à ce qui semble être admis par un bon nombre de commentateurs à contrario :

En premier lieu, sur une éventuelle saisine du Conseil Constitutionnel à la suite d’un rejet de la liste de Yewi Askan Wi pour le département de Dakar par la Direction Générale des Elections pour non-respect de la parité. Dès lors, Le juge des élections peut être amener à se prononcer sur deux positions.

D’une part, la position de l’organe chargé des élections sur la déclaration de son incompétence de recevoir les nouveaux candidats remplaçants et d’autre part, son éventuelle décision invalidant ladite liste pour non-respect à la loi sur la parité.

D’abord, pour ceux qui font référence à la décision n° 1/ E/ 2001du Conseil Constitutionnel autorisant le Parti socialiste à remplacer son candidat dans le département de Tivaouane.

En conséquence, vouloir invoquer cette jurisprudence sur l’affaire de la coalition de Yewi Askan Wi pour parallélisme des faits serait une interprétation extensive et erronée de cette dernière. Car dans cette décision, il était question d’un candidat qui se retrouvait dans deux listes parallèles. D’ailleurs, c’est ce que le juge des élections a fait mention expresse. Tandis que concernant la coalition de Yewi Askan Wi, il s’agit d’une faute manifeste dont les conséquences sont prévues déjà par la loi. Une liste qui ne respecte pas la parité encoure l’annulation.

En effet, le Conseil Constitutionnel peut motiver sa décision de refus de remplacement des candidats démissionnaires sur le fondement de la fraude à la loi. Ce qui peut renvoyer à l’assertion selon laquelle toute règle de droit comporte en soi une limitation qui interdit son abus. Ce qui revient à dire même si le justiciable a le droit de bénéficier ou d’invoquer une loi. Toutefois, le bénéfice d’un droit ne peut se faire par abus ou fraude. Pour qu’il soit retenue la fraude à la loi, il faut la réunion de trois éléments :

D’une, il faut un élément légal constitué par la norme législative écartée, contournée, fraudée.

Ici, en ce qui concerne la coalition de Yewi askan Wi à Dakar, elle voulait éviter la sanction pour le non-respect de la loi sur la parité dont sa violation entrainera le rejet de sa liste.

D’autre, un élément matériel consistant en une manœuvre destinée à modifier la liste, manœuvre effectuée par le « bénéficiaire fraudeur » du changement des noms des candidats investis. Il s’agit donc d’une manipulation ayant pour objet d’empêcher la liste de yawi à Dakar d’aller aux élections. Il s’agit ici la manœuvre consiste à vouloir remplacer des candidats pour satisfaire les conditions sine qua non de la loi sur la parité. Faute de quoi la liste de Dakar sera déclarée non conforme et irrecevable.

En fin, un élément intentionnel de la fraude à la loi consiste en l’intention frauduleuse. On ne peut s’empêcher de se demander sur les véritables motifs de démission des candidats au regard des circonstances. Toutefois, il reviendra au juge d’apprécier ces actes.

En deuxième lieu, pour rejeter la requête tendant à annuler la décision d’incompétence de la direction des élections pour le remplacement des candidats démissionnaires, la Haute juridiction peut invoquer l’adage selon lequel que « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ». Car, étant donné selon le propos du mandataire national en l’occurrence Monsieur Détihé Fall, a délégué les pleins pouvoirs dans la circonscription électorale de Dakar à Monsieur Saliou Sarr. Dès lors, les actes et démarches de ce dernier engage la coalition, sauf une preuve irréfragable de fraude ou de corruption de partis concurrent aux mêmes élections.

En dernier lieu, en ce qui concerne la décision 2 – E – 2019, affaire n° 12 – E – 2019 séance du 13 janvier 2019, du Conseil Constitutionnel dans ses considérants 31 à 32. Contrairement à ce qu’affirment certains en se référant à la jurisprudence de Malick Gakou en 2019. Pour défendre la thèse selon laquelle la liste de la coalition Benno Bokk Yakaar est irrégulière par ce qu’elle aura dépassé le nombre requis de parrainages.

D’abord, dans son considérant 31, le Conseil rappel les dispositions de l’article L. 116 du code électoral, qui consiste a évoqué le nombre de parrainage déposé. Ce considérant n’est pas le fondement de la décision de rejet de la candidature de Malick Gakou. D’ailleurs, le dépassement du nombre de parrains requis ne peut en lui seul fondé le rejet d’une liste électorale. Le juge n’est tenu que de considérer le nombre légalement requis et non l’excédent.

Ensuite, dans son considérant 32, le juge précise « qu’il résulte des vérifications auxquelles il a été procédé conformément aux dispositions de l’article L. 120 du code électoral, qu’il a obtenu, après régulation, le parrainage validé de 52 911 électeurs domiciliés, à raison de 2 000 parrains par région au moins, dans 11 régions ; qu’il n’a pas obtenu le minimum de parrainages valides de 0,8 % du fichier électoral général exigé par la loi ».

En d’autres termes, l’analyse de cette décision laisse augurer, sans appel, que le Conseil ne reproche pas au candidat Malick Gakou d’avoir déposé un nombre excédentaire de parrains. Cependant, le Conseil Constitutionnel reproche au candidat de ne pas avoir respecter le quota par région exigée par la loi.

Je sais que nous aimerons tous voir Yewi dans cette élection au complet, mais les chances sont minimes au regard des faits. Même si c’est dur la loi doit être appliquée et seul le Sénégal en sortira gagnant.
Il s’agit d’une hypothèse et non d’une vérité erga omnes, le Conseil Constitutionnel peut procéder par une interprétation en situation exceptionnelle.

Article signé conjointement par :
Amadou Baldé juriste (France),
Khadim Ngom juriste (Sénégal).

2 COMMENTAIRES
  • Juridiste

    Foutaise

  • DSY

    Merci pour ces brillantes clarifications.

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