À quelques mois des prochaines élections à la tête de la Fédération sénégalaise de football (FSF), les enjeux dépassent largement le cadre d’un simple scrutin interne. Pour Dr Papa Abdoulaye Seck, ancien ministre et militant engagé du sport, le moment est venu de « remettre la raison au cœur du jeu » et de poser « des critères objectifs, clairs et rationnels » dans le choix du futur président.
« Le football n’est plus un simple divertissement. Il est aujourd’hui une force économique mondiale, pesant plus de 100 milliards de dollars par an », rappelle-t-il dans sa tribune. « Partout, il s’impose comme une question nationale. Son pilotage ne peut donc relever de l’amateurisme ou du copinage. »
Dans cette perspective, Dr Seck invite à prendre au sérieux le processus électoral à la FSF. Pour lui, si le vote revient formellement aux associations sportives, une forme de régulation implicite doit s’exercer. « Il serait naïf de croire qu’un candidat peut sérieusement prétendre à ce poste sans appui institutionnel. L’histoire récente montre que le soutien de l’État augmente considérablement les chances de succès. »
Il insiste sur la nécessité pour les candidats de « dialoguer avec les autorités », non pas pour obtenir une onction, mais pour assurer « une meilleure gestion des équilibres, avant comme après l’élection ». La stabilité du football sénégalais en dépend.
Un président, pas un figurant
Au-delà des jeux d’alliances, c’est le profil du futur dirigeant qui doit faire l’objet de la plus grande exigence. « On ne peut pas confier la gestion d’un sport aussi stratégique à un amateur de passage ou à un gestionnaire sans âme », alerte Dr Seck. Il trace le portrait d’un président de fédération à la fois légitime, compétent et rassembleur.
Parmi les qualités qu’il estime indispensables : « Une maîtrise fine des rouages du football, de la base aux élites, une vision stratégique, la capacité à mobiliser des ressources, une probité incontestable, mais aussi une intelligence du terrain et une aisance relationnelle avec l’écosystème. »
Il ajoute : « Le futur président doit savoir différencier pilotage stratégique et décisions techniques, respecter l’autonomie des clubs tout en assumant sa responsabilité vis-à-vis de la tutelle. » Sans oublier, selon lui, un élément clé : « Il doit être à l’abri du besoin, pour ne pas céder à la tentation d’instrumentaliser sa fonction à des fins personnelles. »
Bannir le vote de complaisance
Face à la montée des enjeux et à l’intensification des passions, l’ancien ministre appelle à un sursaut de maturité. « Le football est trop structurant, trop puissant, trop fédérateur pour être réduit à un vote de circonstance. Ce serait une faute collective. »
Il cite en exemple les désillusions passées. « Nous ne devons plus revivre le traumatisme de 1986, cette immense déception qui a fait pleurer tout un peuple. Les séquelles sont toujours là, malgré notre belle étoile de 2022. »
Pour lui, une élection bâclée pourrait déboucher sur « une chorégraphie fade, un vide de sens, une direction erratique ». C’est pourquoi il exhorte les décideurs et électeurs à « agir avec discernement et responsabilité ».
Trouver l’équilibre entre autonomie et co-gestion
Enfin, Dr Seck insiste sur la nécessité d’articuler, avec intelligence, les rôles respectifs de l’État et du mouvement sportif. « Nous devons tracer une médiane entre l’autonomie légitime des acteurs du football et la responsabilité de l’État dans l’encadrement stratégique du sport. »
Dans un ton solennel, il conclut : « Nous sommes tous concernés. Le football mérite mieux que des arrangements de couloir. Il a besoin de cap, de vision et de rigueur. Mettons la raison au service de notre passion. »
Le message est clair : les prochaines élections à la FSF ne doivent pas être une formalité de plus, mais une occasion décisive de refonder la gouvernance du football sénégalais.