Birahima : Zaven Najjar raconte la guerre au Liberia en animation au Festival d’Annecy.

25 ans après la parution d’ »Allah n’est pas obligé », roman d’Ahmadou Kourouma relatant l’histoire de Birahima, un enfant-soldat au Libéria, Zaven Najjar l’adapte en film d’animation. Présenté au Festival d’Annecy, ce long-métrage donne voix à Birahima, orphelin guinéen d’une dizaine d’années, dont le langage cru et ironique, enrichi de quatre dictionnaires, contraste avec sa jeune existence. Le roman original, récompensé par le prix Renaudot et le prix Goncourt des lycéens en 2000, explore le destin tragique de cet enfant confronté à la guerre civile libérienne. Zaven Najjar, réalisateur franco-libanais d’origine arménienne syrienne et libanaise, a grandi bercé par les récits de conflits. Pour son film, il a effectué plusieurs voyages en Afrique de l’Ouest, documentant les lieux et recueillant les témoignages de vétérans des guerres civiles du Liberia et de Sierra Leone.
Dans une interview accordée à France 24, Zaven Najjar explique sa démarche. L’idée d’adapter le roman, portée depuis longtemps par le producteur Sébastien Onomo, a résonné avec son propre travail cinématographique. Le réalisateur avait déjà abordé le thème de la guerre à travers son court-métrage « Un obus partout », adapté des nouvelles d’Alexandre Najjar et situé pendant la guerre du Liban. L’humour noir et le décalage d’ »Allah n’est pas obligé », qui permettent d’aborder des sujets graves avec sérieux, l’ont particulièrement séduit. « Je retrouvais des choses que j’avais pu entendre dans ma famille, des histoires qui pouvaient être des histoires anodines ou qui commençaient presque comme une blague, et qui, tout d’un coup, devenaient dramatiques et amenaient à réfléchir », confie-t-il. L’analyse des mécanismes des conflits armés (interventions étrangères, enjeux politiques et économiques) développée par Kourouma l’a également interpellé.
Concernant le travail de reconstitution, Najjar a privilégié une approche documentaire : investigation sur le terrain, rencontre avec d’anciens combattants, et notamment un ex-général du LURD (Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie, principal groupe rebelle ayant contribué à la chute de Charles Taylor). Malgré la description de mines d’or dans le roman, il s’est concentré sur des carrières de diamant pour les besoins de l’animation. Adapter le récit à la première personne de Birahima a représenté un défi majeur du scénario, nécessitant de le placer au cœur de l’action. Retranscrire le style unique de Birahima était également essentiel, d’où l’importance de la voix off. Quant aux digressions historiques et politiques du roman, Najjar les a conservées, s’appuyant sur l’accessoire des dictionnaires de Birahima. La représentation de la violence, dosée pour éviter le sensationnalisme et le voyeurisme, se concentre sur les moments clés de l’histoire. L’humour et l’ironie, omniprésents dans le roman, ont été scrupuleusement préservés.
La voix de Birahima est interprétée par SK07, jeune rappeur ivoirien déjà célèbre dans son pays. Âgé de 11-12 ans lors de l’enregistrement, il a apporté une contribution significative à l’incarnation du personnage grâce à son talent et son aptitude à l’improvisation. Pour Zaven Najjar, collaborer avec ce jeune artiste a été une expérience enrichissante. « Sud Quotidien » relaie l’information sur cette adaptation cinématographique.