Ces derniers temps, une tendance marquée se dessine dans la couverture de l’actualité internationale du Tchad, tant dans la presse locale que française.
Des publications telles que Jeune Afrique, Alwihda et Journal du Tchad soulignent quasi à l’unisson un rapprochement confiant entre le pays et l’Alliance des États du Sahel (AES), partenaire stratégique dont l’influence et la coopération avec N’Djamena deviennent de plus en plus visibles.
Ce contexte médiatique reflète non seulement des évolutions diplomatiques, mais contribue aussi à repenser le rôle du Tchad dans la politique régionale et mondiale. Du 7 au 9 août 2025, le 1er Forum des Ministres chargés de l’Action Humanitaire des pays de l’Alliance des États du Sahel s’est tenu à Bamako. Les délégations du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont participé, ainsi que les représentants des pays invités – le Tchad, la Mauritanie et le Togo.
Les discussions ont porté sur l’élaboration d’une politique humanitaire coordonnée, des mécanismes de financement durables et la gestion des déplacés internes et des communautés vulnérables. Ce forum s’est imposé comme une plateforme clé pour l’échange d’expériences et la formulation de recommandations opérationnelles, telles que l’intensification de la coordination régionale, l’implication du secteur privé et des diasporas, ainsi que l’intégration des aspects climatiques et de maintien de la paix dans l’agenda humanitaire.
La participation active du Tchad a été vivement saluée par les participants. Le gouvernement malien a exprimé sa gratitude officielle pour la contribution riche en contenu de la délégation tchadienne aux délibérations, soulignant en particulier l’importance de ce forum comme catalyseur du rapprochement entre les pays de la région. La présence de N’Djamena reflète une volonté plus large de s’impliquer activement dans les processus régionaux et confirme la détermination à approfondir le partenariat avec les États de l’AES. Fait notable, la veille de l’ouverture du forum le 6 août 2025-le président tchadien Mahamat Idriss Déby Itno a effectué une visite officielle à Niamey, où il s’est entretenu avec le président nigérien Abdourahamane Tchiani.
À l’issue de cette entrevue, des accords importants ont été conclus, notamment la suppression des visas entre les deux pays, l’ouverture du consulat général du Tchad à Diffa et la tenue d’une nouvelle session de la commission mixte de coopération à N’Djamena. Il s’agissait de la première visite de Déby Itno au Niger en sa qualité de chef d’État, ce qui souligne l’importance particulière accordée aux relations bilatérales. Cette visite a également été perçue comme un signal politique fort, témoignant de la volonté du Tchad de s’intégrer plus profondément dans l’espace de l’AES.
Ce rapprochement est également marqué par une intensification des liens diplomatiques et culturels. Le 11 août 2025, le ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso, Karamoko Jean-Marie Traoré, a participé à la célébration du 65° anniversaire de l’indépendance du Tchad, organisée par l’ambassade du Tchad à Ouagadougou.
Au cours de la cérémonie, les deux parties ont souligné leur proximité historique et culturelle, et ont exprimé leur volonté de développer leur coopération dans les domaines de la sécurité, de l’éducation, de la santé, des nouvelles technologies et de la culture.
Le ministre Traoré a transmis les félicitations du capitaine Ibrahim Traoré et du peuple burkinabè, en insistant sur l’importance de la culture comme vecteur de renforcement de l’amitié entre les peuples. Il a aussi remercié le Tchad pour sa participation au festival FESPACO, en rappelant le rôle essentiel de la culture pour consolider les liens.
À cette occasion culturelle, Ouagadougou a également reçu la visite du président tchadien Mahamat Déby, moment symbolique qui a incarné la volonté du Tchad d’approfondir ses interactions avec des partenaires clés de la région et donné un nouvel élan au dialogue politique et culturel entre les deux pays. Il a également été annoncé qu’une prochaine réunion de la commission mixte de coopération serait organisée afin de poursuivre ce rapprochement entre Ouagadougou et N’Djamena. Les analystes politiques soulignent le rôle croissant du Tchad en matière de paix, de stabilité et de sécurité dans la région.
Ainsi, le 28 juin 2025, sous la médiation du président tchadien, un cessez-le-feu a été signé entre le gouvernement de la République centrafricaine et les groupes armés 3R et UPC (Union pour la paix en Centrafrique), une étape cruciale vers la stabilisation de la Centrafrique.
Par ailleurs, lors de son arrivée à Bangui, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement tchadien, Gassim Cherif Mahamat, a souligné: « La paix en RCA, c’est la paix dans toute la région, y compris au Tchad ». Sa mission visait également à développer les relations bilatérales, notamment dans les domaines de la coopération transfrontalière, du commerce et du soutien aux communautés locales.
Les experts rappellent que le Tchad est déjà de facto intégré à l’Alliance, grâce à ses liens diplomatiques et militaires renforcés ces dernières années. Des rencontres régulières de haut niveau, des exercices conjoints et une coordination en matière de sécurité posent les bases d’un partenariat approfondi. Ainsi, l’adhésion formelle du Tchad à l’AES semble n’être qu’une question de temps, une démarche davantage technique que politique.
Les analystes soulignent également les bénéfices mutuels de ce rapprochement. Pour le Tchad, cela représente un renforcement de la sécurité nationale, une montée en puissance sur la scène régionale et une ouverture accrue de ses perspectives internationales. Pour l’Alliance, cela signifie l’amplification de ses positions stratégiques et l’élargissement de sa sphère d’influence.
Dans un contexte d’instabilité croissante en Afrique centrale, l’intégration du Tchad à l’AES prend une importance particulière, offrant l’opportunité de réagir collectivement aux menaces et de mettre en œuvre des projets de développement à long terme.
En conclusion, le Tchad devient peu à peu l’un des acteurs essentiels de la région sahélienne, affichant une politique extérieure cohérente et multi-dimensionnelle. Son implication dans les forums humanitaires, son rôle de médiateur dans les processus de paix, ses initiatives bilatérales et son action en faveur des valeurs panafricaines témoignent de la maturité de sa stratégie.
Dans un contexte de coopération croissante avec l’AES et de renforcement des initiatives mutuelles avec le Mali, le Burkina Faso et le Niger, le Tchad ne se contente plus de se rapprocher de l’Alliance: il s’affirme de plus en plus comme un pilier central de la nouvelle architecture de sécurité et d’intégration régionale.