Dans une publication qui date du mois de mars dernier, votre humble serviteur alertait sur des manœuvres souterraines en direction du 3 avril. « Nouveau protocole en téléchargement », interrogions-nous.
Le temps semble nous donner raison, avec la mise en perspective historique d’un énième dialogue sous Macky Sall, après les expériences avortées de 2016 et de l’immédiat post-présidentielle 2019, qui ont viré au monologue, puisque le chef de l’Etat en a profité pour encore démembrer son opposition dont une partie fit dans «l’entrisme».
Nous devons à la vérité de rappeler que, de 1988, nos jours, le Sénégal n’a jamais connu un dialogue politique dont les conclusions ont été appliquées à la lettre.
Certes l’opposition obtint de Abdou Diouf le « Code consensuel », mais ce dernier, qui n’était pas prêt « à scier la branche sur laquelle il était assis », ne respecta pas la promesse sur la limitation des mandats. D’ailleurs, c’est la seule fois qu’on a parlé de dialogue et que le peuple a été informé des tenants et des aboutissants.
Pour le reste, il s’agit de messes basses, sous le mode du « deal », à l’abri des regards. Abdou Diouf et Abdoulaye Wade ont pu négocier discrètement au mitan des années 90 pour de nouveau se retrouver, avec le Gouvernement de majorité présidentielle élargie. Michel Roussin, le fameux agent secret et à l’époque ministre français de la Coopération, peut nous en dire un peu plus, puisque le plus haut parrain François Mitterrand est décédé.
Une fois au pouvoir, Me Abdoulaye Wade n’a jamais réussi à adoucir ses rapports avec ses adversaires. Il y eut une esquisse à la veille de la présidentielle de 2007, mais l’opération capota et l’opposition alors dite significative boycotta législatives.
Par la suite, des Assises nationales sont organisées. Me Wade déchira le carton d’invitation et commissionna son ministre de l’Intérieur Ousmane Ngom qui chargea froidement et lourdement Moustapha Niass et Cie à travers « une si longue lettre… » où il démontra toute sa faconde de robe noire.
En août 2009, le leader du Pds invite son opposition à un débat public sur les scandales ayant éclaboussé le régime socialiste, remuant le couteau dans le souvenir de la mort du commissaire Sadibou Ndiaye en 1987 décédé dans des conditions « mystérieuses ». C’est dans cette atmosphère de relations polaires que Karim Wade, à son corps défendant, convia feu Ousmane Tanor Dieng à un débat public sur les antennes de Walf Tv. Le défunt leader des Verts de Colobane fit faux-bord.
Les tensions seront exacerbées par le projet (avorté) de ticket présidentiel et la 3e candidature controversée du pape du Sopi. Bilan : plusieurs morts et une vitrine démocratique craquelée sous le faix des sanglots. Pour éviter de vivre ces précédents fâcheux, il ne faut pas que le dialogue annoncé, même si les dés semblent pipés d’avance, soit l’enjeu d’un marchandage pour permettre à Macky Sall d’être candidat en 2024, contre sa propre parole qui a valeur de signature dans les codes d’honneur établis par le PEUPLE depuis des temps immémoriaux.
Demandez à Macky de partir, c’est le premier acte de dialogue ! S’ils ne le font pas, Khalifa Sall et Karim Wade, en pensant à la prochaine élection et non aux prochaines générations, auront négocié pour leur sort propre et non pour le destin du Sénégal.
Par Thierno Diop, journaliste