Conflit Israélo-Palestinien: « Un monde abimé, une humanité ensauvagée: une civilisation qui marche à reculons »

Conflit Israélo-Palestinien: « Un monde abimé, une humanité ensauvagée: une civilisation qui marche à reculons »

Plus je réfléchis sur l’état du monde, davantage je suis obligé de concéder que le droit international est une énorme supercherie. Le droit n’existe que pour les faibles, c’est la corvée morale et intellectuelle que les faibles doivent, en permanence, accomplir pour espérer la clémence des forts. Le droit est un principe rationnel, or les nations ne sont pas régies par la raison : leur base est affective, leur démarche toujours rythmée par les passions.

Tous les grands penseurs ont théorisé l’avènement d’un monde rationnel, d’une paix perpétuelle, mais ce que l’expérience montre de façon tangible, c’est que les nations ne sont pas des êtres pacifiques encore moins pacifistes. La première leçon qu’il faut tirer de cette vérité indubitable est que la vraie moralité dans la gouvernance d’une nation, c’est de l’armer de sorte à susciter la peur chez tout ennemi qui pourrait être tenté de l’agresser.

Une nation peut guérir d’une épidémie, de la pauvreté et de tous les autres fléaux, mais quand sa faiblesse est telle qu’elle devient la proie facile d’une autre nation, sa destination finale, c’est d’être rayée de la carte. Si elle subsiste dans un monde si chaotique, cette nation ne le doit qu’aux calculs de la géopolitique.

Le monde occidental est d’un cynisme et d’une cruauté incompatibles avec les notions de justice et d’égalité. Ces gens croient jusqu’aux tréfonds de leur âme culturelle qu’ils sont des prédateurs ; qu’en dehors de leurs sinistres instincts de domination, l’humanité n’est qu’une chose. Les pires atrocités commises dans l’histoire du monde ont leur fondement dans cette croyance des occidentaux en leur suprématie naturelle sur les autres peuples. En Ukraine, ils ont mobilisé jusque dans leur société civile pour sauver des enfants et des civils victimes de l’agression russe. A Gaza, ils mobilisent leurs moyens et leur peuple, pour soutenir Israël dont l’existence et la politique reposent sur la colonisation. La structure actuelle de l’ONU montre que nous ne sommes pas prêts pour la démocratie : le droit de véto en est une illustration parfaite.

Voilà pourquoi nous devons travailler résolument à libérer nos enfants de ce mythe de l’occident en étant extrêmement regardant sur les contenus télés et les réseaux sociaux. Les dessins animés que nous importons et diffusons à outrance ont un impact psychologique dévastateur sur nos enfants. Poséidon, Athéna, Viking, Hercule, etc. : c’est quoi tous ces mensonges pour un enfant africain ? Il est d’une urgence capitale de mettre fin à ce clonage intellectuel et culturel précoce de nos enfants.

Les hommes politiques doivent s’engager à en faire une priorité. Le gouvernement serait bien inspiré de créer une structure dont la vocation est de produire des dessins animés et des programmes à même de valoriser notre patrimoine culturel et nos héros.

La guerre qu’Israël est en train de mener contre le Hamas viole toutes les règles de la guerre, mais nous nous alignons sur la ligne des pays occidentaux comme de grands enfants. Voilà le résultat du clonage culturel. Israël a le droit d’exister, mais ce serait une grave illusion de sa part de croire qu’il sera en paix tant qu’il refusera au peuple palestinien son droit naturel d’exister sur cette terre et de jouir de ses fruits. Israël, sous la bénédiction suspecte des puissances occidentales, colonise sans cesse et de façon arrogante les terres où vivent et travaillent les Palestiniens depuis toujours : cette posture insolente et asphyxiante ne peut pas garantir la paix dont les deux peuples ont besoin.

Le comportement des pays africains et leur lecture de ce conflit, à quelques rares exceptions près, sont révélateurs de la mentalité servile qui sous-tend notre diplomatie. Il faut dénoncer les abus de l’Etat juif avant de dénoncer les terroristes du Hamas. Il faut exiger l’édification d’un Etat palestinien : toute autre solution n’est que supercherie et mensonge diplomatique. Si le monde occidental était plus rigoureux et juste, Israël ne pourrait pas continuer à ignorer les résolutions des Nations Unies. Vouloir la paix pour soi et la refuser aux autres, c’est se mentir à soi.

La bande de Gaza est économiquement asphyxiée depuis des décennies. Ce peuple meurt en temps de paix, pourquoi aurait-il peur de la guerre ? Lai paix leur coûte déjà plus chère que la guerre, car il s’agit d’une paix injuste, d’une paix dans le dénuement, le mépris et la servilité. Quand on est réduit en choses sur la terre de ses ancêtres, on n’a plus le choix : combattre ou être détruit comme une chose sans droit.

C’est quoi ce monde où une population est asphyxiée depuis plusieurs décennies, sur ses propres terres, pour la prétendue sécurité d’autres populations? Celui qui se comporte comme un délinquant international et qui foule aux pieds les règles de la morale internationale ne respectera jamais les lois de la guerre. Un État dont le fondement et la politique sont le mépris des règles de la communauté internationale, ne peut prétexter du droit pour justifier ses actes.

La leçon de morale que les faibles doivent tirer de cette situation est que la communauté internationale est régie par la loi du plus fort, qu’elle est fondée sur le dangereux Mythe qu’il y a une préséance ontologique et axiologique des États et des peuples occidentaux sur ceux du Sud. Il s’agit maintenant de déconstruire ce mythe en soutenant les initiatives des Brics et en veillant que ces Brics ne deviennent pas un Autre Occident.

* Par Alassane K. KITANE

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