Entre appel au pardon et ripostes politiques, la coalition au pouvoir laisse apparaître ses lignes de fracture. Selon l’analyste Ibrahima Bakhoum, journaliste-formateur, la majorité traverse « un moment délicat », où le leadership et l’image des deux figures centrales, Sonko et Diomaye, se trouvent implicitement en concurrence.
Le climat se tend au sein de la majorité présidentielle. La récente prise de parole du ministre Abdourahmane Diouf, appelant à la « réconciliation nationale » et au pardon, a été saluée par certains proches du président Bassirou Diomaye Faye, dont Adiouma Sow ce dimanche, mais vivement critiquée par plusieurs soutiens du Premier ministre Ousmane Sonko.
Cette divergence, loin d’être anecdotique, révèle selon l’analyste politique Ibrahima Bakhoum une fragilité interne plus profonde.
« La coalition a déjà pris des coups dans l’aile », affirme-t-il lundi sur la rfm. « Dans l’esprit d’une partie de la base, Sonko est resté l’acteur principal, celui qui devait être au premier plan. Certains n’ont toujours pas accepté qu’il soit aujourd’hui dans une position secondaire. »
Pour le journaliste Bakhoum, ces tensions traduisent un conflit d’images et de leadership :
« Il y avait un rêve autour de Sonko, une figure centrale. Beaucoup continuent de pousser pour qu’il reste ‘le tuteur’ politique. Or le président de la République a été élu par 54% des électeurs. Cette réalité crée un tiraillement permanent. »
À l’approche du grand rassemblement du 8 novembre, les enjeux symboliques sont forts. Un événement que certains perçoivent comme un test de cohésion.
« Si la majorité ne montre pas son unité ce jour-là, cela peut être interprété comme un signe de faiblesse », prévient l’analyste. « Tout le monde parle de cet ‘avant 8 novembre’. Mais la vraie question, c’est ce qui se passera après. »
Pour lui, le Sénégal n’a pas intérêt à voir cette crise s’aggraver :
« Une instabilité au sommet de l’État fragiliserait le pays. Et n’oublions pas que dans un contexte régional instable, des acteurs extérieurs pourraient exploiter la moindre faille. »
Malgré tout, le politologue rappelle une constante :
« La politique sénégalaise a toujours été dominée par une logique simple : le pouvoir d’abord, le reste après. Nous sommes dans un moment délicat. La suite dépendra de la capacité des acteurs à privilégier l’État plutôt que les ego. »
